Le 8e Régiment d’Artillerie fait ses adieux à Commercy

Pour le coup, le lieutenant-colonel Arnaud Riche n’a pas été verni. A peine venait-il de prendre le commandement du 8e Régiment d’Artillerie (RA) qu’il apprenait, à l’occasion d’une visite à Commercy du major-général de l’armée de Terre, la dissolution prochaine du « Brave régiment d’Austelitz ».

L’existence de ce dernier n’avait tenu qu’à un fil lors de la réforme de la carte militaire de 2008 étant donné qu’il faisait partie des unités dont la dissolution était actée. Mais grâce au lobbying des élus locaux auprès du président Sarkozy, le 8e RA avait été maintenu. Et cela essentiellement pour des raisons économiques, le taux de chômage étant déjà élevé dans la région.

« Compte tenu de la situation particulière de Commercy, j’ai demandé au ministre de la Défense de surseoir à cette fermeture, tant qu’une compensation équivalente en termes d’emplois ne sera pas trouvée. Le 8ème Régiment d’Artillerie sera donc pour l’instant maintenu » avait ainsi  écrit l’ancien chef de l’Etat, dann courrier adressé à Bertrand Plancher, député de la Meuse.

En 2011, le groupe Safran fit part de son intention d’installer une usine à Commercy, avec 400 emplois à la clé. Mais ce projet ne devait pas aboutir avant 2017. Aussi, le ministre de la Défense, qui était alors Gérard Longuet, avait indiqué, en avril 2012, qu’il n’était pas question de fermer le 8e RA tant que la « reconversion » n’était pas terminée.

Seulement, l’alternance politique changea la donne, alors que le maire (PS) de Commercy, Bernard Muller, comptait sur la continuité républicaine pour conserver le 8e RA. « Cette manière de faire est un pur scandale. Je n’ai pas été averti de sa venue pour faire une telle annonce alors que je viens de rencontrer le ministre de la Défense », avait-il tempêté, dans les colonnes de l’Est Républicain, en août 2012. « La décision ne me surprend pas, mais la manière de faire me déçoit. On peut se poser des questions sur la façon dont nos dirigeants réagissent » avait surenchérit, dans le même journal, Alain Verneau, le conseil général PS du Canton.

Mais la dissolution du 8e RA était inéluctable. Cela étant, Bernard Muller a fini par obtenir quelques compensations, dont la révision du contrat de développement économique du territoire, avec 1,7 millions d’euros supplémentaires par rapport aux 14 millions déjà prévus en juillet 2011, la construction d’un centre de formation qui devrait être opérationnel pour la rentrée 2014, l’arrivé d’autres sociétés à Commercy, comme Albany et KEP Technologies ainsi que des actions de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) pour favoriser la venue d’autres entreprises dans la région.

Quoi qu’il en soit, quand un régiment roule son étendard, c’est une page d’histoire qui se tourne. Et celle du 8e RA aura été particulièrement riche en près de 230 ans d’existence. Les noms des batailles inscrits en lettre d’or dans la soie de son emblème sont là pour le démontrer s’il en était besoin : Austerlitz, Friedland, Sébastopol, Solférino, Lorraine (1914), Verdun (1916), Soissonnais (1918) et AFN (1962). Et l’imminence de sa disparition ne l’a pas empêché d’envoyer récemment une batterie  au Tchad, laquelle a pris part à une campagne de tir interarmes à Tchigchika, situé à plus de 850 kilomètres à l’Est de N’djamena.

La dissolution du 8e RA sera officiellement prononcée le 25 juin. Mais avant, les artilleurs ont tenu à faire, ce 22 juin, leurs adieux aux habitants de Commercy, où leur régiment est implanté depuis 1964, avec une ultime cérémonie organisée du côté du château Stanislas. La population locale, ou du moins une partie, avait manifesté à plusieurs reprises contre cette disparition annoncée.

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