Les drones armés divisent la classe politique allemande

Il y a un an, le ministère allemand de la Défense confirmait son intention de louer 5 drones MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) Heron TP auprès du groupe israélien IAI. Cette solution se voulait provisoire étant donné que l’Allemagne est partie prenante dans le projet du MALE RPAS, porté par Airbus, Dassault Aviation et Leonardo. En outre, elle s’inscrivait dans un certaine continuité dans la mesure où la Bundeswehr mettait déjà en oeuvre des appareils Heron 1, développé par le même industriel.

Par ailleurs, la ministre allemande de la Défense, Ursula von der Leyen, a souhaité que ces 5 Heron TP puissent être armés, afin de mieux pouvoir protéger les troupes allemandes engagés dans les opérations extérieures. L’affaire aurait pu être traitée rapidement, du moins était-ce l’espoir de la Bundeswehr, qui comptait recevoir ces appareils d’ici 2018, voire 2019. Seulement, les choses se passent rarement comme prévu.

D’abord, le concurrent d’IAI, le constructeur américain General Atomics, qui proposait son MQ-9 Reaper, a déposé un recours devant tribunal de Düsseldorf, après avoir été débouté une première fois par l’Office fédéral des ententes, auprès duquel il avait contesté le choix du ministère allemand de la Défense. Fin mai, cette plainte a été finalement rejetée. Mais elle a fait perdre quelques mois à Berlin, étant donné que, tant qu’une procédure était en cours, il était impossible de signer le contrat de location des Heron TP.

Et puis, alors que ce projet n’avait jusqu’alors pas suscité d’opposition particulière au sein de la coalition gouvernementale [le centre-droit gouverne avec les sociaux démocrates du SPD, ndlr], il en est allé tout autrement au Bundestag [chambre basse du Parlement allemand, ndlr], en particulier lors d’un débat à la commission du Budget.

Là, les députés sociaux-démocrates qui en font partie ont refusé de voter les crédits destinés à la location des drones Heron TP, au motif qu’ils pouvaient être potentiellement armés. Et pour cause une clause confidentielle prévoyait l’achat d’une soixantaine de missiles destinés à ces appareils ainsi que la formation des opérations de la Bundeswehr sur la base aérienne israélienne de Tel Nof. Le tout pour 100 millions d’euros supplémentaires. Résultat : la signature du contrat, si jamais elle doit avoir lieu, a été reportée à plus tard.

Le chef de file du SPD au Bundestag, Thomas Oppenheimer, a expliqué que les conditions de la location n’étaient pas satisfaisantes et que ce projet soulevait des questions militaires et juridiques qui n’avaient pas encore été réglées. Et si la commission du Budget s’est opposée à l’acquisition d’un drone armé, il s’est toutefois dit favorable à l’achat d’un appareil de « reconnaissance » car les sociaux-démocrates estiment que « la sécurité des soldats est importante. »

« Un drone de reconnaissance non armé ne vaut pas l’investissement d’un milliard d’euros » a rétorqué le ministère de la Défense. « De l’avis du gouvernement, la capacité offensive représente la ‘valeur ajoutée’ qui justifie le prix élevé », a-t-il ajouté, après avoir souligné qu’il n’était évidemment pas question d’utiliser de tels appareils pour des frappes ciblées, comme c’est le cas aux États-Unis.

Finalement, la question reviendra sur le tapis après les prochaines élections fédérales, qui auront lieu en septembre prochain. Pour le moment, la CDU d’Angela Merkel devance le SPD de 16 points dans les sondages, avec 39 % des intentions de vote.

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