A400M : Enfin!

Enfin, l’A400M a réalisé son premier vol, avec près deux ans de retard sur le calendrier prévu. Il était en effet 10h15, ce 11 décembre, à Séville, quand le prototype MSN001 a pris les airs, avec Edwards Strongman, un ancien de la Royal Air Force, aux commandes.

Ce vol inaugural, qui s’est terminé à 14h, a eu lieu en présence du roi d’Espagne, Juan Carlos, des autorités politiques et militaires des pays clients de l’A400M (France, Allemagne, Belgique, Espagne, Luxembourg, Royaume-Uni, Turquie) qui en ont commandé 180 exemplaires pour 20 milliards d’euros en 2003, et de Louis Gallois, le président d’EADS.

La campagne d’essais de l’appareil de transport européen, qui vient donc de commencer, devrait compter 4.370 heures, dont 1850 heures pour que l’A400M obtienne sa certification civile EASA, le reste étant destiné à valider ses capacités militaires.

Cinq prototypes seront utilisés pour mener à bien ces essais. Les second et troisième appareils devraient être prêts dans le courant du prochain semestre et le quatrième, qui sera doté d’une soute cargo est programmé pour voler à la fin de l’année 2010. Le cinquième, qui préfigurera les avions de série, rejoindra les autres vers la mi-2011.

L’essentiel des essais se feront à Toulouse et à Séville. Mais pour éprouver au mieux les prototypes sous différentes contraintes climatiques, il est prévu que des tests soient effectués en Tunisie, en Guyane et au Canada.

Si le premier vol s’est bien passé, les essais au sol mené sur le MSN001 ont toutefois permis de déceler un probléme d’échauffement au niveau de la tuyère du moteur TP400. Des protections thermiques ont pour l’instant été installées sur le prototype, dans l’attente d’une solution défintive pour le troisième appareil.

Cela étant, l’A400M aura encore à affronter des turbulences. Mais au sol… En effet, le président Louis Gallois a annoncé que le premier appareil ne pourrait être livé à l’armée de l’Air qu’au début de l’année 2013, et non en octobre 2012, comme c’était initialement prévu. Et comme il faudra attendre encore deux ans pour que cet avion de transport soit déclaré opérationnel par le Centre d’expérimentations aériennes militaires (CEAM). En clair, les aviateurs devront se débrouiller avec leur Transall à bout de souffle…

Et puis la question des surcoût de développement de l’avion – 5 milliards d’euros – reste posée. Pour l’instant, les pays clients de l’A400M, qui auraient pu dénoncer leurs contrats respectifs pour se tourner vers la concurrence au printemps dernier, négocient avec le constructeur pour trouver une solution dans le cadre d’un moratoire décidé en avril.

Et en ces temps de difficultés budgétaires, la prise en charge de cinq milliards d’euros – en fait 7,4 milliards si l’on compte la provision déjà passée par EADS – est loin d’être décidée. Selon le cabinet d’audit PriceWaterHouseCoopers, le groupe européen aurait les moyens de payer la note. Ce que bien évidemment, il conteste, en mettant en avant que cela pourrait affecter gravement sa trésorerie, ce qui péserait sur les autres programmes civils portés par le constructeur, à savoir l’A380 et l’A350.

« Airbus doit faire face à un contexte particulièrement difficile avec une crise du transport aérien sans précédent et un dollar en chute libre » a déclaré le directeur général de la filiale d’EADS, Fabrice Brégier, au quotidien La Tribune.  » Il va également devoir faire à une nouvelle concurrence avec l’arrivée d’acteurs émergents comme la Chine dans l’aviation commerciale » a-t-il poursuivi. « Enfin, nous consentons beaucoup d’efforts financiers pour développer l’A350. EADS devra veiller à ce que l’A400M n’obère pas la capacité d’Airbus à rester un acteur de niveau mondial » a-t-il estimé.

D’un autre côté, un abandon du programme laisserait le champ libre à la concurrence américaine dans le secteur des avions de transport militaire et serait synonyme d’une perte de capacité pour les Européens. D’autant plus que l’on imagine très bien les constructeurs d’outre-Atlantique espérer l’échec de l’A400M, ce qui leur permettrait de placer leurs C17 Globemaster et autres C130J.

Aussi, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, estime que « l’effort doit être partagé entre les Etats et les industriels » pour que ce programme puisse continuer. A lui de convaincre ses homologues…

Photo : Le prototype de l’A400M (c) ECPAD

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