L’Europe exposée à une menace croissante d’attentat chimique, biologique et radiologique?

Selon le dernier rapport d’Europol sur le terrorisme, environ 5.000 ressortissants de l’Union européenne ont rejoint l’Irak et la Syrie pour s’enrôler dans une organisation jihadiste, à commencer par l’État islamique. Et toujours d’après cet office européen de police, 1.500 d’entre eux seraient déjà revenus dans leur pays d’origine et 1.000 auraient été tués.

Reste le sort des 2.500 autres… Certains ont été arrêtés sur place et sont actuellement détenus par les autorités irakiennes ou les Forces démocratiques syriennes (FDS), constituées par les milices kurdes et des groupes arabes armés. D’autres ont préféré rejoindre des branches de l’EI implantées en Afghanistan, en Libye, en Malaisie ou encore aux Philippines. Enfin, un certain nombre d’entre eux font profil bas, le temps de se faire oublier, dans des pays de transit, comme la Turquie.

Par ailleurs, et cela avait été souligné par la Revue stratégique française, la situation des Balkans occidentaux est préoccupante. Il est estimé que cette région a fourni environ 1.000 combattants à l’EI entre 2014 et 2016 et il est attendu qu’un nombre important d’entre-eux aient l’idée de revenir dans leurs pays d’origine. Et ce retour, lit-on dans le rapport d’Europol, serait « facilité par des groupes liés au crime organisé, engagés dans les fililères d’immigration illégale. »

Aussi, il y a de quoi s’inquiéter étant donné que ces jihadistes reviendront chez eux en étant aguerris, avec la possibilité de se procurer facilement des armes légères et des munitions…

Cela étant, « la vague de ‘revenants’ ne s’est pas produite dans les proportions redoutées », a estimé Manuel Navarrete, qui dirige le Centre antiterroriste d’Europol (CTC). Mais « le suivi de ces combattants endurcis par leur expérience syrienne ou irakienne reste cependant la principale préoccupation des services européens de l’antiterrorisme », a-t-il poursuivi.

« La menace principale vient des combattants terroristes de l’étranger même si le nombre de ceux qui rentrent est assez faible », a ajouté M. Navarrete. « Leur exemple inspire en revanche les auteurs d’attentats préparés et commis sur le sol européen, souvent avec des moyens d’action limités (arme blanche, voiture bélier) », a-t-il indiqué.

Or, sur ce point, et sachant que certains pays sont plus concernés que d’autres par les filières jihadistes (il y a eu 373 arrestations en France dans cette mouvance, contre seulement 2 en Pologne), Europol a constaté qu’il y avait eu sur le sol européen, deux fois plus d’attaques jihadistes en 2017 qu’en 2016. Au total, 33 ont été commises, dont 10 ont tué 62 personnes (contre 13 pour 135 personnes tuées un an plus tôt).

Aussi, conclut Europol, si « le nombre d’attaques terroristes jihadistes [commises dans l’UE] a augmenté en 2017 », leur « niveau de préparation et d’exécution est devenu moins sophistiqué. » En outre, poursuit le rapport, leurs auteurs « se sont radicalisés dans leur pays de résidence sans avoir voyagé pour rejoindre un groupe terroriste à l’étranger. »

Étant mis sur la défensive en Irak et en Syrie, où il a perdu une grande partie des territoires qu’il contrôlait, l’EI « encourage ses partisans à mener des attaques de manière solitaire dans leurs pays d’origine, plutôt que de les faire venir vers le soi-disant califat », souligne Europol, pour qui « la menace d’attaque jihadiste au sein de l’UE reste aiguë, comme en témoignent les attentats qui ont eu lieu en 2017. »

Mais le rapport d’Europol met en lumière une tendance particulièrement inquiétante, d’ailleurs illustrée par l’actualité récente, avec l’arrestation de deux individus (l’un en France, l’autre en Allemagne) ayant eu le projet de commettre un attentat biologique, en particulier en utilisant de la ricine. Qui plus est, en août 2017, deux jihadistes – Khaled Khayat et Mahmoud Khayat – ont été interpellés en Australie pour avoir planifié une attaque chimique dans un aéroport, pour le compte de l’EI.

Ainsi, Europol dit constater que les sujets liés aux attaques NRBC [nucléaire, radiologique, biologique, chimique] apparaissent « régulièrement dans la propagande terroriste en ligne » et que le nombre de messages et de tutoriels jihadistes « adressés à des acteurs isolés » et « proposant des scénarios faciles à mettre en oeuvre pour des attaques NRBC » a augmenté par rapport aux années précédentes.

« En particulier, plusieurs médias jihadistes ont utilisé les médias sociaux pour diffuser leurs connaissances sur les armes chimiques en 2017 » et des documents ont suggéré des scénarios basé sur la contaminations d’aliments et de l’eau « comme tactiques terroristes possibles pour des acteurs solitaires », lit-on dans le rapport.

L’objectif des organisations jihadistes, dont al-Qaïda, est d’augmenter le nombre de tentatives d’attaques NRBC avec « l’espoir » que l’une d’entre elles réussisse. Mais elle ne sont pas les seules à songer à un tel mode opératoire. En effet, Europol rapporte qu’un groupe d’extrême-gauche, appelé « Green Nemesis Act 3 », a empoisonné des boissons et de la viande dans un supermarché, le but étant de s’en prendre aux multinationales de l’agro-alimentaire.

Photo : Ministère des Armées

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