Des entreprises britanniques auraient fourni un soutien « crucial » à Taïwan pour la construction de sous-marins

Avec seulement de quatre sous-marins de conception ancienne, dont deux modèles de type « Zwaadvis » [ou « Hai Lung] acquis auprès des Pays-Bas il y a près de quarante ans et deux « Guppy II » conçus durant la Seconde Guerre Mondiale, Taïwan n’a pas les moyens de briser un blocus naval que la République populaire de Chine [RPC] serait tentée de lui imposer.

Étant donné la pression diplomatique [et économique] exercée par Pékin à l’encontre des pays susceptibles de lui fournir des équipements militaires, Taipei n’a pas eu d’autre solution que de lancer le programme Hai Lung II, qui vise à doter ses forces navales de huit nouveaux sous-marins diesel-électrique de conception locale.

Seulement, que ce soit en matière de matériaux, de capteurs, d’armement ou encore d’acoustique, l’industrie taïwanaise – en l’occurrence CSBC Corporation, associé à l’Institut national Chung-Shan pour la science et la technologie – ne possède pas compétences nécessaires pour concevoir et construire seule des sous-marins capables de rivaliser avec ceux de la composante navale de l’Armée populaire de libération [APL].

D’où l’aide fournie par les États-Unis dès le lancement du programme Hai Lung II, l’administration Trump ayant autorisé, en 2018, des transferts de technologies ainsi que des licences d’exportations de « matériels sensibles ».

Cela étant, Taïwan recevrait de l’aide de la part d’autres pays. En avril dernier, il fut avancé que la Corée du Sud, qui a su développer ses compétences en la matière grâce à des transferts technologiques consentis par l’allemand ThyssenKrupp Marine Systems [TKMS], en était. Ce que le ministère taïwanais de la Défense refusa de confirmer. « L’aide nous est fournie par d’importants pays d’Europe et les États-Unis », avait-il toutefois concédé, en réaction à un article du « National Interest ».

Jusqu’alors, jamais il n’avait été fait mention d’une aide fournie par des pays européens… Ceux-ci étaient alors à chercher parmi le Royaume-Uni [qui ne produit que des sous-marins nucléaires, comme les États-Unis], la France [avec Naval Group], l’Espagne [Navantia], la Suède [Kockums], l’Allemagne [mais aurait-elle pris le risque de se couper du marché chinois?], voire l’Italie.

Au terme d’une longue enquête, l’agence Reuters a pu en savoir davantage sur l’appui dont bénéficie Taïwan pour son programme de sous-marin. Ainsi, des entreprises britanniques et canadiennes y joueraient un rôle important. De même que d’anciens officiers de marine et des ingénieurs recrutés en Australie, en Corée du Sud, en Inde, en Espagne et au Canada par la société Gavron Limited [créée en 2013 à Gibraltar] pour le compte de Taipei.

Mais l’implication du Royaume-Uni paraît significative. D’après Reuters, depuis 2018, le ministère britannique du Commerce international a accordé pas moins de 28 licences d’exportation pour du matériel sensible [composants, logiciels, etc] destiné aux futurs sous-marins taïwanais. Le groupe QinetiQ serait particulièrement concerné, de même que la filiale canadienne du britannique BMT Group.

Quoi qu’il en soit, affirme l’agence de presse, des entreprises d’outre-Manche auraient ainsi fourni un « soutien crucial » au programme Hai Lung II, évalué, au plus, à 158 millions de livres sterling.

Pour celui-ci, Taïwan a mis en place une stratégie discrète afin de limiter la capacité de Pékin à faire pression sur les entreprises et les gouvernements étrangers.

Ainsi, plutôt que de passer par la voie officielle, Taipei sollicite d’abord les sociétés susceptibles de lui fournir les composants nécessaires à ses futurs sous-marins. Puis, une fois la commande signée, les entreprises demandent ensuite des licence d’exportation à leurs gouvernements. Et ces dernières sont plus facilement accordées quand elles concernent des technologies duales.

Cependant, cette façon de procéder ne marche pas à tous les coups. « Une entreprise allemande qui devait fournir des équipements a soudainement résilié une commande l’année dernière. Ses dirigeants ont par la suite révélé à Taipei que la vente avait été bloquée par sa société mère, qui détient de vastes intérêts commerciaux en Chine », ont expliqué deux sources proches du dossier à Reuters.

Sollicités par Reuters, les ministères britannique et canadien des Affaires étrangères ont botté en touche. « La politique de la Grande-Bretagne à l’égard de Taïwan n’a pas changé : nous n’avons pas de relations diplomatiques avec Taïwan mais une relation forte et non officielle, basée sur des liens commerciaux, éducatifs et culturels dynamiques », a fait valoir le premier. « Le Canada n’entretient pas de relations militaires ou de défense avec Taïwan », a réagi le second.

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