Quelle que soit la décision des États-Unis, la France maintiendra son soutien à l’Irak pour combattre Daesh

Le 26 juillet, le président des États-Unis, Joe Biden, a confirmé que les forces américaines déployées en Irak allaient se concentrer sur des missions de « formation, de conseil, d’assistance et de partage de renseignements » au bénéfice de leurs homologues irakiennes. Cette évolution avait déjà été annoncée par Donald Trump, qui, avant son départ de la Maison Blanche.

Cette mission des forces américaines va compléter celle menée par l’Otan en Irak [via la NMI, pour Nation Mission in Iraq], dont le principe avait été arrêté en 2018 et qui compte plusieurs centaines d’instructeurs militaires, placés actuellement sous le commandement du général danois Michael Lollesgaard. La France y participe… mais d’une façon très mesurée.

En effet, selon les députés Gwendal Rouillard et Philippe Meyer, qui ont récemment remis un rapport sur la « stabilité au Moyen-Orient dans la perspective de l’après Chammal » [nom de la contribution française à la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis, ndlr], la France « reste réservée sur la feuille de route de la mission de l’Otan en Irak, eu égard aux difficultés auxquelles elle fait face et à sa crédibilité relative vis-à-vis des autorités irakiennes ». Ce qui fait que seulement trois militaires français sont actuellement affectés à la NMI.

Et, visiblement, la France entend jouer sa propre partition en Irak, où, ces dernières années, elle a déployé un détachement d’artillerie [Task Force « Wagram »] doté de quatre CAESAr [Camions équipés d’un système d’artillerie] et les groupements « Narvik » et « Monsabert », dont la mission était de former et d’assister les forces irakiennes.

Ainsi, ces 28 et 29 août, le président Macron aura été le seul dirigeant occidental à participer à la « conférence des voisins » qui, organisée à Bagdad, a réuni la Turquie, l’Iran, l’Arabie Saoudite, l’Égypte, la Jordanie, le Qatar et les Émirats arabes unis. Parmi les dossiers évoqués : le contre-terrorisme, la stabilisation et le développement de l’Irak.

« Cette conférence doit aider à faire baisser les tensions régionales et à faire de l’Irak un espace de coopération », avait expliqué l’Élysée peu avant le départ de M. Macron vers Bagdad.

Les défis que doit relever l’Irak sont en effet nombreux. En premier, lieu, même si son « califat » a été défait, le groupe État islamique [EI ou Daesh] constitue toujours une menace [et ce sera encore le cas tant que la Syrie ne sera pas stabilisée…].

« Nous savons tous qu’il ne faut pas baisser la garde, car Daesh demeure une menace. […] Je sais que le combat contre ces groupes terroristes est une priorité de votre gouvernement », a encore dit M. Macron, le 28 août, en s’adressant à Moustafa Kazimi, le Premier ministre irakien.

Cela étant, et outre les tensions politiques [qui ont une dimension communautaire] et les difficultés économiques, l’Irak doit composer avec le Hachd al-Chaabi, une coalition de milices essentiellement chiites et soutenues par l’Iran qui multiplie les attaques contre les intérêts américains. À cela s’ajoute une opération militaire conduite par la Turquie contre les positions tenues par le Parti des travailleurs du Kurdistan [PKK] dans le nord du pays.

Quoi qu’il en soit, le président Macron a assuré Bagdad que la France restera militairement engagée à ses côtés.

« Je veux dire ici que le soutien et l’engagement de la France dans la lutte contre le terrorisme ne dépendent d’aucune autre décision que la réalité de la situation sur le terrain et les besoins qui seront les vôtres je veux le dire ici très clairement à vous et au peuple irakien », a affirmé Emmanuel Macron, dont les propos ont été rapportés par Le Figaro.

« Quelle que soit la décision américaine, la France maintiendra son dispositif militaire. Les deux conditions dont dépend notre présence sont la poursuite de la lutte contre le terrorisme et la demande du gouvernement irakien », a-t-il encore ajouté, avant de soutenir que les forces françaises avaient « capacité opérationnelle de rester présente militairement seule sans les États-Unis ».

Actuellement, la force Chammal mobilise entre 600 et 800 militaires, principalement en Jordanie, où 230 d’entre eux sont affectés à base aérienne projetée [BAP] H5, d’où sont mis en oeuvre 4 Rafale. Ce dipositif s’appuie également sur la BA 104 d’Al Dhafra [Émirats arabes unis] où 7 Rafale sont susceptibles de conduire des missions au Levant. Ces moyens aériens, ponctuellement renforcés par des avions ravitailleurs et d’alerte avancée, ont assuré 10% des sorties de la coalition Inherent Resolve. En outre, des commandos des forces spéciales [task force « Hydra »] sont également engagés dans la région.

Enfin, des militaires français sont présents au sein du « Military Advisory Group » [MAG], une structure relevant d’Inherent Resolve, chargée de conseiller les états-majors irakiens.

« La France est le 3e contributeur au sein de la coalition internationale engagée contre Daesh. Elle apporte aux forces locales un appui conséquent pour notamment améliorer la connaissance de la situation sur le terrain et frapper les capacités de nuisance résiduelles du groupe terroriste, contenu à un niveau insurrectionnel. Elle prodigue également, avec les alliés de la Coalition, du conseil aux états-majors irakiens pour améliorer l’emploi de leurs unités comme la planification de leurs opérations. Il s’agit ainsi d’accompagner la stabilisation de la région pour prévenir la résurgence de Daesh sur le long terme », a récemment résumé l’État-major des armées, à l’occasion d’un exercice mené conjointement par des Rafale français et des F-16 irakiens.

D’après le rapport de MM. Rouillard et Meyer, les forces françaises « travaillent à la construction » d’un partenariat avec leurs homologues irakiennes, en donnant la priorité au « développement » des capacités aériennes, à la défense anti-drones et à l’artillerie.

Photo : Rafale B de l’Armée de l’Air & de l’Espace, en formation avec deux F-16IQ irakiens © État-major des armées

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