Le chef de la force aérienne allemande balaie les critiques sur l’achat d’avions F-35A

La semaine passée, lors d’une conférence sur la sécurité organisée à Berlin, le chancelier allemand, Olaf Scholz, a fait savoir qu’il entendait finaliser rapidement – c’est à dire d’ici la fin de cette année – la commande de 35 chasseurs-bombardiers F-35A auprès du constructeur américain Lockheed-Martin. Et cela afin de permettre à l’Allemagne de maintenir sa participation aux plans nucléaires de l’Otan.

Pour rappel, dans le cadre de ceux-ci, la base aérienne de Büchel abrite des bombes nucléaires tactiques B-61 qui, mises à la disposition de l’Alliance par les États-Unis, sont susceptibles d’armer des Panavia Tornado de la Luftwaffe [force aérienne allemande, ndlr] selon le principe dit de la « double clé », c’est dire que leur code d’armement est exclusivement américain.

Or, les Tornado allemands arrivent au bout de leur potentiel… Et leur remplacement est donc urgent. Si l’achat de F/A-18 Super Hornet a été envisage pour reprendre leur mission nucléaire, les États-Unis ont fait en sorte de favoriser le F-35A, l’appareil de Lockheed-Martin étant prioritaire pour obtenir la certification lui permettant d’emporter la B-61. D’où la décision de Berlin d’en commander 35 exemplaires, via le fonds spécial de 100 milliards d’euros mis en place pour remédier aux lacunes de ses forces armées [Bundeswehr]

Seulement, la facture s’annonce salée pour le contribuable allemand. En juillet, l’administration américaine a recommandé au Congrès d’autoriser la vente de ces 35 F-35A pour environ 8,4 milliards de dollars [environ 8 milliards d’euros]… Ce qui n’était pas vraiment un prix d’ami quand l’on sait que la Suisse signera un chèque de 5,3 milliards de dollars pour les 36 exemplaires qu’elle a commandés…

D’ailleurs, le 1er décembre, l’hebdomadaire Der Spiegel a avancé que la note pourrait même avoisiner les 10 milliards d’euros, selon une estimation « prudente » du ministère allemand des Finances. Et il ne s’agit là que des coûts d’acquisition, lesquels ne sont pas les plus importants.

En effet, il faudra aussi prendre en compte le maintien en condition opérationnelle [MCO] et la modernisation de ces avions durant les quarante années [voire plus] pendant lesquelles ils seront utilisés. Ce qui peut représenter 70% des coûts totaux d’un tel programme. Or, cette manne risque de passer sous le nez des industriels d’outre-Rhin, Berlin n’ayant, à ce stade, exigé aucune contrepartie industrielle auprès de Washington. D’où les critiques de l’Association de l’industrie aéronautique et spatiale allemande [BDLI].

Quoi qu’il en soit, cet achat de F-35A suscite le débat outre-Rhin… Débat qui, pour le chef d’état-major de la Luftwaffe, le général Ingo Gerhartz, n’a pas lieu d’être.

« Des problèmes avec le F-35? L’Allemagne checher des problèmes là où les Pays-Bas, la Norvège, la Belgique, l’Italie et d’autres nations européennes n’en voient aucun. Et nous non plus! L’air y est-il différent [qu’en Allemagne]? », a déclaré le général Gerhartz, via le compte officiel de la Luftwaffe sur le réseau social Twitter. Une telle démarche serait inconcevable en France…

Pourtant, cet achat de F-35 pose des problèmes… au point que le ministère allemand de la Défense va tenir une réunion, ce 5 décembre, avec des membres de la commission du budget du Bundestag [chambre basse du Parlement, nldr], qui doit approuver une première tranche de financement de ce programme le 14 décembre, et des représentants des trois partis membres de la coalition gouvernementale.

D’après l’AFP, qui a eu accès à un document du ministère allemand des Finances, les exigences de sécurités imposées par les États-Unis pour utiliser le F-35 seraient « complexes » et donc susceptibles d’ajouter « des délais et des coûts supplémentaires ». Aussi, l’emploi de cet appareil au-dessus de l’Allemagne pourrait être restreint, faute de pouvoir obtenir toutres les autorisations nécessaires dans les délais, c’est à dire d’ici 2026.

Enfin, l’inflation, la fluctuation du taux de change entre le dollar et l’euro ainsi que la hausse des coûts des productions seraient autant de risques dont il faudrait tenir compte.

Quoi qu’il en soit, l’achat de F-35A créé quelques turbulences au niveau politique. S’il est critiqué par l’opposition, en particulier par les chrétiens-démocrates de la CDU/CSU, pour qui le choix du F/A-18 Super Hornet reste le plus raisonnable, certains députés de la majorité ont donné de la voix, comme le social-démocrate Andreas Schwarz, le rapporteur du budget de la Défense. « Il est inacceptable que le Parlement ne découvre les problèmes que maintenant. J’attends du minsitère qu’il fournisse des informations complètes sur la manière dont les risques seront gérés », s’est-il insurgé dans les pages du journal Bild am Sonntag.

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