Lockheed-Martin va transformer les avions de transport de l’US Air Force en bombardiers

En février 2016, dans le cadre de la présentation du budget qu’il envisageait de demander au Congrès pour l’année fiscale suivante, le Pentagone avait indiqué qu’il songeait à développer un concept appelé « Arsenal Plane« . Bien que n’étant fondamentalement nouvelle, l’idée consistait à transformer un avion de transport en « camion à munitions intelligentes » et le faire évoluer en réseau avec des chasseurs-bombardiers de 5e génération [F-35 ou F-22] ayant le rôle de « capteurs avancés » pour désigner les cibles.

Transformer un avion de transport en appareil capable d’assurer des missions de combat n’est pas nouveau : cela a en déjà été fait avec les AC-130 Gunship, dont la dernière version – l’AC-130J Ghostrider – peut emporter des missiles AGM-114 Hellfire ou des bombes GBU-39. En France, le système SSA-1101 Gerfaut, imaginé par le bureau d’études AA’ROK, visait à permettre à un C-130H Hercules de tirer des armements air-sol modulaires [AASM] Hammer. Ce qui était susceptible d’intéresser le Commandement des opérations spéciales [COS].

Cela étant, le concept d’Arsenal Plane a une autre finalité. Déjà, dans les années 1980, Boeing avait eu le projet de transformer un avion de ligne B-747 en « bombardier » pouvant emporter jusqu’à 70 missiles. Mais les technologies n’étant pas encore assez mûres à l’époque, il fut abandonné. D’autant plus que se posait la question de la vulnérabilité d’un tel appareil.

Reste que depuis 2016, l’idée de cet « Arsenal Plane » a été affinée, sous l’égide de l’Air Force Research Laboratory [AFRL]. En janvier dernier, un premier test a été effectué en coopération avec Air Force Special Operations Command [AFSOC], dans le cadre du programme CLEAVER [pour Cargo Launch Expendable Air Vehicles with Extended Range]. Ainsi, un MC-130J Commando II a largué cinq palettes [ou CEP pour Combat Expendable Platforms] contenant chacune six « munitions simulées », dont quatre furent décrites comme étant des « armes à longue portée et de haute précision », capables de « détruire des cibles mobiles et immobiles ».

Le même essai a été répété plus tard, mais avec un C-17 Globemaster III. Puis, début octobre, des maquettes de missiles air-sol AGM-158 JASSM-ER [Joint air-to-surface standoff missile – Extended Range] furent conditionnés sur des palettes et largués par un appareil du même type, appartenant à la 412th Test Wing de l’Air Mobility Command [AMC]

En février, l’AFLR a lancé une demande d’informations sur le concept de « munitions palettisées » ainsi que sur d’éventuelles technologies pouvant être utilisées à cette fin. Et, le 28 octobre, Lockheed-Martin a indiqué avoir été retenu pour soutenir la prochaine phase d’expérimentation, dans le cadre d’un contrat de 25 millions de dollars.

« Bien que le programme de munitions palettisées soit relativement nouveau, il évolue très rapidement. L’AFRL et les équipes de Lockheed-Martin ont établi en un temps record de 30 jours ce nouveau contrat, qui prévoit un prototypage plus rapide et un délai plus court pour apporter ces capacité avancée aux combattants sur le terrain », a commenté Scott Callaway, directeur de Lockheed Martin Advanced Strike Systems.

« Des études préliminaires ont montré que les avions de transport ont le potentiel de déployer de grandes quantités de missiles JASSM-ER, offrant une augmentation significative de leur portée et complétant ainsi les avions d’attaque et de bombardement traditionnels. Cette approche innovante permet […] d’engager un plus grand nombre d’objectifs adverses », souligne l’industriel. Et d’ajouter : « L’objectif global de l’expérimentation est de développer un système modulaire pour délivrer des armes lancées par voie aérienne, en tirant parti des procédures et des opérations de largage standard. »

Selon les premières études, un C-17 pourrait ainsi emporter jusqu’à 32 missiles JASSM-ER, dont la portée est d’environ 1.000 km.

L’intérêt de ce concept est surtout de saturer les défenses adverses, dans un environnement contesté, en faisant décoller de plusieurs endroits à la fois des appareils chargés de missiles conditionnés en palettes.

Cependant, il est susceptible de réduire le nombre d’avions de transport disponibles pour les missions traditionnelles de l’Air Mobility Command, d’autant plus que, par exemple, les chaînes d’assemblage du C-17 ont été fermées par Boeing… Et qu’un autre programme de l’US Air Force, appelé « Gremlins« , vise à faire des C-130J Hercules des « porte-drones volants ».

Photo : US Air Force

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