Les États-Unis pourraient se retirer du Traité sur les forces nucléaires intermédiaires

Les traités signés juste avant l’effondrement de l’Union soviétique et la fin de la Guerre Froide sont désormais remis en question. Celui relatif aux forces conventionnelles en Europe, conclu à Paris en novembre 1990 par les États de l’Otan et du Pacte de Varsovie, a d’abord fait l’objet d’un « moratoire » en 2007, avant d’être officiellement dénoncé par la Russie huit ans plus tard.

Un autre traité important, concernant les Forces nucléaires intermédiaires, signé en 1987 par le président américain, Ronald Reagan, et son homologue soviétique, Mikhael Gorbatchev, ne se porte guère mieux.

Ayant mis fin à l’affaire des Euromissiles, ce texte, qui n’engage que les États-Unis et la Russie, interdit les missiles balistiques et de croisière sol-sol ayant une portée comprise entre 500 et 1.000 km ainsi que ceux dont la portée est comprise entre 1.000 et 5.500 km. »

Or, depuis 2014, Washington soupçonne Moscou d’avoir violé ce traité en développant un missile de croisière à capacité nucléaire désigné « SSC-X-8 » par le Pentagone. Mieux encore : lors d’une audition parlementaire, en 2017, le numéro deux de l’état-major interarmées américain, le général Paul Selva, a indiqué que ce missile avait été déployé dans la région de Volgograd, dans le sud-ouest de la Russie.

« Le dispositif présente en lui-même un risque pour la plupart de nos installations en Europe et nous pensons que les Russes l’ont délibérément déployé pour constituer une menace contre l’Otan et contre les installations situées dans la zone de responsabilité de l’Otan », avait alors expliqué le général américain.

« Depuis 30 ans, le Traité FNI est un élément fondamental de la sécurité euro-atlantique. En éliminant toute une catégorie d’armes que détenaient les États-Unis et la Russie (les missiles balistiques de portée intermédiaire à lanceur terrestre), le Traité a contribué à la stabilité stratégique et réduit le risque d’erreur d’interprétation pouvant entraîner un conflit. C’est pourquoi le respect rigoureux du Traité FNI est essentiel, et nous restons pleinement engagés en faveur du maintien de ce traité qui a marqué une étape décisive dans le domaine de la maîtrise des armements », fit valoir, en décembre 2017, le Conseil de l’Atlantique-Nord.

Mais, à Moscou, l’on nie toute violation du Traité FNI. Toutefois, les autorités russes ont admis l’existence du missile 9M729 « Novator », qui seront donc le « SSC-X-8 » dénoncé par Washington.

« Nous sommes très sérieusement préoccupés et appelons très sérieusement la Russie à se conformer au traité INF de manière transparente et vérifiable », a commenté Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan, le 3 octobre . « Désormais ils [les Russes] ont admis l’existence des missiles et par conséquent nous leur avons demandé de répondre à nos questions. Tant qu’ils n’y répondent pas, l’hypothèse la plus plausible est qu’il s’agisse d’une violation du traité INF », a-t-il ajouté.

Seulement, l’administration américaine s’impatiente… « Cette situation est intenable et nous devons prendre des mesures face à cette violation continue de ce très important traité », a en effet déclaré Robert Wood, l’ambassadeur américain sur le désarmement, à Genève, ce 4 octobre.

Pour autant, ce dernier s’est gardé d’aller sur le terrain militaire, comme l’a fait sa collègue auprès de l’Otan, Kay Bailey Hutchison, qui a parlé « d’éliminer » les missiles russes en question, ce qui a donné lieu à un incident diplomatique, étant donné que son propos, confus, a laissé entendre que Washington pourrait se livrer à des frappes préventives.

« Je ne sais pas combien de temps encore nous pourrons continuer à respecter nos obligations au nom de ce traité alors que la Russie le viole de façon si flagrante et publique », a seulement affirmé M. Wood. Sous-entendu : Washington songe à se retirer du Traité FNI afin de se doter des mêmes missiles développés par la Russie.

En attendant, cette violation présumée du Traité FNI par Moscou sera l’une des priorités de la diplomatie américaine lors des discussions sur le désarmement aux Nations unis, à New York.

Photo : Missile soviétique SS-20

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