En sous-effectif chronique, la British Army pourrait compter 30.000 robots dans les années 2030
Malgré des campagnes de recrutement qui se voulaient audacieuses et un assouplissement des conditions pour permettre aux ressortissants du Commonwealth de la rejoindre, la British Army est toujours en sous-effectif chronique, après les suppressions massives de postes qu’elle a connues au début des années 2010.
Normalement, l’effectif des forces terrestres d’outre-Manche devrait s’élever à 82.000 soldats professionnels, soit l’équivalent de la capacité du stade de Twickenham. Or, selon les chiffres donnés par le général Sir Nicholas Carter, le chef d’état-major de la défense britannique, la British Army ne compterait que 73.870 militaires… Aussi est-il envisagé de prendre en compte cette réalité et de revoir son format à 75.000 personnels dans le cadre de la revue stratégique de défense et de sécurité actuellement en cours à Londres.
Pour remédier à cette situation mais aussi pour gagner de la « masse » [un thème dont il est aussi question pour les armées françaises], la solution passerait donc par la technologie. C’est en effet ce qu’a expliqué le général Carter, lors d’un entretien donné à Sky News à l’occasion du « Remembrance Sunday » [le « Dimanche du Souvenir], le 8 novembre.
« Nous pourrions avoir une armée de 120.000 soldats, dont 30.000 pourraient être des robots », a en effet affirmé le chef d’état-major britannique, tout en soulingant qu’il ne fixait aucun objectif particulier dans ce domaine pour l’avenir.
Actuellement, les trois banches des forces armées britanniques ont lancé des projets de recherches en matière de robotique militaire. Ainsi, en juin 2019, une enveloppe de 66 millions de livres sterling a été débloquée pour financer des projets de mini-drones destinés à l’acquisition du renseignement, de véhicules autonomes et de systèmes permettant de contrôler à distance des blindés existants.
Cela étant, ce n’est pas la première fois que le général Carter évoque cette robotisation presque à marche forcée de la British Army. « Pour le dire franchement, vous verrez plus de robots dans tous les domaines, terrestre, aérien, maritime, mais aussi dans l’espace. Vous voudrez des choses plus maniables, probablement plus petites et plus rapides et probablamement ‘consommables' », avait-il dit en mars dernier.
« Nous devons arrêter de faire des choses qui deviennent obsolètes pour miser sur d’autres, meilleures et plus pertinentes. Il ne s’agit pas de se passer de capacités mais de les transformer », avait abondé, plus tard, le général Sir Richard Barrons, ex-commandant du Joint Force Command. « L’avenir est aux systèmes autonomes ou contrôlés à distance. Si vous deviez recapitaliser une force terrestre, vous ne feriez pas pression pour dépenser tout votre argent sur un petit nombre de plateformes habitées, car vous auriez une génération de retard », avait-il insisté.
Quoi qu’il en soit, ce qu’avait dit le général Carter au printemps dernier pourrait donc trouver une traduction concrète à la faveur de la Revue stratégique de défense…. à la condition que les forces britanniques en aient les moyens. Or, pour le moment, le projet de budget quinquennal de la défense est suspendu, l’examen des dépenses à long terme ayant été reporté à des jours meilleurs en raison des incertitudes économiques causées par l’épidémie de covid-19.
Évidemment, la robotisation des forces armées pose un problème d’éthique et de morale, avec un risque de voir apparaître des « robots tueurs » autonomes… Sur ce point, le ministère britannique de la Défense [MoD] explique que l’humain resterait dans la boucle et que la décision d’ouvrir le feu lui reviendrait à lui-seul.
Un principe qui doit d’autant plus être rappelé que, en octobre, la British Army a présenté un drone qui, appelé i9, est capable de voler dans des espaces clos, identifier des cibles grâce à un algorithme d’intelligence artificielle… alors qu’il est armé de deux canons.
Cela étant, en France, l’armée de Terre a aussi l’intention de faire la part belle à la robotique dans les années à venir, en parlant de placer des « systèmes automatisés » au « coeur du groupe de combat », afin d’en faire des « équipiers du militaire, totalement intégrés à la manœuvre et la chaîne de commandement. »
Photo : © British Army