Char de combat du futur : « La balle est dans le camp des industriels allemands », insiste Mme Parly

Les coopérations franco-allemandes en matière d’armement ne sont pas tellement à la fête en ce moment. Ainsi, bien qu’un arrangement d’application n°3 [IA3] ouvrant la voie d’un démonstrateur a été signé au niveau des États impliqués [France, Allemagne et Espagne] en août dernier, le Système de combat aérien du futur est actuellement bloqué par des discussions « complexes » entre Dassault Aviation et les filiales allemande et espagnole d’Airbus au sujet de la charge de travail et de la propriété intellectuelle.

Le Maritime Airborne Warfare System [MAWS], qui doit permettre le renouvellement des capacités en matière de patrouille maritime, a connu un coup d’arrêt après la décision de Berlin de se procurer cinq avions P-8A Poseidon auprès du constructeur américain Boeing. S’agissant du developpement du standard Mk.3 de l’hélicoptère de combat Tigre, il devra sans doute être revu à la baisse, l’Allemagne étant réticente à son sujet, au point de laisser en plan la France et l’Espagne. L’Eurodrone tarde, quant à lui, à décoller, Madrid n’ayant pas encore débloqué les financements nécessaires pour qu’il puisse aller de l’avant.

Enfin, le Main Groud Combat System [MGCS], qui vise à mettre au point un « système de systèmes » centré autour d’un char de combat franco-allemand de nouvelle génération, est enlisé depuis un bout de temps. Et cela risque de durer…

Sa maîtrise d’ouvrage ayant été confiée au Bundesministerium der verteidigung [BMVg, l’équivalent allemand de la DGA française], ce programme franco-allemand devait être facilité par la création de la co-entreprise KNDS, détenues à parts égales par l’État français et la Famille Bode-Wegmann. Seulement, Berlin a imposé un troisième acteur, à savoir Rheinmetall. Et cela n’a pu que mettre à mal la règle des 50-50 convenue au départ entre Paris et Berlin.

Se trouvant ainsi en difficulté, ce projet n’a même pas été soumis à l’approbation du Bundestag [chambre basse du Parlement allemand] en juin dernier, alors que celui-ci devait se prononcer sur toute une série de programmes d’armement. Et, pour le moment, il n’est pas question d’aller au-delà de la phase d’étude de définition de l’architecture du système [SADS Part 1], confiée en 2020 à un groupement formé par le français Nexter et l’allemand Krauss-Maffei Wegmann [réunis au sein du holding KDNS, ndlr] ainsi que par Rheinmetall.

En avril, lors d’une audition parlementaire, le Délégué général pour l’armement, Joël Barre, avait expliqué que l’un des points de blocage était dû à un désaccord entre Nexter et Rheinmetall « sur la partie canon du futur char ». Mais la cause, semble-t-il est plus profonde.

Invitée à donner le détail des priorités de la présidence française de l’Union européenne par la commission de la Défense, à l’Assemblée nationale, la ministre des Armées, Florence Parly a mis les industriels allemands face à leurs responsabilités.

S’agissant du char de combat du futur, « la balle est dans le camp des industriels allemands, en particulier dans [celui] de Rheinmetall », a affirmé Mme Parly. « Donc, ces industriels allemands doivent trouver entre eux les conditions d’un accord pour se répartir les tâches et les travaux », a-t-elle insisté.

En attendant, a poursuivi la ministre, « nous avançons sur l’architecture du système. Ces travaux se poursuivront jusqu’à la mi-2022. Et nous le faisons au niveau des équipes étatiques entre la France et l’Allemagne ». Et de marteler à nouveau : « La question est d’abord une question entre industriels allemands ».

En octobre, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, avait mis le blocage du MGCS sur le compte de la situation politique en Allemagne, où une nouvelle coalition gouvernementale devait alors se mettre en place… Ce qui n’est donc pas exactement le cas si l’on en juge par les propos de Mme Parly.

Quoi qu’il en soit, avait estimé le CEMAT, « si le MGCS ne peut pas être réalisé avec l’Allemagne, il faudra soit envisager un programme franco-français, soit s’appuyer sur la communauté SCORPION tournée vers le Benelux ». En tout cas, « il faudra aboutir à la construction d’un nouveau char », avait-il insisté.

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