Taïwan : Pékin montre ses griffes lors de l’entrée d’un groupe aéronaval américain en mer de Chine

À peine élu, en 2016, le président Trump donna le sentiment qu’il allait prendre ses distances avec le principe d’un « Chine unique », auxquelles les États-Unis se rallièrent en 1979, quand ils reconnurent officiellement la République populaire de Chine, en s’engageant à revoir la forme de leurs relations diplomatiques avec Taïwan, île considéré comme rebelle à Pékin.

La suite confirma cette tendance, avec plusieurs mesures ayant provoqué la colère des autorités chinoise. Ainsi, l’administration Trump décida de rétablir les visites portuaires mutuelles entre l’US Navy et la marine taïwanaise, de donner quasiment le statut d’ambassade à l’Institut américain de Taïwan, d’amplifier les contacts diplomatiques, avec l’envoi de hauts responsables à Taipei ou encore d’autoriser de nombreuses ventes d’armes susceptibles d’améliorer significativement les capacités militaires de l’île.

Dans le même temps, l’US Navy mena plusieurs opérations dites FONOP [Freedom of Navigation Operations] dans le détroit de Taïwan, provoquant à chaque fois l’indignation de Pékin… qui, de son côté, a intensifié ses activités militaires dans les environs immédiat de l’ex-Formose.

Enfin, parmi les dernières décisions prises durant les derniers mois de la présidence de M. Trump, on peut citer la délivrance d’une licence d’exportation pour un système de sonar destiné aux futurs sous-marins taïwanais ou encore la levée de toutes les restrictions que le département d’État s’était imposé dans ses relations avec Taipei.

Qu’en sera-t-il désormais, maintenant que le démocrate Joe Biden est à la Maison Blanche? Au lendemain de son investiture, à laquelle fut invité l’ambassadeur de facto de Taïwan aux États-Unis [une première depuis 1979, ndlr], la Chine a plaidé pour un « nouveau départ dans les relations bilatérales » avec la nouvelle administration américaine, appelant à « traiter les problèmes concernant Taïwan de façon précautionneuse et appropriée pour éviter de nuire » à ces dernières.

Seulement, le 23 janvier, et pour donner le ton à ce « nouveau départ », l’Armée populaire de libération [APL] a envoyé 8 bombardiers H6K et cinq chasseurs J-16 dans la zone d’identification et de défense aérienne [ADIZ] taïwanaise, à la hauter des îles Pratas qui, située dans le nord-est de la mer de Chine méridionale, appartiennent à Taïwan.

Il faut dire que, quasiment au même moment, le porte-avions USS Theodore Roosevelt faisait sont entrée en mer de Chine, avec son escorte, pour y « conduire des missions de routine », pour reprendre les termes du communiqué de l’US Navy.

« Après avoir parcouru ces eaux tout au long de mes 30 ans de carrière, c’est formidable d’être à nouveau en mer de Chine méridionale, pour mener des opérations de routine, promouvoir la liberté des mers et rassurer alliés et partenaires, a commenté le vice-amiral Doug Verissimo, commandant du Carrier Strike Group 9. « Les deux tiers du commerce mondial transitant par cette région très importante, il est vital que nous maintenions notre présence et continuions de promouvoir l’ordre fondé sur des règles qui nous a tous permis de prospérer », a-t-il rappelé.

L’USS Theodore Roosevelt est notamment accompagné par le croiseur USS Bunker Hill [classe Ticonderoga] et les contre-torpilleurs USS Russell et John Finn [classe Arleigh Burke]. Certainement qu’un sous-marin nucléaire d’attaque [SNA] fait partie de l’escorte.

Faut-il y voir un lien entre l’arrivée du groupe aéronaval américain en mer de Chine méridionale [que Pékin revendique dans sa quasi-totalité, ndlr] et l’envoi par l’APL de 8 bombardiers H6-K, de 4 chasseurs J-16 et d’un avion de patrouille maritime Y-8? Cela n’a rien d’évident, étant donné que les exercices sont généralement longtemps programmés à l’avance. En tout cas, le quotidien Global Times, qui est l’une des voix du Parti communiste chinois [PCC], l’a sous-entendu.

« Escortés par des avions de combat J-16, huit bombardiers H-6K, capables d’emporter un total de 48 missiles anti-navires, peuvent lancer une série d’attaques à saturation sur un porte-avions hostile », a en effet prévenu le journal, citant un « expert militaire sous couvert d’anonymat. »

Et d’ajouter que cela constitue une « forte dissuasion contre les provocations américaines », notant au passage que le CNS Shandong, le second porte-avions chinois, est désormais opérationnel.

Puis, le lendemain, l’APL a de nouveau envoyé une formation aérienne comprenant au moins 12 chasseurs et trois bombardiers dans le même secteur. Puis, le ministère chinois des Affaires étrangères a estimé que la présence de ce groupe aéronaval américain constitue une « démonstration de force qui ne conduit pas à la paix et la stabilité de la région. »

Pour la diplomatie américaine, c’est au contraire la Chine qui tient un rôle déstabilisateur, disant « noter avec inquiétude la tendance actuelle de la République populaire de Chine à intimider ses voisins, dont Taïwan ». Aussi a-t-elle presser « Pékin de cesser ses pressions militaires, diplomatiques et économiques » sur Taipei, tout en assurant que les liens entre les États-Unis et Taïwan resteraient « solides comme un roc ».

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