La fusion EADS/BAE Systems menacée par des désaccords entre les Etats concernés

Si les négociations en vue de la fusion d’EADS et de BAE Systems ne semblent pas poser de problème particulier au niveau des groupes concernés, en revanche, ce n’est pas le cas au niveau des Etats qui veulent défendre leurs intérêts dans cette opération. Pour le moment, il n’est pas encore question de parler d’échec, seulement d’un éventuel report de la date limite, fixée au 10 octobre, pour remettre aux autorités boursières de Londres les modalités de ce projet de mariage entre les deux industriels.

Le problème se situe au niveau de l’actionnariat d’EADS, composé notamment par l’Etat français (15%), Lagardère (7,5%) et Daimler (15% mais 22,5% des droits de vote). Dans le nouvel ensemble, Berlin, qui ne possède actuellement pas d’actions du groupe aéronautique, voudrait racheter celles du groupe allemand, qui, ça tombe bien, souhaite s’en séparer partiellement, à condition toutefois que le prix du marché le lui permette.

Il s’agit ainsi pour le gouvernement allemand d’avoir une participation au même niveau que son homologue français. Cependant, cette dernière ne serait plus que de 9% après la fusion. Par ailleurs, et pour éviter la présence d’un Etat au capital du futur ensemble, il avait été  prévu que Paris et Berlin disposeraient d’actions spéciales assorties de droits particuliers, ceci afin de protéger leurs intérêts et surtout pour leur permettre de s’opposer à toute prise de contrôle non désirée de la nouvelle entité.

Pour Londres, qui disposera aussi d’une « action spéciale » sans participation au capital, il n’est pas question que soit dépassé le seuil des 9% d’actions que Paris et Berlin envisagent chacun de détenir. « Nous avons dit clairement que nous avons des lignes rouges et que si elle n’étaient pas satisfaites, alors nous utiliserons notre golden share pour mettre notre véto sur l’accord » a ainsi affirmé, le 7 octobre, Philip Hammond, le ministre britannique de la Défense.

Or, la France a jusqu’à présent refusé de s’engager par écrit à aller au-delà de ce seuil, même si, financièrement, elle n’en a pas actullement les moyens. En jeu : les parts détenues par Lagardère, qui souhaite sortir d’EADS. Et si Paris fanchit malgré tout le pas, Berlin se sentirait obligé d’en faire autant, au nom de la parité franco-allemande.

Seulement, le gouvernement britannique veut éviter cette possibilité. Car, à Londres, l’on fait valoir que cela pourrait menacer les rapports du futur groupe avec le Pentagone, Washington étant par principe opposé à ce que des Etats, même alliés, puissent avoir un droit de regard sur des activités de défense, par définition sensibles. Et il est très probable que Tom Enders, le patron d’EADS, soit sur la même ligne, étant donné qu’il veut faire du marché américain une des premières priorités après la fusion. Pour rappel, BAE Systems y réalise 40% de son chiffre d’affaires…

Un autre problème à régler rapidement est la question de la localisation du siège d’EADS. En effet, Berlin exige qu’il soit de nouveau implanté outre-Rhin, alors que Tom Enders, qui est de nationalité allemande, veut qu’il reste à Toulouse, et cela pour des « raisons économiques. » Et selon Les Echos, l’Allemagne voudrait également que le siège d’Astrium ainsi qu’une partie de la production en fassent de même, quitte à fâcher le gouvernement français.

Cela étant, ce dernier a obtenu l’engagement qu’EADS ne se séparera pas des 46% des parts que le groupe européen détient dans le capital de Dassault Aviation et que le missilier MBDA, qui sera contrôlé à 75% par la nouvelle entité issue de la fusion, ne privilégie pas l’Eurofighter aux dépens du Rafale.

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