Le bâtiment multimissions « Champlain » envoyé à l’Île Maurice pour lutter contre une marée noire
Le 25 juillet, le MV Wakashio, un vraquier appartenant au groupe japonais Nagashiki Shipping Co. Ltd et battant pavillon panaméen, s’est échoué sur un récif à quelques centaines de mètres au large de la pointe d’Esny, au sud-est de l’île de Maurice, avec 200 tonnes de gazole et 3.800 tonnes de fioul dans ses réservoirs.
Pour les autorités mauriciennes, la crainte était évidemment de voir des hydrocarbures s’échapper de la coque du navire… D’autant plus que, pour diverses raisons, il leur fut difficile d’intervenir sur le lieu du naufrage. Ministre de la Pêche, Sudheer Maudhoo a évoqué des problèmes légaux.
« Légalement parlant, nous ne pouvons pas assurer la charge du bateau. Toute une logistique s’avère nécessaire. Aucun Mauricien ne peut s’aviser à monter sur ce bateau », a dit M. Maudhoo, sur les ondes de Wazaa FM. « Effectivement, il y a tout un protocole international à respecter. Ce protocole repose sur le propriétaire du navire et l’assureur. C’est lorsque l’équipe de sauveteurs et le propriétaire signe l’accord qu’ils peuvent mettre le cap sur le lieu du naufrage », a-t-il ajouté.
Quoi qu’il en soit, le 6 août, l’un des réservoirs du MW Wakashio s’est fissuré, répandant une grande partie de son contenu sur les côtes de l’Île Maurice. « Nous sommes dans une situation de crise environnementale », a alerté Kavy Ramano, le ministre mauricien de l’Environnement.
Seulement, Port-Louis n’a pas les moyens nécessaires pour lutter contre une marée noire. C’est ce qu’a admis M. Maudhoo. « C’est la première fois que nous sommes confrontés à une catastrophe pareille et nous ne sommes pas suffisamment équipés pour traiter ce problème », a-t-il dit.
Aussi, l’Île Maurice a sollicité le concours de l’Afrique du Sud ainsi que celui de la France [La Réunion est située à seulement un peu plus de 200 km de la zone du naufrage].
« Le naufrage du Wakashio représente un danger pour l’île Maurice. Notre pays n’a pas les compétences et l’expertise pour le renflouage des navires échoués, c’est ainsi que j’ai sollicité l’aide de la France », a en effet indiqué Pravind Jugnauth, le Premier ministre mauricien, le 7 août.
« Lorsque la biodiversité est en péril, il y a urgence à agir. La France est là. Aux côtés du peuple mauricien. Vous pouvez compter sur notre soutien […]. Nous déployons dès à présent des équipes et du matériel depuis La Réunion », a répondu le président Macron.
Ainsi, dans le cadre du plan POLMAR [pollution maritime] et d’un plan d’urgence régionale, les Forces armées dans la zone sud de l’océan Indien [FAZSOI] ont mobilisé le Bâtiment de soutien et d’assistance outre-Mer [BSAOM] « Champlain » ainsi qu’un avion de transport CASA CN-235 de l’Escadron de Transport 50 pour répondre à cette sollicitation.
Le 8 août, l’appareil de l’armée de l’Air ainsi assuré deux rotations vers l’Île Maurice pour y acheminer 6 tonnes de matériel, dont des barrages flottants. Un officier de liaison de la Marine nationale et le correspondant de la lutte contre une pollution maritime par hydrocarbures de La Réunion ont également pris place à bord, leur mission étant d’apporter une expertise technique et opérationnelle aux autorités mauriciennes.
Puis, le même jour, le Champlain a appareillé de la Pointe-des-Galets avec, à son bord, des pompes, des épurateurs, 400 m de barrage hauturier et des filtres à huile [soit 12 tonnes de matériel, ndlr]
Soutien à l’Ile Maurice. Les @Armees_Gouv se mobilisent pour la protection du littoral.
Un avion militaire (Casa) @Armee_de_lair et le Champlain @MarineNationale sont engagés pour créer des barrages et pomper les hydrocarbures qui polluent depuis le naufrage du bateau Wakashio. https://t.co/6JNfWU0lz6 pic.twitter.com/RtybH9EARk— Florence Parly (@florence_parly) August 8, 2020
« L’idée, c’est de pomper ce qui reste d’hydrocarbure à bord du bâtiment [le MV Wakashio]. On va donc envoyer des pompes et des tuyaux qui vont permettre de faire de l’extraction » ainsi que des « épurateurs » pour « récupérer les hydrocarbures qui ont été à la mer pour les stocker ensuite en vue de leur traitement », a expliqué le capitaine de vaisseau Bruno Sciascia, commandant de la zone maritme des FAZSOI, à la 1ère Réunion.
Le matériel ainsi acheminé sera mis en oeuvre par les Mauriciens. Cependant, et comme il l’a déjà eu l’occasion de le faire lors d’un exercice effectué en décembre dernier, le BSAOM Champlain va déployer un barrage, en fonction des conditions météorologiques.
Cette opération a été planifiée dès que la demande d’assistance de Port-Louis a été adressée à la France.
Pour rappel, dotés d’une capacité de soutien logistique [grue, véhicules, conteneurs, embarcation de servitude], les BSAOM sont de vrais « couteaux suisses ». D’une longueur de 66 mètres pour une largeur de 14 mètres et un déplacement de près de 2.300 tonnes en charge, ces navires sont en mesure d’effectuer des missions de souveraineté [police de pêches, lutte contre les trafics], d’assistance aux populations ou encore, comme c’est le cas avec le Champlain, de lutte contre la polution.
Pour le moment, et les prévisions météorologiques, la Réunion n’est pas concernée par un risque de marée noire.
« Au regard des conditions météorologiques et de courant sur 3 jours, la pollution devrait rester localisée sur les côtes mauriciennes et ne toucherait pas la côte réunionnaise. Il n’y a donc pas de risque à ce stade pour La Réunion », a fait savoir la préfecture, le 7 août.