Une opération de Barkhane au Burkina Faso souligne l’importance des hélicoptères lourds de transport

« Dis-moi ce dont tu as besoin et je te dirais comment t’en passer »… Et cette phrase, l’état-major français a dû l’entendre maintes fois depuis qu’il a exprimé le besoin de se doter d’hélicoptères lourds de transport, en particulier pour le Commandement des opérations spéciales [COS]. Seulement, il est visiblement difficile de ce passer de tels appareils. En témoigne encore [si besoin en était] la dernière opération que vient de mener la force Barkhane au Burkina Faso, entre les 13 et 16 septembre.

Ainsi, explique l’État-major des armées [EMA]dans son dernier compte-rendu des opérations, « à la demande des autorités burkinabè et pour sécuriser le sommet de la CEDEAO à Ouagadougou, un détachement du SGTD1 [sous-groupement tactique Désert n°1] de la force Barkhane été mis en place pour soutenir les unités des Forces Armées Nationales du Burkina Faso déployées à Djibo, verrou important entre le Nord du pays et la capitale. »

Le renforcement du camp de Djibo était d’autant plus nécessaire que la zone où il est implanté [la province du Soum] est régulièrement la cible d’attaques jihadistes. Et cela a probablement d’ailleurs été encore le cas dans la nuit du 19 au 20 septembre, le pont de Boukouma, reliant Djiboo à Dori, ayant été détruit à l’explosif.

Quoi qu’il en soit, et même si Djibo dispose d’un aérodrome, il aura fallu deux des trois hélicoptères lourds de transport CH-47D Chinook déployés à Gao par la Royal Air Force [RAF] depuis l’été 2018 pour acheminer le détachement de Barkhane au Burkina Faso. Dès leur arrivée, les soldats français « ont immédiatement réalisé un renforcement du dispositif défensif du camp, conjointement avec leurs camarades burkinabè », souligne l’EMA.

Le lendemain, et après l’évaluation de la menace, le SGTD1 a demandé l’acheminement de moyens complémentaires « destinés à consolider les infrastructures de défense passive » du camp de Djibo. Et il les a reçus grâce à une LPA [livraison par air, parachutage, ndlr] et, encore fois, à un CH-47D Chinook.

Le compte-rendu de l’EMA ne précise pas comment les militaires français sont ensuite revenus au Mali à l’issue de leur mission qui aura donc duré trois jours. Mais on peut supposer que les Chinook ont une nouvelle fois été sollicités.

Par ailleurs, les CH-47D ont également été engagés dans une nouvelle opération menée conjointement avec les Forces armées maliennes [FAMa] dans la région du Liptako malo-nigérien, en particulier dans les alentours des villes Ménaka, Anderamboukane, Inates et Ansongo.

Malgré des performances affectées par les conditions climatiques propres au Sahel [dont la forte chaleur], le CH-47D Chinook peut transporter jusqu’à 4 tonnes de fret ou 34 soldats équipés. Qui plus est, il offre une certaine flexibilité pour ce qui concerne l’aéromobilité étant donné, grâce à capacité d’emport de 2.000 litres de carburant grâce à des bacs souples, il évite de déployer par voie terrestre un plot logistique pour l’avitaillement d’autres hélicoptères.

Heureusement pour Barkhane, le gouvernement britannique a accepté de prolonger la mission malienne de ses trois Chinook pour au moins six mois de plus. Et le Danemark devrait déployer à Gao deux hélicoptères lourds de transport AgustaWestland AW101 « Merlin » pour un an.

Reste que l’idée d’acquérir de tels hélicoptères avait été avancée lors de la préparation de la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25… avant d’être finalement écartée. Ce qui avait apparemment contrarié le général Bosser, l’ex-chef d’état-major de l’armée de Terre.

« La question doit aussi être posée à l’armée de l’Air qui, au cours de la construction de la LPM, avait envisagé de s’équiper d’hélicoptères lourds, qui sont très coûteux et ne sont pas nécessairement compatibles avec le modèle économique d’un pays tel que la France, alors que certains de nos alliés en disposent, avait lâché l’ex-CEMAT lors d’une audition parlementaire.

En 2009, le Canada avait signé une commande de 6 CH-47D Chinook pour 282 millions de dollars afin de répondre à un besoin exprimé par ses forces en Afghanistan. Puis il s’en était séparé quelques années plus tard, en mettant en vente quatre exemplaires [un appareil avait été détruit et un autre était en trop mauvais état]. Finalement, deux furent placés dans des musées.

Une autre occasion fut manquée en 2014, quand l’US Army mit sur le marché un lot de 10 anciens CH-47D, le prix unitaire des appareils allant de 2 à 3,5 millions de dollars. Tous furent vendus à des opérateurs privés [Billings Flying Service, Columbia Helicopters et CHI aviation] pour un total de seulement 28 millions de dollars…

Photo : Archive/ EMA

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