Tensions toujours aussi vives entre la Turquie et la Syrie

Depuis la chute d’un obus syrien sur son territoire, le 3 octobre dernier, la Turquie répond systématiquement aux tirs venus de Syrie, ce qui fait craindre à l’ONU, mais aussi à l’Otan, une escalade de la violence entre les deux pays, qui pourrait conduire à une guerre.

Pour Ankara, il ne fait pas de doute que les obus qui tombent sur son sol sont tirés par les forces régulières syriennes, actuellement confrontées à une rébellion armée disparate, c’est à dire composée par d’anciens militaires fait le choix de déserter, des groupes inspirés par les Frères musulmans, qui seraient aidés en sous-main par le Qatar, et des salafistes.

Si le premier obus qui a provoqué le raidissement d’Ankara à l’égard du régime de Bachar el-Assad peut avoir été tiré par erreur, la répétition de ce type d’incident peut laisser penser qu’il s’agit là d’actions parfaitement délibérées. Quant à savoir qui en est le responsable, c’est difficile à dire.

Les forces syriennes cherchent-elle à démontrer qu’elles sont prises à partie depuis la Turquie par des insurgés et/ou à obliger ainsi les autorités turques à renforcer la sécurité à la frontière? Cette tactique, utilisée avec le Liban, a, semble-t-il, donné les résultats espérés par Damas. L’autre possibilité est que ces tirs sont le fait de rebelles, qui chercheraient ainsi à forcer Ankara, et peut-être même la communauté internationale, à s’impliquer militairement contre le régime de Bachar el-Assad.

Quoi qu’il en soit, ces tirs venus de Syrie ont déjà amené les autorités turques à envoyer des renforts militaires à la frontière. Ainsi, au moins 25 avions de combat supplémentaires F-16 ont été déployés sur la base aérienne de Diyarbakir, dans le sud-est du pays, afin de « parer à toute éventualité. » Et le chef d’état-major de l’armée turque, le général Necdet Ozel a averti, d’après la chaîne de télévision publique TRT, que si les tirs continuent encore, Ankara ripostera « avec plus de force. »

Seulement, la Turquie est membre de l’Otan et par conséquent, ce qu’il se passe avec la Syrie concerne également l’ensemble des Etats qui composent l’Alliance, dont l’article 5 de sa charte stipule qu' »une attaque contre un des pays membres est considérée comme une attaque dirigée contre tous. »

Pour le moment, son secrétaire général, Anders Fogh Rasmsussen, a appelé Ankara et Damas à faire preuve de « modération » afin d’éviter ainsi toute escalade militaire, tout en soulignant que l’Otan a déjà « tous les plans nécessaires pour défendre » la Turquie « si besoin. » Pour autant, il n’est pour le moment pas question d’avoir recours à l’article 5, lequel a été invoqué pour la première et unique fois après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

« Le secrétaire général de l’Alliance a voulu exprimer une nouvelle fois sa solidarité vis-à-vis de la Turquie. Il a rappelé qu’il existe des plans d’action standards pour tout pays membre de l’Otan qui viendrait à être attaqué. Dont la Turquie. Mais personne ne discute de l’article 5. Pas même la Turquie, dont tout le monde a d’ailleurs loué la modération dans sa réponse à la crise » a ainsi confié, au quotidien Le Figaro, une source diplomatique française.

Reste que les relations entre Damas et Ankara demeurent tendues, surtout après l’interception par des F-4 turcs d’un avion A-320 Syrian Air, qui se rendait en Syrie après avoir décollé de Moscou. Si l’appareil a pu finalement repartir d’Ankara, où il a été forcé de faire escale, il a été délesté d’une partie de sa cargaison jugée « non légitime sur un vol civil » par les autorités turcs. Il s’agirait du matériel militaire de communication.

Et du côté de Moscou, l’on a fort peu goûté ce coup d’éclat, en accusant la Turquie d’avoir « menacé la sécurité et la vie des passagers, dont 17 citoyens russes », d’après Alexander Loukachevitch, le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

Quoi qu’il en soit, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, alors en visite à Paris le 9 octobre, ne cache pas son inquiétude à l’égard de la tension entre la Damas et Ankara. « L’escalade du conflit le long de la frontière entre la Syrie et la Turquie et les répercussions que la crise a sur le Liban et les autres voisins de la Syrie sont extrêmement dangereux » a-t-il ainsi déclaré.

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