L’Union européenne accorde 31 millions d’euros à l’Ukraine pour l’aider à renforcer ses forces armées
Ce 2 décembre, et alors que le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, devait rencontrer son homologue américain, Antony Blinken, en marge d’une réunion de l’Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe [OSCE] à Stockholm, le Kremlin a affirmé que la volonté de Kiev de « récupérer » la Crimée, passée sous contrôle russe en 2014, constituait une « menace directe » contre la Russie.
« De fait, nous voyons cela comme une menace directe adressée à la Russie », a en effet déclaré Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, en référence à des propos tenus la veille par le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, devant la Rada [Parlement]. Ce celui-ci avait affirmé que la « libération » de la Crimée était un « objectif » et une « philosophie nationale ». Mais à aucun moment il n’évoqua une quelconque option militaire.
Quoi qu’il en soit, pour M. Peskov, une « telle formulation signifie que le régime de Kiev a l’intention d’utiliser tous les moyens – y compris la force – pour empiéter sur le territoire russe ». Et de dénoncer une « rhétorique agressive » de la part des autorités ukrainiennes. Ce qui justifierait, donc, les mouvements de troupes russes observés depuis quelques semaines aux abords de l’Ukraine.
Que Kiev souhaite récupérer la Crimée ne fait aucun doute. En mars, au sujet de ce territoire perdu, le président Zelensky avait signé un décret selon lequel l’Ukraine se réservait le « droit de recourir à tous les moyens nécessaires pour les droits et libertés, l’indépendance, sa souveraineté et son intégrité territoriale », conformément à l’article 51 de la Charte des Nations unies. En outre, ce texte précisait que l’Ukraine ne reconnaissait « pas l’acquisition obligatoire ou automatique » de la citoyenneté russe par les ressortissants ukrainiens « vivant dans le territoire temporairement occupé » par la Russie.
Après la promulgation de ce décret, des mouvements massifs de troupes russes avaient été observés aux abords de l’Ukraine. Puis les choses rentrèrent dans l’ordre… Enfin presque car, par la suite, les combats dans le Donbass entre les forces ukrainiennes et les séparatistes pro-russes gagnèrent en intensité.
À ce propos, le 1er décembre, la diplomatie russe a accusé l’armée ukrainienne d’avoir significativement renforcé ses capacités près du Donbass. Et cette accusation a été suivie par une autre : quelques heures plus tard, le FSB – renseignement intérieur russe – a affirmé avoir arrêté trois « espions ukrainiens », dont l’un aurait été sur le point de passer à l’action et de lancer une attaque à l’explosif contre un site dont la nature n’a pas été précisée.
De son côté, le renseignement ukrainien [le SBU] a réagi en affirmant que l’anonce de ces arrestations relevait de la « guerre hybride » et de la « propagande informationnelle » de la Russie. Et d’assurer avoir « exposé environ 50 agents russes » en Ukraine depuis le début de cette année et constaté près de 5000 cyberattaques attribuées à Moscou.
Cela étant, si la Russie donne le sentiment de se préparer à envahir l’Ukraine, comme le chef de la diplomatie américain lui en a encore prêté l’intention ce 2 décembre, le sort de la Crimée ou du Donbass n’est qu’un prétexte… Car, avant tout, le projet de Kiev de rejoindre l’Otan est un casus belli aux yeux du Kremlin. Et c’est d’ailleurs ce qu’a réaffirmé M. Lavrov, à l’issue de son entretien avec M. Blinken.
« Le scénario cauchemar de la confrontation militaire est en train de faire son retour en Europe », prévenu le ministre russe, accusant l’Otan de « rapprocher son infrastructure militaire des frontières russes ». Aussi a-t-il réclamé un accord afin d’empêcher « tout nouvel élargissement » de l’Alliance « vers l’Est » – et donc à l’Ukraine. « Nous sommes intéressés dans des efforts communs en vue de la résolution de la crise ukrainienne. Nous y sommes prêts », a-t-il dit.
En attendant, Kiev pourra compter sur le soutien – modeste – de l’Union européenne [UE]. Pendant que MM. Lavrov et Blinken discutaient à Stockholm, celle-ci a approuvé l’octroi à l’Ukraine d’un financement de 31 millions d’euros sur une période de 36 mois afin de l’aider à « renforcer les capacités » de ses « forces armées […], notamment avec des unités médicales, des hôpitaux de campagne, des unités du génie et des unités de logistique ». En outre, le communiqué publié par le Conseil de l’UE parle également d’un soutien en matière de lutte contre les cyber-attaques.
Dans le même temps, la Géorgie et la Moldavie bénéficieront également d’une aide de l’UE, 12,7 millions et 7 millions d’euros devant leur être respectivement octroyés afin que leurs forces armées soient en mesure de fournir une aide médicale et logistiques aux populations civiles « en cas de crise ou de situation d’urgence ».
Pour rappel, la Géorgie, qui a été en guerre avec la Russie en 2008, aspire, comme l’Ukraine, à rejoindre l’Otan. Quant à la Moldavie, ses relations avec Moscou sont difficiles, en raison de la présence de troupes russes en Transnistrie, région russophone séparatiste.
Les fonds alloués à ces trois pays proviendront de la « Facilité européenne pour la paix » [FEP ou EPF], un outil financier créé en mars 2021 pour financer les actions extérieures de l’UE « ayant des implications militaires ou de défense, dans le but de prévenir les conflits, de préserver la paix et de renforcer la sécurité et la stabilité internationales. » L’aide la plus importante a été accordée à l’Union africaine, pour un montant de 130 millions d’euros. Le Mozambique, confronté à la menace jihadiste dans la province de Cabo Delgado, a obtenu, par ce mécanisme, un financement de 40 millions d’euros.
Photo : Par ArmyInform – CC BY 4.0