Libye : La force navale européenne Irini a intercepté un navire suspecté de violer l’embargo sur les armes

En juin, les frégates HS Spetsai [Grèce] et Courbet [France] n’avaient pas pu inspecter le Cirkin, un cargo qui, battant pavillon de la Tanzanie, était alors suspecté de violer l’embargo sur les armes décidé par les Nations unies à l’égard de la Libye.

Et pour cause, le navire grec, alors engagé dans l’opération navale européenne Irini, avait été intimidé par la marine turque qui escortait alors le bâtiment suspect. Quant aux Courbet, opérant sous le commandement de l’Otan [opération Sea Guardian, ndlr], il fut illuminé à trois reprises par la conduite de tir d’une frégate turque.

Engagée auprès du gouvernement d’entente nationale libyen [GNA], à qui il fournit des armes et des combattants [recrutés parmi les rebelles syriens] et des conseillers militaires, la Turquie a régulièrement accusé l’opération européenne Irini de ne rien faire contre les livraisons d’équipements destinés à l’Armée nationale libyenne [ANL], soutenue par les Émirats arabes unis, la Russie et l’Égypte.

Ce 10 septembre, alors que les activités de la Turquie devaient être au menu du sommet Med7, qui doit réunir, en Corse,  les pays méditerranéens membres de l’Union européenne, l’état-major de l’opération Irini a annoncé la première interception d’un navire suspecté de violer l’embargo sur les armes au profit de l’ANL du maréchal Khalifa Haftar, l’homme fort de l’est libyen.

Ainsi, a-t-il fait savoir, la frégate allemande FGS Hamburg, récemment arrivée en Méditerranée centrale, a intercepté le navire MV Royal Diamond 7 qui, parti du port de Sharjah [Émirats arabes unis], se dirigeait vers Benghazi, dans l’est de la Libye. Le navire de la Deutsche Marine a été assisté par la frégate italienne ITS Margottini.

« Le MV Royal Diamond 7 transportait du carburant pour les avions, devant vraisemblablement être utilisé à des fins militaires » et donc, à ce titre, « considéré comme du matériel militaire par l’ONU », a précisé l’état-major de l’opération européenne.

Le cargo, qui bat pavillon des îles Marshall, a été intercepté « à 07H00, dans les eaux internationales, à 150 km au nord de la ville libyenne de Derna », indique le communiqué. Désormais, il fait route vers un port de l’UE pour « approfondir l’enquête » le concernant.

Pour rappel, selon le droit maritime, il existe au moins cinq cas pour lesquels l’inspection d’un navire est autorisée dans les eaux internationales, comme par exemple la piraterie ou le défaut de pavillon. Sinon, il est nécessaire d’obtenir préalablement l’autorisation du capitaine du bateau visé ou de l’État où il est immatriculé ou celui de son pavillon.

Quoi qu’il en soit, ces dernières semaines, les capacités aériennes de l’Armée nationale libyenne [ANL] ont été significativement étoffées avec la livraison d’au moins 14 avions de combat de type MiG-29 « Fulcrum » et Su-24 « Fencer ». Ce qui expliquerait ce besoin en carburant aéronautique.

Par ailleurs, selon Stephanie William, l’émissaire par intérim de l’ONU en Libye, l’embargo sur les armes a été violé à maintes reprises entre juillet et septembre, avec « 70 vols de ravitaillement ayant atterri dans les aéroports de l’est de la Libye » contrôlé par l’ANL et une « trentaine d’appareils  envoyés dans des aéroports de l’ouest » en appui au GNA. Et  « neuf cargos se sont amarrés dans des ports de l’ouest en soutien au GNA pendant que trois navires sont venus apporter de l’aide à l’ANL », a poursuivi la diplomate.

Cela étant, cette interception d’un navire suspect ne serait pas la première de la force navale européenne. En mai, il fut en effet avancé que la frégate française Jean Bart avait intercepté le Jal Laxmi, un pétrolier battant pavillon du Gabon et affrété par une compagnie des Émirats arabes unis pour récupérer du pétrole libyen sans l’accord des autorités compétentes, à savoir la Libyan National Oil Corporation, établie à Tripoli. Si le ministère des Armées ne fit pas de commentaire, le Quai d’Orsay et les Nations unies confirmèrent implicitement cette opération.

Photo & Illustration : Carlo Feola [EUNAVFOR MED IRINI]

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