Le chef du commandement américain pour l’Afrique s’interroge sur l’efficacité des raids aériens contre les jihadistes somaliens

Sous l’ère du président Obama, les forces américaines effectuèrent des frappes ciblées contre les hauts responsables des milices shebab, en Somalie. Seulement, cette organisation jihadiste, liée à al-Qaïda, a su faire preuve d’une étonnante résilience dans la mesure où la perte de ses principaux dirigeants, dont son chef, Ahmed Abdi Godane, tué lors de raid mené en septembre 2014, ne l’ont nullement dissuadé de continuer ses attaques terroristes.

Cela étant, grâce à l’action de l’AMISOM, une force de l’Union africaine déployée en Somalie avec un mandat des Nations unies, les Shebab ont été chassés des centres urbains… pour mieux se concentrer sur les zones rurales.

Dès son arrivée à la Maison Blanche, Donald Trump a décidé de laisser plus de latitude aux chefs militaires sur le terrain. Ce qui s’est traduit par une intensification des frappes aériennes contre les jihadistes somaliens, avec 35 raids menés en 2017, 47 en 2018 et déjà 12 depuis le début de cette année. Le dernier en date, effectué le 30 janvier dans le centre du pays, a fait 24 tués dans les rangs des shebab. Seulement, cinq jours plus tard, ces derniers ont perpétré un nouvel attentat à Mogadiscio [11 victimes] et revendiqué l’assassinat Paul Anthony Formosa, le directeur du port de Bossasso, le plus important de la région semi-autonome du Puntland.

Après chaque frappe, l’US AFRICOM, le commandement militaire américain pour l’Afrique, explique que l’objectif de ces opérations est d’empêcher les milices shebab de « tirer parti de refuges sécurisés qui leur permettent de renforcer leurs capacités et d’attaquer le peuple somalien », soulignant que l’organisation jihadiste « utilise notamment des parties du sud et du centre de la Somalie pour préparer des attaques terroristes, voler de l’aide humanitaire, extorquer la population locale pour financer ses opérations et abriter des terroristes. »

Pour autant, dans un rapport relatif à la situation en Somalie, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a indirectement remis en cause l’efficacité de cette campagne aérienne en faisant observer que les jihadistes somaliens conservent toujours « leur force et leurs capacités opérationnelles ».

Effectivement, des frappes aériennes ne sont efficaces que si elles accompagnent des forces terrestres. Et c’est cette évidence que le général Thomas Waldhauser, le chef de l’US AFRICOM, rappelée lors d’une audition au Sénat américain, le 7 février.

S’il a souligné que ces frappes aériennes « causent des problèmes » aux jihadistes, le général Waldhauser a en effet admis que, « au bout du compte », elles ne permettraient « pas de les vaincre ». Pour cela, a-t-il continué, « l’armée nationale somalienne doit se développer, doit intensifier ses efforts et assumer la responsabilité » de la sécurité de son pays.

Aussi, a ajouté le chef de l’US AFRICOM, la question de savoir « dans quelle mesure ces frappes dissuadent les attaques des shebab reste ouverte. »

Par ailleurs, le général Waldhauser a également insisté sur l’influence grandissante de la Russie et de la Chine en Afrique, où les États-Unis comptent réduire leurs effectifs militaires d’au moins 10% dans les années à venir.

« En faisant appel à des conseillers militaires qui sont des mercenaires financés par des oligarques, en particulier dans les pays où les dirigeants cherchent à établir un régime autocratique incontesté, les Russes obtiennent des accès aux ressources naturelles à des conditions favorables », a ainsi expliqué le général américain.

« Certains dirigeants africains souscrivent volontiers à ce type de soutien et l’utilisent pour consolider leur pouvoir et leur autorité. Cela se produit en République centrafricaine, où les dirigeants élus hypothéquent les droits miniers pour une fraction de leur valeur », a-t-il observé.

« Avec un investissement minimal, la Russie fait appel à des entreprises militaires privées, telles que le groupe Wagner, et reçoit en retour une influence politique et économique qui lui est bénéfique », a encore insisté le général Waldhauser, toujours au sujet de la Centrafrique.

Et « la Russie envisage potentiellement d’exporter son modèle de sécurité au niveau régional, Les dirigeants confrontés à une instabilité et à une agitation similaires pourraient trouver le modèle attrayant », a encore prévenu le commandant de l’US AFRICOM.

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