Pour Ankara, l’indépendance du Kurdistan irakien peut provoquer une « conflit mondial »

« Initiative inopportune » pour Jean-Yves Le Drian, le chef de la diplomatie française. « Décision unilatérale » qui va « amoindrir » la lutte contre l’EI, pour Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies. Un acte « provocateur » et « déstabilisant » pour Washington…

Les conséquences du référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien, qui doit normalement avoir lieu le 25 septembre, même s’il a été déclaré anti-constitutionnel par la Cour suprême irakienne, inquiètent à peu près tout le monde. Sauf Israël, dont le Premier ministre, Benjamin Netanyahou a dit soutenir les « efforts légitimes du peuple kurde pour atteindre son propre État ».

En premier lieu, l’indépendance du Kurdistan irakien, qui bénéficie déjà d’une large autonomie, pourrait fragiliser les opérations menées actuellement contre l’État islamique (EI ou Daesh), en plus de mettre en péril l’intégrité territoriale de l’Irak.

Sur ce point, la délimitation de certains territoires, contrôlés par le Kurdes irakiens mais revendiqués par Bagdad, est une autre source de préoccupation. Tout comme la situation de riche ville pétrolière de Kirkouk. Au-delà de l’Irak, l’Iran et la Turquie, qui comptent une importante minorité kurde, voient dans ce référendum une menace susceptible de les déstabiliser à plus ou moins moyen terme.

Aussi, la Turquie, qui a pourtant de bonnes de relations avec le Kurdistan irakien, est à la pointe de l’opposition à la tenue de ce référendum. Référendum qui « aura un prix », a-t-elle menacé. Le 19 septembre, l’armée turque a ainsi commencé des manoeuvres à la frontière irakienne tout en continuant d’y mener des « opérations antiterroristes » contre le PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan turc.

En août, Mevlüt Cavusoglu, le ministre turc des Affaires étrangères, avait estimé que référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien « ne ferait qu’aggraver la situation » en Irak tout en étant susceptible de « mener jusqu’à une guerre civile. » Ce qui n’est effectivement pas impossible, des affrontements entre les combattants kurdes irakiens (Peshmergas) et des groupes paramilitaires chiites (voire les forces irakiennes) pouvant éclater pour s’assurer du contrôle de territoires abandonnés par Daesh.

Un mois plus tard, le ton d’Ankara s’est fait plus alarmiste. « Un changement, qui serait une violation de l’autorité
territoriale de l’Irak, poserait un problème majeur », a dit, le 19 septembre, Nurettin Canikli, le ministre turc de la Défense. Et pour cause : « La perturbation de l’autorité territoriale de la Syrie et de l’Irak va provoquer un conflit mondial, généralisé, dont l’issue est inconnue », a-t-il estimé.

En attendant, lors d’un discours prononcé à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies, le président turc, ecep Tayyip Erdogan, a de nouveau lancé un appel (ferme) aux responsables du Kurdistan irakien.

« Nous appelons le gouvernement régional du Kurdistan irakien à annuler l’initiative qu’il a lancée » pour l’indépendance, a dit M. Erdogan. « Ignorer la position claire et résolue de la Turquie sur ce sujet pourrait mener à un processus qui priverait le gouvernement régional du Kurdistan irakien des opportunités dont il bénéficie actuellement », a-t-il prévenu.

Photo : Peshmergas irakiens

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