La Grèce demande à l’Otan de renforcer sa présence navale en mer Égée

SNMG2

En 2016, devant l’afflux de migrants ayant transité par le territoire turc, la Grèce avait demandé à l’Otan de lancer une mission navale en mer Égée. Cette requête, appuyée par l’Allemagne et la Turquie, fut acceptée, avec le déploiement dans la zone concernée du Nato Maritime Group 2 [SNMG-2].

« Nos navires vont fournir de l’information aux garde-côtes et autres autorités nationales de Grèce et de Turquie. Ceci les aidera à être encore plus efficaces pour gérer les réseaux de trafic illégaux », avait alors expliqué Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan.

Puis, la situation s’était tassée, notamment après un accord passé entre Ankara et l’Union européenne [pressée par l’Allemagne]. Un accord à 6 milliards d’euros, soit le prix qu’a exigé le gouvernement turc pour retenir les migrants sur son territoire. À ce jour, la moitié a été versée.

Seulement, depuis quelques semaines, l’arrivée de milliers de migrants met à nouveau la Grèce sous tension.

« En septembre, plus de 10.000 personnes sont arrivées sur les îles grecques. Près de 5.000 à Lesbos seulement. Septembre est le mois avec le plus grand nombre d’arrivées depuis la mise en œuvre de la déclaration conjointe de l’Union européenne et de la Turquie en mars 2016 », a ainsi expliqué Theodoros Alexelis, porte-parole du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés [UNCHR].

Et cela risque fort de ne pas aller en s’arrangeant… Devant les critiques de plusieurs pays européens [appartenant à l’UE et à l’Otan] contre l’offensive qu’il a ordonnée contre les Kurdes syriens, le président turc Recep Tayyip Erdogan, a menacé d’envoyer sur le Vieux continent quelque 3,6 millions de réfugiés.

« Ô Union européenne, reprenez-vous. Je le dis encore une fois, si vous essayez de présenter notre opération comme une invasion, nous ouvrirons les portes et vous enverrons 3,6 millions de migrants », a en effet déclaré M. Erdogan.

« Vous n’avez jamais été sincères. A présent ils disent qu’ils vont bloquer trois milliards d’euros. Avez-vous jamais respecté une promesse qui nous a été faite ? Non! », a ajouté le président turc. « Avec l’aide de Dieu, nous poursuivrons notre chemin, mais nous ouvrirons les portes » aux migrants », a-t-il ajouté, avant de s’en prendre tout aussi vertement à l’Égypte et l’Arabie Saoudite, qui ont aussi critiqué l’offensive turque dans le nord de la Syrie.

« Nous n’accepterons jamais que les réfugiés soient utilisés comme arme et pour nous faire chanter. C’est pour cela que je considère les menaces d’hier du président Erdogan comme absolument hors de propos », a rétorqué Donald Tusk, le président du Conseil européen lors d’une visite à Nicosie, où, là aussi, les relations avec le Turquie sont actuellement très tendues en raison des gisements gaziers au large de l’île.

Quoiqu’il en soit, le 10 octobre, le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, a donc demandé à Jens Stoltenberg, le secrétaire générale de l’Otan d’accroître la présence navale de l’Alliance en mer Égée. Et il a également plaidé pour « l’élargissement » de cette mission au sud de cette région afin de « couvrir une large étendue des frontières maritimes de notre pays. » Une demande allant dans ce sens sera formellement faite à l’occasion du prochain sommet de l’Otan, qui aura lieu à Londres, en décembre.

De son côté, M. Stoltenberg n’a pu que promettre qu’il demanderait aux Alliés de « fournir davantage de navires ». Mais il a rappelé que leur mission ne consisterait, en l’état actuelle des choses, qu’à « partager des informations » et « non d’arrêter les bateaux » de migrants. « Tout changement de ce mandat nécessite un consensus », a-t-il dit. Or, la Turquie étant l’un des pays membres, c’est loin d’être gagné… D’autant plus que les contentieux avec Ankara s’accumulent, avec notamment l’achat de systèmes russes de défense aérienne S-400.

Mais la comme la Turquie occupe une position stratégique en Méditerranée orientale, étant donné qu’elle contrôle l’accès des détroits menant à la mer Noire [et donc les allées et venues des navires russes], M. Stoltenberg marche sur des oeufs. D’où ses déclarations pleines de retenue au sujet de l’opération turque contre les milices kurdes syriennes, lesquelles sont en première ligne face à l’État islamique [EI ou Daesh].

« Bien que la Turquie ait des préoccupations sécuritaires légitimes, nous nous attendons à ce qu’elle agisse avec retenue », a ainsi déclaré M. Stoltenberg, ce 11 octobre, à l’issue d’un entretien avec Mevlüt Cavusoglu, le chef de la diplomatie turque. « Je lui ai fait part de mes sérieuses préoccupations au sujet de cette opération et sur les risques de davantage de déstabilisation dans la région », a-t-il ensuite précisé, en soulignant que les « avancées obtenues » contre Daesh ne devaient « pas être mises en péril ».

« Attendre de nos alliés qu’ils fassent preuve de solidarité est notre droit le plus naturel. Dire : ‘Nous comprenons les inquiétudes légitimes de la Turquie pour sa sécurité’, ce n’est pas suffisant », a répondu M. Cavusoglu, pour qui les réactions des pays européens justifient le choix d’Ankara en faveur des systèmes russes S-400. « Cela montre que la Turquie n’a d’autre choix que d’acheter ses propres systèmes de défense antiaérienne. Nous n’allons pas supplier nos alliés à chaque fois » a-t-il lâché.

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