La Russie donne un satisfecit à la France pour la bonne exécution du contrat des BPC Mistral

La semaine passé, les Etats-Unis ont exprimé leur inquiétudes au sujet de la vente par la France de 2 Bâtiments de projection et de commandement (BPC) à la Russie pour 1,2 milliard d’euros. Ce contrat, signé en juin 2011, a toujours suscité des réserves à Washington, voire même une franche désapprobation chez les élus républicains du Congrès. Et, avec les événements en Ukraine, ces sentiments n’ont fait qu’empirer.

Quelques jours plus tard, en déplacement en Allemagne, le président Hollande a remis les choses au clair. « Ce contrat (…) s’exécute et il trouvera son aboutissement au mois d’octobre prochain. Pour l’instant il n’est pas remis en cause », a-t-il affirmé, lors d’une conférence de presse avec la chancelière allemande Angela Merkel.

Pourtant, en mars, le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, avait bel et bien évoqué une possible annulation de ce contrat, avant de finalement faire machine arrière. Son homologue à la Défense, Jean-Yves Le Drian, avait temporisé en déclarant qu’une décision définitive serait prise à l’automne, c’est à dire au moment de la livraison du premier BPC – le Vladivostok – à la marine russe.

Lors d’un voyage de M. Fabius à Washington, la diplomatie américaine a une nouvelle abordé la question de ce contrat. « Nous avons exprimé nos inquiétudes auprès du gouvernement français à propos de cette vente. Nous continuerons de le faire », a déclaré, le 12 mai, Jennifer Psaki, porte-parole du département d’Etat.

« Il y a évidemment, comme vous le savez, des sanctions qui ont été imposées contre la Russie en raison de la crise ukrainienne », a-t-elle en évoquant à la fois des questions juridiques concernant cette vente, par ailleurs jugée « non constructive entre Paris et Moscou ».

Qu’a répondu M. Fabius? « La France n’a de leçons de fermeté à recevoir absolument de personne (…) La France fait son devoir qu’il s’agisse de l’Ukraine ou qu’il s’agisse d’ailleurs », a-t-il fait valoir. « La règle dans le domaine des contrats, c’est que les contrats qui ont été passés sont honorés », a-t-il expliqué, lors d’une conférence de presse donnée à Washington. « Juridiquement, nous n’avons pas la possibilité de ne pas les honorer », a-t-il ajouté, précisant que « plus de la moitié » des 1,2 milliards d’euros de cette cente avait été payée par la Russie.

Toutefois, M. Fabius a répété que « la décision finale devra être prise en octobre » pour la livraison du premier BPC. « C’est à ce moment-là que nous verrons quel sera le ‘background’ (ndlr, contexte) juridique de cette décision », a-t-il affirmé.

Et si le scrutin présidentiel ukrainien du 25 mai prochain était perturbé par la Russie? « Si par obstruction les élections étaient impossibles, à ce moment-là nous devrions examiner un échelon supplémentaire (de sanctions) qui pourrait évidemment concerner toute une série de sujets, le sujet de l’énergie, le sujet de la finance, voire le sujet de la défense », a-t-il affirmé.

Et si on en arrive là, que faire? Deux chercheurs, Claudia Major et Christian Mölling, de l’Institut allemand pour la politique internationale et la sécurité SWP (financé par Berlin), auraient une solution. « La crise ukrainienne s’aggravant et les ambitions géostratégiques à long terme de la Russie restant imprévisibles, la France ne devrait en aucun cas armer la marine russe », estiment-ils.

Et cette vente « mettrait en danger la sécurité de l’Europe (et) n’est donc pas seulement un problème français mais un problème européen ». Aussi, ils proposent que l’Union européenne rachète ces deux navires afin de « résoudre le dilemme de la France ». Ces BPC pourraient « être placés sous le commandement commun des marines néerlandaise et belge. Ces deux pays ne nourrissent pas d’ambition de grande puissance maritime et sont rompus à la coopération. L’encadrement serait fourni par toutes les armées de l’UE », expliquent-ils, avant d’ajouter que « La France aurait ainsi fourni une contribution à l’Europe de la défense que le président français François Hollande entend relancer ».

Mais pour le moment, et comme l’a dit le président Hollande, le contrat suit son cours. Et, a priori, les Russes en sont très contents (et qu’ils le disent maintenant n’est pas une coïncidence). Ainsi, un responsable du groupe public russe d’armement Rosoboronexport, cité par l’agence publique Itar-Tass, a affirmé que « l’avancement des travaux est conforme au programme de livraison des deux navires, ce qui témoigne de la fiabilité du partenaire français ».

Mais ce représentant de Rosoboronexport en a également profité pour faire une mise en garde. « Les obligations des parties sont inscrites juridiquement, et leur non-exécution entrainerait inévitablement des mesures de rétorsion », a-t-il prévenu.

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