Rigueur ou pas, le Pentagone à la française se fera

Réduction des déficits publics oblige, les armées devront trouver 5 milliards d’euros à économiser. Pour l’instant, le ministère de la Défense étudie différentes pistes qui seront soumises ensuite au président de la République, lequel rendra ses arbitrages.

Mais une chose est acquise : la construction du « Balard-gone », ou « Pentagone à la française », n’est pas remise en question. Et pour cause : le regroupement des services du ministère de la Défense sur le site de la base aérienne de Balard, dans le XVe arrondissement de Paris, est la mesure emblématique de la réorganisation des armées amorcées depuis 2007. Par ailleurs, si ce projet devait être abandonné, il n’en demeurerait pas moins qu’il faudrait quand même financer la modernisation des locaux existants, ce qui coûterait 500 millions d’euros en 5 ans.

Cela étant, le futur siège du ministère de la Défense s’étendra sur 16,5 hectares, divisés en deux parcelles qui seront reliées par une passerelle. Actuellement, des travaux de démolition ont déjà commencé sur la partie Ouest de l’ensemble, qui accueillera le bâtiment principal de 130.000 m2 où s’établiront le ministère de la Défense, les états-majors et le Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO).

Toujours pour ce secteur, sur la corne ouest, il est prévu de construire 90.000 m2 de bureaux à usage purement civil qui seront proposés à la location. Au moins 5.000 salariés pourraient venir y travailler.

Pour ce qui concerne la parcelle Est (8,5 ha), où est situées l’actuelle Cité de l’air, les travaux de rénovation des deux tours (A et F) qui dominent le périphériques parisiens, ont d’ores et déjà commencé. Une dizaine de bâtiments existants seront détruits et reconstruits ou réabilités.

« Afin de s’assurer de la très grande qualité architectural du nouveau ministère, une compétition architecturale a été intégrée à la procédure » a rappelé, le 21 juin, Bruni Vieillefosse, le délégué pour le regroupement des états-majors, directions et services centraux (DRESD), qui a par ailleurs assuré que « le projet se déroule selon un timing implacable ».

D’ici au 1er juillet, les trois groupes de travaux publics retenus associés aux équipes d’architectes sélectionnés, à savoir Foster et Parners pour Eiffage, Nicolas Michelin ainsi que Jean-Wilmotte pour Bouygues et Dominique Perrault pour Vinci, remettront leurs proposition intermédiaire. En novembre prochain, le cahier des charges définitif leur sera soumis et leur offre finale sera déposé en janvier 2011. Le lauréat sera désigné en février et la signature du contrat se fera au printemps. Ensuite, les travaux de construction devraient commencer au début de 2012 et se terminer d’ici à 2014, année où s’installeront les différents services du ministère de la Défense, qui représenteront 10.000 personnes.

Cette opération sera réalisée dans le cadre d’un partenariat public/privé. « Le montant de l’investissement s’élève à environ 600 millions d’euros et le loyer acquitté par le ministère sera supérieur à 100 millions d’euros » pendant 30 ans a encore rappelé Bruno Vieillefosse.

Ce loyer annuel comprent le financement de l’ensemble, mais aussi son entretien et la fourniture de services divers (restauration, nettoyage, etc…). Toujours selon M. Vieillefosse, la construction du « Balard-gone » permettra de dégager des ressources supplémentaires qui seront affectées aux équipements grâce à la vente des emprises que le ministère de la Défense possède dans la capitale et dont la vente devrait rapporter entre 700 et 800 millions d’euros. Seuls l’Hôtel de Brienne, l’Hôtel de la Marine, l’Ecole militaire, les Invalides et le Val-de-Grâce ne seront pas vendus.

Cependant, ce projet ne va pas sans créer de polémiques. Ainsi, le ministère de la Défense ne voit pas d’un oeil favorable la construction d’une aire pour les gens du voyage, voulue par la Mairie de Paris, dans le prolongement du futur Pentagone à la française. « Le voisinage d’un ministère et d’un camp de caravanes n’est pas envisageable » fait-on valoir.

Et puis, il y a toujours la question de cette fameuse piscine, qui a fait couler beaucoup d’encre. Cette dernière sera ouverte la moitié du temps aux habitants du quartier et destinée à l’entraînement des personnels militaires, tout comme les autres équipements sportifs qu’il est prévu d’installer.

« Les polémiques sur la piscine sont stupides. Je voudrais seulement rappeler que Balard regroupera 10.000 personnes et qu’il s’agit d’édifier une infrastructure pour des décennies sinon des siècles. Je veux donc qu’on y mettre tous les équipements qu’une communauté humaine est en droit d’attendre au 21e siècle » avait affirmé le ministre de la Défense, Hervé Morin, lors d’un entretien publié par le quotidien La Tribune, le 14 juin dernier.

Un tel ensemble qui accueillera la population d’une ville moyenne se doit en effet de disposer d’équipements fonctionnels. D’ailleurs, des lycées de 2.000 élèves (*) environ ont leur propre piscine. Il n’y a donc rien de choquant à ce que le Balard-gone ait la sienne.

(*) Comme par exemple le lycée Léonard Limosin à Limoges.

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