Opération Serval : Des absences européennes « un peu bien regrettables »

En décembre dernier, l’Union européenne a approuvé le lancement d’une mission au profit de l’armée malienne (EUTM Mali), qui, forte de 400 hommes, devait former 4 bataillons aptes à reconquérir le nord-mali, alors contrôlé par 3 groupes jihadistes, à savoir al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) et Ansar-Dine.

Sauf que l’offensive que ces derniers ont mené à Konna, avec l’intention de partir à la conquête de la capitale malienne a bouleversé les plans initiaux et contraint Paris a s’impliquer militairement.

Quid de l’EUTM Mali alors, qui devrait être commandée par le général français François Lecointre? D’après Catherine Ashton, la haute-représentante de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, son déploiement va être accéléré.

« Dans les jours qui viennent, nous enverrons les premiers groupes techniques afin de mettre en place cette mission », a-t-elle déclaré, ce 15 janvier, lors d’une session plénière du Parlement européen à Strasbourg consacrée à la situation malienne. « Le Mali doit disposer d’une armée professionnelle et efficace, c’est urgent » a-t-elle ajouté.

Pour autant, il n’est pas question que les militaires européens qui y seront affectés prennent part aux hostilités. C’est ce qu’a affirmé, la veille, Michael Mann, porte-parole de la responsable de la diplomatie européenne. « La mission de formation conserve toute son utilité. Il est même plus urgent de la lancer » a-t-il affirmé. Et de préciser qu’elle « n’aura aucun rôle de combat. »

Dans cette affaire, l’armée française se retrouve donc en première ligne. « La France n’a pas vocation à agir seule contre les rebelles islamistes au Mali et à rester seule aux côtés des autorités de Bamako » a cependant rappelé Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères.

Certes, le déploiement de la MISMA, autorisé par le Conseil de sécurité des Nations unies, est en cours. Seulement, l’on attend de voir comment vont fonctionner les différents contingents qui la composent. Fournis par plusieurs pays différents, ils seront commandés par un officier nigérian anglophone, étant donné que le Nigéria est le plus important contributeur. Et il est à craindre qu’il y ait des problèmes d’interopérabilité dans la mesure où ces soldats de nationalités diverses n’ont pas l’habitude de manoeuvrer ensemble.

Dans ces conditions, et à l’heure où l’on parle de mutualiser des capacités militaires, l’UE ne peut-elle pas faire plus? Ce 15 janvier, le président François Hollande l’a assuré : « tous les pays européens ont prodigué leur soutien, et même proposé leur aide matérielle. Le premier a été le Royaume-Uni, d’autres ont suivi, même ceux qui ne sont pas les plus puissants d’Europe, comme le Danemark. La Belgique se propose. Sur le plan politique, tous les pays sont solidaires mais aussi convaincus. »

Seulement, un peu plus tôt, le ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, a dressé un constat objectif de la situation. « On ne peut pas dire que la France est toute seule [mais] il y a des absences qui sont un peu regrettables, c’est-à-dire qu’on peut constater en Europe une mobilisation un peu minimale », a-t-il affirmé à l’antenne de LCI. « Il va y avoir des rencontres, on espère que les choses vont s’améliorer, notamment aujourd’hui, ce serait bien », a-t-il ajouté.

Ancien ministre des Affaires étrangères du président Sarkozy, Alain Juppé a estimé que l’Europe devait s’engager davantage au Mali, étant donné que ses « intérêts vitaux » sont concernés par la situation malienne. « Il y a de la criminalité, des trafics de drogue et du terrorisme politique. Tout ceci est dirigé contre nos démocraties et pas seulement contre la seulement la France » a-t-il affirmé.

Eh bien l’on ne dirait pas… Car si l’on fait le compte, hormis des aides logistiques quand même bien mesurées (2 C-17 britanniques, 1 C-130 danois et deux autres belges), les pays de l’Union européenne ne se bousculent pas pour prêter main forte à la France… alors qu’il y a des chances pour que l’opération Serval s’inscrive dans la durée.

A la limite, mieux vaudrait compter sur les Etats-Unis et le Canada. Encore que… Le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, a même indiqué que Washington est disposé à fournir à Paris « toute l’aide nécessaire afin de rétablir la sécurité au Mali » mais pas question pour autant « de mettre un pied américain sur le terrain. »

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