Libye : Les forces pro-Haftar affirment avoir abattu un drone Reaper italien

En avril dernier, relevant du gouvernement de Tobrouk, issu des élections législatives de juin 2014, l’Armée nationale libyenne [ANL] du maréchal Khalifa Haftar a lancé une offensive en direction de Tripoli, la capitale libyenne étant contrôlée par les troupes du gouvernement d’unité nationale [GNU] conduit par Fayez el-Serraj et formé sous l’égide des Nations unies. Et, depuis, le « front » s’est figé, alors que les combats ont fait plus de 1.000 tués [dont 200 civils] et 128.000 déplacés.

Ayant conduit des opérations contre les organisations jihadistes implantées dans l’est et le sud de la Libye, le maréchal Haftar peut se prévaloir de la bienveillance de la France. Il « fait partie de la solution », avait en effet assuré Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, dans un entretien donné au quotidien « Le Figaro », en mai.

Et le chef du Quai d’Orsay de souligner qu’on trouvait, parmi les forces du GNU, des « miliciens des responsables de hold-up, des spécialistes de la prédation et des jihadistes » ainsi que des « groupes mafieux de passeurs, qui torturent et mettent en esclavage des migrants. » Aussi, « ils ne se battent par pour Sarraj mais pour la protection de leurs activités criminelles », avait-il estimé.

Par ailleurs, le maréchal Haftar peut aussi compter sur le soutien militaire des Émirats arabes unis, de l’Égypte, de la Jordanie [qui lui fournissent des armes] et de la Russie, via la présence de mercenaires russes [ce que Moscou nie].

S’agissant des États-Unis, leur position est ambigüe étant donné que, dans cette affaire, le président Trump fait… du Trump, c’est à dire qu’il prend à contre-pied sa propre administration. En avril, il avait publié un communiqué pour souligner le « rôle significatif du maréchal Haftar dans la lutte contre le terrorisme et la sécurisation des ressources pétrolières de Libye ».

Mais, dénonçant les « tentatives de la Russie d’exploiter le conflit contre la volonté du peuple libyen », le département d’État a récemment appelé le chef militaire libyen à cesser son offensive contre le GNU, jusqu’alors toujours officiellement soutenu par Washington et reconnu par la communauté internationale [par exemple, l’Union européenne forme ses gardes-côtes dans le cadre de la mission EUNAVFOR Sophia].

Ce même GNU, soutenu par des milices proches des Frères musulmans, reçoit l’appui du Qatar et de la Turquie, via des livraisons de matériels militaires.

Dans un rapport, cité par l’AFP et devant être débattu d’ici la fin de ce mois par le Comité de sanctions chargé de la Libye, dénonce ainsi les violations de l’embargo sur les armes, les deux camps rivaux ayant reçu armes et équipements militaires de leurs « parrains ».

C’est donc dans ce contexte que, le 20 novembre, un drone MQ-9 Reaper italien de l’Aeronautica Militare s’est écrasé alors qu’il survolait une région située au nord de Tarhounah, où l’ANL a établi une base arrière, à 50 km au sud-est de Tripoli.

« L’appareil, qui effectuait une mission d’appui à l’opération Mare Sicuro, suivait un plan de vol préalablement communiqué aux autorités libyennes. Des enquêtes sont en cours pour déterminer les causes de l’événement », a sobrement indiqué l’état-major italien.

Lancée en 2015 par Rome, l’opération Mare Sicuro vise notamment à surveiller le trafic maritime commercial en Méditerranée, collecter du renseignement sur les mouvements terroristes et les organisations criminelles, à dissuader les trafics [y compris d’êtres humains] et de protéger les activités économiques italiennes dans la région [pêche, plateformes pétrolières, etc].

L’Aeronautica Militare exploite des drones non armés de type MQ-1C Predator A+ améliorés et MQ-9A Reaper. Ces appareils sont basés à Amendola, dans le sud de l’Italie, ou à Sigonella, en Sicile, aux côtés des RQ-4 Global Hawk américains.

Or, dans la soirée, l’Armée nationale libyenne a indiqué qu’elle avait abattu le drone italien « avec un missile anti-aérien, au nord de Tarhounah ». Il avait été avancé que l’appareil en question était de facture turque. « Nous attendons encore [de Rome] des explications sur les raisons du survol des territoires libyens par ce drone », a ajouté son porte-parole, depuis Benghazi.

D’après le site italien Difesa Online, le MQ-9 Reaper de la 32e escadre de l’Aeronautica Militare, aurait été abattu par un système de défense aérienne Pantsir S1, doté de missiles 57E6 ayant une portée de 5 à 15.000 mètres et de canons 2A42M de 30 mm. Il aurait été « probablement mis en oeuvre par des conseillers de Moscou », écrit-il.

Cependant, il est difficile d’être aussi affirmatif. Sur les photograpies de l’épave diffusée sur les réseaux sociaux, on constate que les ailes du drone sont quasiment intactes, ce qui suggère que sa perte s’explique par une autre raison [problème technique, perte de signal, etc].

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