Les catapultes électromagnétiques EMALS du dernier porte-avions américain ne seraient pas encore fiables

Près de 100.000 tonnes à pleine charge pour une longueur de 337 mètres et un maître-bau de 78 mètres : le dernier porte-avions américain, l’USS Gerald Ford (CVN-78), est le navire de guerre le plus imposant du moment. Et sans doute le plus technologiquement avancé, au regard des nombreuses innovations qu’il met en oeuvre, et certainement le plus cher de l’histoire, son développement et sa construction ayant coûté 12,9 milliards de dollars.

Parmi ces innovations, les catapultes électro-magnétiques EMALS (Electromagnetic Aircraft Launch System), qui remplacent celles à vapeur jusqu’à présent utilisées, sont les plus discutées. Et elles risquent de l’être davantage après un rapport du bureau des tests opérationnels et de l’évaluation du Pentagone (DOT&E, Director, Operational Test & Evaluation Office).

Fonctionnant grâce à un moteur à induction linéaire utilisant des courants électriques qui générent des champs magnétiques, une catapulte EMALS propulse un chariot posé sur un rail de 91 mètres de long. Théoriquement, ce système permet de faire décoller des avions (ou des drones) davantage chargés en carburant et en munitions, d’augmenter la fréquence quotidienne des catapultages et de réduire les contraintes mécaniques. Les besoins en énergie étant plus importants, l’USS Gerald Ford est doté de chaufferies nucléaires trois plus puissantes à celles des précédents porte-avions américains.

Lors d’une campagne d’essais menée au cours de l’été 2017, plusieurs avions ont décollé de l’USS Gerald Ford grâce aux catapultes EMALS. Et les responsables des tests ne signalèrent rien d’anormal. Au contraire.

Seulement, le rapport du DOT&E, publié en janvier, a sévèrement critiqué les catapultes EMALS ainsi que le système d’arrêt des aéronefs (Advanced Arresting Gear – AAG), conçu par General Atomics.

« La fiabilité médiocre ou inconnue des catapultes, des dispositifs d’arrêt, des ascenseurs pour munitions et des radars nouvellement conçus, qui sont tous critiques pour les opérations aériennes, pourrait affeceur la capacité [du porte-avions] à assurer des sorties, ce qui rendrait le navire plus vulnérables aux attaques ou imposerait des limites aux opérations de routine », avance le document.

Et d’insister : « Sur la base des estimations de fiabilité actuelles, le CVN-78 est peu susceptible d’être capable de mener le type d’opérations aériennes de haute intensité attendues en temps de guerre. »

Cependant, des améliorations aux catapultes EMALS ont déjà été apportées. Ainsi, lors d’essais effectués en 2014, il fut constaté que les avions lourdement chargés subissaient des contraintes « inacceptables » sur leurs ailes. Un correctif a été mis au point mais il ne sera pas installé avant 2019.

Le système EMALS a souvent fait l’objet de critiques, résumées, dans un langage fleuri, par le président Trump, lors d’un entretien donné au magazine Time en mai 2017. « C’est très compliqué. Il faut être Albert Einstin pour comprendre », avait-il dit à son sujet. Cela « coûte des centaines de millions de dollars et ce n’est pas bon », avait-il ajouté, estimant que l’US Navy devait revenir à « la foutue vapeur ».

Par ailleurs, le DOT&E estime que le nombre de marins nécessaires à la mise en oeuvre de l’USS Gerald Ford est sous-évalué, dans la mesure où les innovations du navire ne permettront pas de réduire la main d’oeuvre autant que souhaité.

Ce rapport a été établi avant que ne soit proposée au Congrès l’idée d’eviter à l’USS Gerald Ford une ultime campagne d’essais en condition opérationnelle avant son premier déploiement. Ce qui ferait gagner deux ou trois ans par rapport aux prévisions.

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