Le Suédois Saab croit toujours que son avion de combat Gripen E/F peut rafler la mise au Canada

Bien qu’ayant de sérieux argument à faire valoir avec son Rafale, Dassault Aviation a finalement décidé de ne pas participer à l’appel d’offres lancé par Ottawa afin de remplacer ses 88 avions de combat CF-18 Hornet arrivés au bout de leur potentiel par 65 nouveaux appareils. « Je pense que le Canada achètera un avion américain – au pire le F-35, au mieux le F-18, ou inversement. Pourquoi dès lors perdre du temps, de l’argent et de l’énergie, l’État devant lui aussi être largement mobilisé, si les règles du jeu sont pipées? », avait expliqué Éric Trappier, son Pdg, lors d’une audition parlementaire.

Et ce dernier estima qu’il était « impossible de vendre le Rafale aux pays membres du réseau Five Eyes, non pas parce qu’il n’est pas interopérable – il l’est tout autant que d’autres et en a fait la preuve – mais parce que ce réseau s’est fixé des règles qu’ils refusent de nous communiquer et qui visent à ce que ses membres travaillent ensemble ».

Pour rappel, le cercle dit des « Five Eyes » est une alliance qui, formée au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, réunit les services de renseignements américains, britanniques, canadiens, australiens et néo-zélandais. Mais telle n’était pas la seule raison. L’appartenance du Canada au Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord [North American Aerospace Defense Command, ou NORAD] en est une autre.

D’ailleurs, cela a conduit Airbus, qui défendait les chances de l’Eurofighter Typhoon, à également jeter l’éponge. En effet, l’industriel a expliqué qu’il avait pris cette décision après avoir « avoir examiné les exigences de sécurité du NORAD et leur coût. » Mais pas seulement. Dans son communiqué, il avait aussi pointé le fait que les « importantes révisions récemment apportées aux exigences de retombées industrielles et technologiques ne valorisaient pas suffisamment les engagements fermes compris dans l’offre de Typhoon Canada, alors qu’il s’agissait d’un point majeur. »

Mais cela ne décourage nullement le constructeur suédois Saab, qui entend défendre jusqu’au bout les chances de son JAS-39 Gripen E/F face au F-35A de Lockheed-Martin et au F/A-18 Super Hornet de Boeing.

En effet, le 2 mars, fort de son expérience au Brésil en matière de retombées industrielles et de transferts de technologie, le constructeur suédois a noué des partenariats avec plusieurs groupes canadiens de « premier plan » afin de soutenir la candidature du Gripen E/F.

« Au cours des deux dernières années, Saab et le gouvernement suédois ont apprécié l’appel d’offre ouvert et transparent ouverte et transparente du Canada pour le renouvellement de sa flotte d’avions de chasse. Aujourd’hui, nous sommes fiers de présenter l’équipe ‘Gripen Canada’. Nous avons réuni des leaders à l’avant-garde de l’industrie aérospatiale, aux quatre coins du pays, pour doter le Canada de la meilleure solution en matière d’avions de chasse », a ainsi fait valoir Jonas Hjelm, vice-président principal et chef du secteur d’affaires de la divion « aéronautique » de Saab.

Dans le détail, l’équipe « Gripen Canada » compte parmi ses membres IMP Aerospace & Defense, à qui reviendra l’assemblage des Gripen E/F dans le cas où ce type d’appareil serait retenu par l’Aviation royale canadienne. Il lui reviendra également le soin d’assurer le soutien en service des avions tant qu’ils seront en service avec Peraton Canada, qui s’occupera plus particulièrement de l’avionique. Quant aux moteurs, ils seront fournis et maintenus par GE Aviation. Enfin, CAE a été désigné pour fournir les prestations de formation aisni que les services de support du logiciel de bord opérationnel.

Pour Saab, ce dispositif permet de proposer une « solution véritablement canadienne » offrant le « meilleur rapport qualité-prix. »

Cependant, même si l’actuel Premier ministre canadien, Justin Trudeau, avait assuré que le Canada n’achèterait pas de F-35A [mais quand il fit cette déclaration, il était alors dans l’opposition, et en campagne électorale], l’appareil de Lockheed-Martin est le grand favori de cet appel d’offres. Et cela pour deux raisons indépendantes de l’appartenance du Canada aux Five Eyers et au NORAD.

La première est que l’industrie aéronautique canadienne est partenaire du programme F-35… Et l’administration américaine a obtenu d’Ottawa des assouplissements au processus d’évaluation des retombées économiques au Canada. La seconde est que cet appareil a déjà été sélectionné en 2010 par le gouvernement conservateur de Stephen Harper. Mais cela fit polémique, le coût de l’opération ayant été sous-évalué. D’où les propos tenus par M. Trudeau en 2015, ainsi que sa promesse de lancer un appel d’offres « transparent ».

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