Selon son secrétaire général, l’Otan se prépare à un monde « avec plus de missiles russes »

Quelques jours après l’avertissement lancé aux États-Unis et aux pays européens par le chef du Kremlin, Vladimir Poutine, au sujet du possible déploiement, sur le Vieux Continent, de missiles nucléaires susceptibles de menacer la Russie, la télévision publique russe y est allé de son couplet.

Ainsi, selon Reuters, Dmitri Kiselyov, le présentateur de l’émission hebdomadaire « Vesti Nedeli », a présenté, le 24 février, une carte sur laquelle étaient marquées plusieurs cibles qui, situées aux États-Unis, pourraient être visées en cas de « guerre nucléaire ». Ce proche du Kremlin a assuré que le missile hypersonique « Tsirkon » pourrait les frapper en « moins de cinq minutes » s’il était lancé depuis un sous-marin.

Seulement, la liste présentée par M. Kiselyov n’était pas vraiment à jour… En effet, si elle évoque le Pentagone et Camp David, cette dernière parle aussi de viser des installations militaires américaines qui existaient il y a 20 ans… Comme Fort Ritchie [fermé en 1998], ou encore la base de McClellan [plus utilisée depuis 2001].

Aussi, on peut supposer que les propos martiaux du président Poutine et que cette liste dévoilée par l’émission Vesti Nedeli s’adressent avant tout à l’opinion publique russe…

Quoi qu’il en soit, avec la fin annoncée du Traité sur les Forces nucléaires intermédiaires [FNI], que la Russie est accusée par les États-Unis et l’Otan d’avoir violé en déployant le missile Novator 9M729 [ou SSC-8], dont la portée est interdite par ce texte, la crainte est de vivre une nouvelle course aux armements. D’où les propos tenus ce 1er mars par Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Alliance atlantique, lors d’un déplacement en Bulgarie.

« Nous appelons la Russie à se remettre en conformité avec le traité FNI […] Dans le même temps nous devons être préparés à un monde sans le traité FNI et avec plus de missiles russes », a ainsi déclaré M. Stoltenberg, après s’être entretenu avec Boïko Borissov, le Premier ministre bulgare.

Seulement, Moscou assure que la portée de son nouveau missile n’est que de 480 km, c’est à dire qu’elle est conforme au traité FNI, lequel interdit les engins pouvant parcourir une distance comprise entre 500 et 5.500 km.

De leur côté, les États-Unis ne diposent pas [du moins, pas encore] de missiles à portée intermédiaire dans leur arsenal. Ce qui, d’ailleurs, leur pose un problème face à la Chine, qui n’a pratiquement que ce type d’engins. Aussi, entre les accusations américaines, rejetées par Moscou, et les avertissements du Kremlin qui, n’ont, pour le moment, pas de fondement, on assiste à un dialogue de sourds…

Quoi qu’il en soit, M. Stoltenberg a une nouvelle souligné que le traité FNI « a été incontournable pour le contrôle sur les armements pendant des décennies ». Et d’ajouter : « L’Otan ne veut pas de nouvelle Guerre Froide, nous ne voulons pas de nouvelle course aux armements. »

Cette question devrait être abordée par M. Borissov, quand il rencontrera son homologue russe, Dmitri Medvedev, dans quelques jours. Et il assuré vouloir « utiliser au maximum la force de la diplomatie pour ne pas entrer dans une course aux armements », alors que son pays est fortement dépendant de la Russie dans le domaine de l’énergie.

Sur ce point, M. Borissov a affirmé que « la Bulgarie n’est pas le cheval de Troie de la Russie dans l’Otan » et qu’elle est au contraitre l’un de ses membres « les plus disciplinés. »

Plus généralement, et au-delà des « missiles russes » évoqués par M. Stoltenberg, on assiste actuellement à une remise en cause du système international du contrôle des armements. C’est ce qu’estime Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies.

« Je vais être direct. Les principaux éléments de l’architecture internationale de contrôle des armements s’effondrent », a en effet déclaré M. Guterres, le 25 février. Selon lui, « l’utilisation continue des armes chimiques en toute impunité est à l’origine d’une nouvelle prolifération » et « des milliers de civils continuent de perdre la vie à cause des armes légères illicites et de l’utilisation en zone urbaine d’armes explosives conçues pour les champs de bataille. » À cela viennent s’ajouter « les nouvelles technologies d’armement qui intensifient les risques d’une manière que nous ne comprenons pas encore et que nous ne pouvons même pas imaginer. »

Aussi, a-t-il continué, « nous avons besoin d’une nouvelle vision du contrôle des armements dans le contexte complexe actuel en matière de sécurité internationale », d’auntant plus que la « situation est particulièrement dangereuse en ce qui concerne les armes nucléaires. »

Sur ce point, la fin annoncée du traité FNI va rendre « monde moins sûr et plus instable », a estimé M. Guterres. Or, croit-il, « nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de revenir à la concurrence nucléaire effrénée des jours les plus sombres de la Guerre froide. »

Qui plus est, la prolongation du traité New Start, qui limite les arsenaux nucléaires détenus par les États-Unis et la Russie, n’est pas encore assurée… Or, ce texte arrive à échéance en 2021. « Les États ne peuvent pas laisser le monde se diriger comme un somnambule vers une nouvelle course aux armements nucléaires », a insisté le sécrétaire général de l’ONU.

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