Arctique : Démonstration de force russe avant l’arrivée de quatre bombardiers américain B-1 Lancer en Norvège

Cette semaine, et alors que le croiseur lance-missiles « Maréchal Oustinov » entamait un entrainement au combat en en mer Barents, deux bombardiers stratégiques russe de type Tu-160 « Blackjack » ont effectué une mission de 12 heures dans la région de l’Arctique.

Ayant décollé d’Engels [sud-ouest de la Russie], ces deux appareils se sont dirigés vers la péninsule de Kola [frontalière avec la Finlande] avant de mettre le cap vers la mer de Norvège. Puis, après avoir longé une partie de la côte norvégienne, ils sont passés au large de l’Islande et ont survolé la mer du Groenland jusqu’à l’archipel de Svalbard. Ils ont ensuite continué leur route vers l’archipel François-Joseph avant de revenir à leur base en passant par la mer de Kara. Ils ont par ailleurs été escortés par des MiG-31 de l’Aviation navale russe pendant une partie de leur trajet.

Cependant, au large de la Norvège, ils ont été interceptés par deux F-16 de la Luftforsvaret [force aérienne norvégienne, ndlr] ayant décollé de la base aérienne de Bodø. « Ils ont identifié les avions russes qui se trouvaient dans l’espace aérien international.Ce sont des procédures normales », a expliqué un porte-parole de l’état-major norvégien au Barents Observer.

Si elle a coïncidé avec le coup d’envoi de l’exercice Arctic Hawk 21, qui implique toutes les composantes des forces norvgiennes dans les région de Nordland, de Troms et du Finnmark et dont l’objet est de contrer une éventuelle attaque, la mission de ces deux Tu-160 à capacité nucléaire, visait probablement à envoyer un message aux États-Unis, avant l’arrivée de quatre bombardiers B-1 Lancer sur la base aérienne d’Ørland, en Novège. En outre, leur passage au large de l’Islande rappelle aussi l’importance stratégique de ce pays. « Celui qui [le] contrôle a dans les mains un revolver pointé sur l’Angleterre, les Etats-Unis et le Canada », disait le géopoliticien allemand Karl Haushofer.

Quoi qu’il en soit, le déploiement annoncé de quatre B-1 Lancer, qui, ayant perdu leur capacité nucléaire, peuvent emporter jusqu’à 56 tonnes de munitions, dont 24 missiles antinavires AGM-158C LRASM, est vu comme une réponse au renforcement des capacités militaires russes dans le Grand Nord. Les Russes « font voler leurs bombardiers dans l’Atlantique Nord et autour du Royaume-Uni », aussi, il s’agit de « faire pression sur eux », afin de leur faire comprendre que c’est « un jeu qui peut se jouer à deux », a d’ailleurs commenté l’expert américain Jerry Hendrix, dans les colonnes de Forbes.

Cependant, la présence annoncée de ces bombardiers américains aussi près de la Russie ne peut que susciter des critiques de la part des responsables russes.

Ainsi, l’ambassade de Russie à Oslo a accusé la Norvège de mettre en périle la sécurité du nord de l’Europe et de l’Arctique, tout en soulignant que le renforcement des capacités militaires russes n’avaient qu’une visée défensive.

Mais le commentaire le plus ferme a été fait par Maria Zakharova, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères. « On ne peut sans doute pas parler de sérénité quand la tension monte aux frontières russes et qu’une puissante place d’armes se forme pour des opérations militaires contre notre pays », a-t-elle lancé, le 11 février.

« La décision d’Oslo est une nouvelle étape dans une série d’autres événements semblables », a poursuivi M. Zakharova, en évoquant l’arrivée des B-1 Lancer américains à Ørland. Et de dénoncer la présence « permanente » d’unités terrestres « américaines, britanniques et néerlandaises » dans le nord de la Norvège, ainsi que l’accueil de sous-marins nucléaires d’attaque [SNA] de l’US Navy près de Tromsø.

« Nous estimons qu’une telle activité d’Oslo menace la sécurité régionale et met fin à la tradition norvégienne de ne pas autoriser des bases militaires étrangères sur son territoire en temps de paix », a déclaré la porte-parole de la diplomatie russe.

En 2017, 300 soldats de l’US Marine Corps [USMC] avaient été déployés à Vaernes [centre de la Norvège], à la demande d’Oslo. Ce qui était alors inédit étant donné que, durant la Guerre Froide, les autorités norvégiennes avaient systématiquement refusé toute présence militaire américaine permanente sur leur territoire afin de ménager l’Union soviétique.

Seulement, en octobre 2020, le Pentagone a annoncé que ce contingent de l’USMC, qui avait entretemps doublé de taille, passerait à un modèle de déploiement ponctuel et non plus permanent, afin de gagner en « flexibilité opérationnelle. » Quant aux forces britanniques et néerlandaises, elles se rendent effectivement régulièrement en Norvège à des fins d’entraînement.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]