Le chef de la diplomatie de l’UE appelle les forces navales européennes à « patrouiller » dans le détroit de Taïwan

En déclarant, dans les pages du quotidien « Les Échos » du 11 avril, au sujet des menaces de Pékin à l’égard de Taïwan, que la « pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes » et « nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise », le président Macron s’est attiré de nombreuses critiques…

À commencer par celles de la Commission européenne. « L’Union européenne reste fermement opposée à l’usage de la force pour tenter de briser le statu quo dans le détroit de Taïwan », a ainsi rappelé son porte-parole, Éric Mamer. Et le Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, Josep Borrell, a enfoncé le clou dans une tribune publiée par le Journal du Dimanche [édition du 23 avril].

« Sur Taïwan, notre position est simple et constante. Il n’y a à nos yeux qu’une seule Chine. Mais pas à n’importe quelles conditions. Et certainement pas au travers du recours à la force. L’Europe doit en réalité être très présente sur ce dossier qui nous concerne sur le plan économique, commercial et technologique », a en effet écrit le chef de la diplomatie de l’UE.

Mais celui-ci est allé encore plus loin en appelant les « marines européennes à patrouiller dans le détroit de Taïwan [que la Chine considère comme sien, ndlr] pour signifier l’attachement de l’Europe à la liberté de navigation dans cette zone absolument cruciale » tout en étant « vigilants face aux provocations et aux surenchères ». Et d’insister : « L’immense majorité de la population taïwanaise estime que le statu quo pacifique est la solution la plus appropriée. Soyons donc fermes pour faire respecter ce principe ».

Le souci est que peu de pays européens sont susceptibles de répondre à cet appel… notamment parce qu’ils n’en ont pas les moyens. Ces dernières années, seules la Royal Navy [avec la frégate de type 23 HMS Richmond] et la Marine nationale ont envoyé des navires dans le détroit de Taïwan. Et cela encore récemment, la frégate de surveillance Prairial y ayant transité pour rejoindre la Corée du Sud, après une escale au Vietnam. La « Royale » a encore fait mieux, avec l’envoi de son navire de renseignement « Dupuy de Lôme ». En outre, la frégate Vendémiaire s’y est aventurée à deux reprises, dont une qui motiva une note de protestation émise par Pékin.

En 2021, lors d’un déploiement de longue durée en Indo-Pacifique [le premier de la Deutsche Marine en plus de vingt ans], la frégate Bayern avait pris soin d’éviter de naviguer dans le détroit de Taïwan…

Peut-être que la marine italienne [Marina Militare] exaucera le voeu de M. Borrell, le patrouilleur hauturier Francesco Morosini ayant appareillé de La Spezia au début de ce mois pour une mission en Extrême Orient. Il « sillonnera les eaux de la mer de Chine pour arriver aux ports de Yokosuka [Japon, 14-18 juin] et de Pusan [Corée du Sud, 21-24 juin] et ménera des activités relevant de la diplomatie navale dans quinze ports de quatorze pays d’Asie du Sud-Est », a précisé Analisi Difesa. En outre, l’Italie prévoit d’envoyer le porte-aéronefs ITS Cavour dans cette région, a priori en 2023, voire en 2024.

Quoi qu’il en soit, peu de pays européens [et ils sont encore moins nombreux depuis le Brexit] sont en mesure d’envoyer des navires dans le détroit de Taïwan. Et encore les auraient-ils qu’il pourrait leur manquer la volonté de le faire…

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