Le Mali dit qu’il pourrait faire usage de la force en cas de violation de son territoire par l’armée française

On aurait pu penser que, sitôt le dernier soldat français parti de Gao, la junte malienne allait mettre un terme à ses attaques informationnelles contre la France. Il n’en a rien été. Alors que le retrait de la force Barkhane du Mali venait de s’achever, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a adressé un courrier à présidence en exercice chinoise du Conseil de sécurité des Nations unies afin de réclamer une réunion pour évoquer les « actes d’agression » français.

Dans sa lettre, M. Diop a fait état de « plus de 50 cas délibérés de l’espace aérien malien par des aéronefs étrangers, notamment opérés par les forces françaises sous différentes formes ». Ce qui n’est pas nouveau : en avril, le colonel Abdoulaye Maïga, ministre de l’Administration territoriale et porte-parole du gouvernement de transition, avait porté les mêmes accusations, après la mise en échec d’une tentative d’attaque informationnelle contre Barkhane, qui venait alors de quitter la base opérationnelle avancée de Gossi.

Pour rappel, grâce au survol de cette emprise par un drone Reaper, l’État-major des armées [EMA] avait pu diffuser des images montrant des « soldats de type caucasiens », appartenant très vraisemblablement au groupe paramilitaire Wagner, en train d’enterrer des cadavres dans une fosse commune alors que, via les réseaux sociaux, de faux profils commençaient à prétendre que militaires français avaient quitté Gossi en laissant un charnier derrière eux.

Visiblement, la mise en échec de cette tentative de manipulation fut difficile à avaler pour la junte malienne, qui promit alors une enquête… tout en accusant Barkhane de mener des actions de « subversion » dans le but de ternir l’image des Forces armées maliennes [FAMa]. Dans sa lettre, M. Diop reprend donc exactement les mêmes éléments de langage qu’en avril dernier…

Cependant, il avance d’autres faits, impossibles à vérifier en l’état… quand ils ne sont pas tout bonnement improbables. Ainsi est-ce le cas des allégations concernant l’attaque jihadiste de Tessit [où un quarantaine de soldats maliens ont perdu la vie], le 7 août dernier. Pour rappel, les FAMa affirmèrent, peu après, que les assaillants avaient bénéficié d’un « appui majeur et d’une expertise extérieure ».

Le chef de la diplomatie malienne en a dit davantage… quitte à se risquer à « mouiller » les forces britanniques. « Le 8 août, à 37 km de Tessit, un hélicoptère Chinook a survolé les renforts FAMa de Gao en mouvement vers Tessit, dans la direction opposée de progression. Le Chinook, surpris dans ses activités, a subitement repris de l’altitude. Les recoupements du Poste de commandement interarmées de théâtre [PCIAT] Est auprès des partenaires n’ont pas permis de confirmer l’origine de l’appareil », a-t-il écrit.

Seulement, les forces françaises ne possèdent pas de CH-47D Chinook [et elles le regrettent d’ailleurs…]. Et les seuls qui en disposent au Mali sont les militaires britanniques, pour appuyer leur contingent mis à la disposition des Nations unies. Cela étant, il est vrai aussi que la Royal Air Force a engagé ses appareils au profit de Barkhane.

Plus généralement, M. Diop assure que Bamako dispose de « plusieurs éléments de preuve que ces violations flagrantes de l’espace aérien malien ont servi à la France pour collecter des renseignements au profit des groupes terroristes opérant dans le Sahel et pour leur larguer des armes et des munitions ».

Quoi qu’il en soit, pour la diplomatie malienne, ces actes qu’elle prête à la France « constituent une agression ». Et d’ajouter : « En cas de persistance dans cette posture qui porte atteinte à la sécurité de notre pays, le gouvernement du Mali se réserve le droit de faire usage de la légitime défense, conformément à l’article 51 de la Charte des Nations unies ». Pour le moment, Paris n’a pas réagi.

Reste que la propagande anti-française, probablement inspirée par Moscou, fait des émules. Ainsi, les autorités nigériennes ont interdit une manifestation devant être organisée par le mouvement M62 pour demander le départ de Barkhane du pays.

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