La junte birmane veut contrôler le Triangle d’or
En vue de la tenue, en 2010, des premières élections depuis près de 20 ans, la junte birmane tient à remettre dans l’axe les milices éthiques avec lesquelles elle a signé des accords de cessez-le-feu en 1990 et acquis leur soumission en échange d’un vaste autonomie des territoires frontaliers où elles sont implantées. Par ailleurs, et selon la révision de la Constitution birbane adoptée l’an passé, ces groupes doivent désormais se tranformer en unités de garde-frontières, placées sous un commandement militaire unique et centralisé.
Or, ces groupes, qui pour la plupart se livrent aux trafics d’opiacés, ont refusé d’obéir à l’injonction qui leur avait été faire par Naypyidaw (ndlr: la nouvelle capitale de la Birmanie depuis 2005). Conséquence : le pouvoir birman a lancé, le 30 août dernier, une première offensive dans le Kokang, une zone montagneuse située près du Triangle d’or et frontalière avec la Chine, encore appelé « région spéciale n°1 ».
Les forces gouvernementales n’ont eu aucun mal à venir à bout de la résistance opposée par la milice du Kokang, forte d’à peine un millier d’hommes et historiquement issue du parti communiste birman (PCB). Mais cet assaut a provoqué l’exode massif de 30.000 civils et de 700 rebelles vers la Chine. En trois jours de combat, la junte birmane a reconnu la mort de 26 militaires et de 8 rebelles mais a assuré que « la région avait retrouvé la paix ». Seulement, cette situation met Pékin dans une position assez inconfortable.
En effet, la Chine est le plus fidèle soutien de la Birmanie devant la communauté internationale mais elle est aussi, depuis toujours, l’alliée de la milice du Kokang, qui appartient à l’éthnie chinoise Han. Or, pour Pékin, la question de la stabilité à ses frontières est capitale, d’autant plus que l’anniversaire du soixantième anniversaire de l’avénement de la république populaire approche.
C’est ainsi que le ministère chinois des Affaires étrangères a appelé la Birmanie à « protéger la sécurité et les biens des chinois », nombreux dans ce territoire de 150.000 habitants et à « préserver la stabilité le long de la frontière » au nom de « l’intérêt vital des deux peuples et de la responsabilité commune des deux gouvernements ».
Actuellement, près de 12.000 réfugiés seraient rentrés chez eux après le retour au calme dans le Kokang. Dans le même temps, la Birmanie a présenté ses excuses à la Chine pour les troubles causés par cette reprise en main musclée.
Pour autant, un risque d’embrasement de toutes les régions frontalières avec le territoire chinois n’est pas à exclure si la junte birmane continue de poursuivre la politique de fermeté qu’elle a initiée avec le Kokang.
Déjà, l’armée independante Kachin (KIA), a mobilisé ses troupes. En 1994, elle avait été défaite par les militaires birmans lors d’une offensive visant à s’approprier des mines de jade. L’armée de l’Etat unifié de Wa, autre région de culture de l’opium , a, quant à elle, menacé de passer à l’action si les forces gouvernementales ne se retirent pas de Kokang. Forte de 20.000 combattants, la tâche de la junte birmane s’annoncerait alors nettement plus compliquée, d’autant plus que d’autres régions l’attendent au tournant, comme celles de l’Etat de Mong (armée nationale d’alliance démocratique – NDAA) et de l’Etat Shan.