La France s’engage à ne pas effectuer d’essais de « missiles antisatellites destructifs à ascension directe »

Dès le début de la conquête spatiale, les États-Unis cherchèrent à se doter d’une arme antisatellite, en développant le missile « Bold Orion », tiré par un bombardier B-47 Stratojet. Ce programme permit de démontrer qu’il était en effet possible d’atteindre un objet placé en orbite. Cependant, cette capacité fut obtenue en 1985, avec le tir d’un missile AASM-135 ASAT [Ascent Anti-SATellite par un F-15 Eagle de l’US Air Force contre le satellite P78-1 [Solwind], évoluant alors à 550 km d’altitude.

Les États-Unis firent à nouveau la démonstration de cette capacité en 2008, l’US Navy ayant détruit un satellite espion en perdition avec un missile RIM-161 SM3, conçu pour la défense antimissile. Ce qui fut perçu, à l’époque, comme étant une réponse à l’essai réussi d’une arme anti-satellite [un missile balistique de portée intermédiaire, en l’occurrence] par la Chine, en janvier 2007.

Depuis, l’Inde a intégré le cercle très fermé des pays disposant d’une telle capacité… Cercle dont la Russie fait partie, comme elle le confirma en novembre 2021, avec la destruction du satellite Cosmos-1408 avec une nouvelle arme à ascension directe, appelée PL-19 Nudol. Cet essai, qui mit en danger la Station spatiale internationale [ISS], généra environ 1500 débris spatiaux, représentant autant de dangers pour les satellites évoluant à une altitude comprise entre 200 et 1000 km. D’où les remontrances faites à Moscou par les États-Unis [ainsi que par la France]…

Cela étant, l’usage militaire de l’espace a fait l’objet d’intenses débats, en octobre, au sein de la Première commission de l’Assemblée générale des Nations unies, chargée des questions relatives au désarmement et à la sécurité internationale. Et deux camps se sont opposés : l’un emmené par la Russie et la Chine, l’autre par les Occidentaux en général, et les États-Unis en particulier.

Plusieurs projets de textes ont cristallisé les oppositions. Ainsi, défendues par la Russie et la Chine, les résolutions L-67 et L-70 ont respectivement porté sur le « non déploiement d’armes dans l’espace en premier » et sur de « nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace ». Si elles ont été [difficilement] adoptées, elles ont cependant suscité l’opposition de la plupart des pays occidentaux, dont la France, les États-Unis et le Royaume-Uni.

« Le but de ces résolutions devrait être de renforcer la sûreté de l’environnement spatial. Or, pour favoriser ce processus, c’est la résolution proposée par les États-Unis qui offre des moyens supplémentaires de lutte. En revanche, les résolutions présentées par la Russie ne répondent pas de façon adéquate aux menaces. Ainsi, elles ne définissent pas ce qu’est une ‘arme dans l’espace’. Or, un satellite civil peut être utilisé comme arme. Le projet russe contient aussi des termes sans aucun rapport avec le sujet, par exemple ‘des efforts communs pour une communauté d’avenir partagé pour l’humanité’, ce qui ne veut rien dire », a fait valoir la diplomatie française.

Dans le même temps, malgré l’opposition de la Russie et de la Chine [mais aussi celle de l’Iran, de la Syrie, de Cuba ou encore de la Biélorussie], les résolutions L-62 et L-27 ont été largement adoptées. La première proposait de demander aux États membres de prendre l’engagement à ne pas procéder à des « essais de missiles anti-satellites à ascension directe à visée destructrice » tandis que la seconde visait à « réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable ».

La Russie a expliqué son vote sur le projet de résolution L-62 en faisait valoir que celui-ci ne prévoyait « pas de moratoire » sur l’utilisation d’armes antisatellites existant déjà. Quant à la Chine, elle a décrit la résolution L-27 comme étant une « initiative hypocrite ».

Quoi qu’il en soit, et alors que les États-Unis ont déjà annoncé, en avril dernier, qu’ils renoncerait désormais à tester des armes anti-satellites à ascension directe, la France a indiqué qu’elle en ferait de même…. alors qu’elle n’a jamais disposé d’une telle capacité.

« La France prend formellement l’engagement à ne pas conduite des essais de missiles antisatellites destructifs à ascension directe », a en effet annoncé le ministère des Armées, via un communiqué diffusé le 29 novembre au soir. Elle « n’a jamais procédé à de tels essais qu’elle considère déstabilisateurs et irresponsables. Ils sont à l’origine de nombreux débris qui peuvent entraîner de graves conséquences sur la sécurité et la sûreté spatiales, en particulier en compromettant l’intégrité des satellites en orbite », a-t-il fait valoir.

La France « apporte tout son soutien à cette nouvelle norme de comportement responsable et à son universalisation, dans le cadre multilatéral des Nations Unies » et « continuera à œuvrer avec l’ensemble des États volontaires pour renforcer la confiance et la transparence entre tous les acteurs dans l’espace », a-t-il conclu.

Cela étant, il existe d’autres moyens de rendre un satellite inopérant, sans pour autant le faire exploser en orbite. Par exemple, il est possible de prendre le contrôle d’un engin en orbite via une attaque informatique. Des systèmes laser ou des armes à impulsion électromagnétiques peuvent aussi être utilisés, notamment pour neutraliser l’électronique de bord.

Photo : Missile antisatellite ASAT PDV MkII développé par l’Inde

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