Pour le général (2s) Desportes, il faudrait porter les effectifs de l’opération Sangaris à au moins 5.000 hommes

Le président Hollande l’avait assuré lors d’un entretien accordé à France 24, le 8 décembre dernier : les effectifs de l’opération Sangaris, qu’il avait lancée 3 jours plus tôt en Centrafrique, ne dépasseraient pas 1.600 hommes. « Il n’en aura pas davantage, cela suffira », avait-il affirmé.

Et cela d’autant plus qu’il ne fallait pas oublier les 4.000 soldats de la Mission de soutien à la Centrafrique (MISCA), soutenue par l’Union africaine… Seulement, pour espérer réussir une mission de paix dans un pays en guerre, il faut du nombre. Comparaison n’est pas raison mais en Bosnie, la Forpronu, la force d’interposition des Nations unies, comptait 38 599 militaires, dont près de 7.000 français.

Comme dans les Balkans, la situation est compliquée. Contrairement au Mali, il n’y a pas d’adversaires clairement identifié qu’il faut « détruire ». En Centrafrique, l’usage de la force doit être limité, avec le risque de se faire accuser de prendre parti pour l’un ou l’autre camp. En clair, la position est inconfortable. Et puis, surtout, il faut sécuriser les grands axes, patrouiller dans les quartiers sensibles, avoir une présence dissuasive pour empêcher de nouvelles violences.

Or, avec les combats qui ont eu lieu le jour de Noël, et dont le bilan ne cesse de s’alourdir, l’on voit bien que la situation n’est pas sous contrôle. Et cela, malgré l’apport de la Misca. Seulement, cette dernière manque de cohérence opérationnelle, voire de cohérence tout court, si l’on en juge par l’accrochage récents entre soldats tchadiens et burundais.

Clairement, avec 1.600 hommes en Centrafrique, l’opération Sangaris n’a pas les moyens nécessaires pour mener à bien sa mission, dans un pays dont la superficie est d’environ 623 000 km². Et cela d’autant plus qu’un détachement français a été déployé à Bossangoa et que l’on compte 300 militaires spécialistes, qui n’ont pas vocation à aller patrouiller dans les rues de Bangui. Si l’on considère les effectifs affectés à la protection de l’aéroport MPoko, dont le contrôle est crucial, il ne reste plus grand monde pour aller désarmer les milices armées présentes dans la capitale centrafricaine.

« On doit séparer des gens qui ne sont pas constitués en armée, c’est quasiment du désarmement et de l’interposition individuelle (…). Et il n’y a pas de processus politique en toile de fond, même si on nous dit qu’il y aura des élections en 2014. Pour l’instant, c’est l’anarchie, le chaos absolu », a commenté, à ce sujet, le député européen (UMP) Arnaud Danjean, spécialiste des questions de défense.

Alors que faire? Arrêter les frais? Impensable politiquement. Et la situation deviendrait certainement encore pire qu’avant l’intervention. C’est ce qu’estime d’ailleurs le général (2S) Vincent Desportes. « La France, de toute façon, n’a pas le choix de repartir, évidemment. Mais par contre, elle doit intervenir plus rapidement, plus massivement. Vous savez, c’est l’affaire du feu ; si vous avez un verre d’eau pour éteindre un feu, le feu se propage », a-t-il expliqué sur les ondes de RFI. « Donc, aujourd’hui, il faut y aller franchement pour arriver à rétablir rapidement la situation », a-t-il ajouté.

« Le Président a eu raison d’impliquer la France dans ce qui était la chronique d’un massacre annoncé », a pour sa part estimé Gérard Longuet, l’ancien ministre de la Défense (2011-2012), à l’antenne de RTL, ce 27 décembre. « Mais il a eu tord de dire qu’on pourrait le faire avec des effectifs limités », a-t-il aussitôt tempéré. « Surtout, la question de la date ne doit jamais être évoquée. Quand vous dites à votre adversaire : ‘On est là, mais on va partir’, il attend tranquillement que vous partiez. Nous donnons des raisons d’espérer à nos adversaires », a-t-il encore ajouté. Sauf qu’il n’est pas question d’adversaires en Centrafrique…

Quels seraient les besoins de l’opération Sangaris pour mener à bien ses missions en Centrafrique et pour combien de temps? Pour le général Desportes, « il faudrait entre 5.000 et 6.000 hommes et cela dans la durée, un an voire deux ans ». Avec le Mali, le Liban, les opérations intérieures (OPINT), les missions de souveraineté, les cycles de prépation opérationnelle, les formations, et suppressions de postes… la question qui se pose est de savoir où les trouver.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]