Le général Lecointre écarte l’idée d’un « dérapage non contrôlé » dans la région du Golfe arabo-persique

Des navires victimes d’attaques mystérieuses pour lesquelles l’Iran est tenu pour responsable par les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Arabie Saoudite, un drone de surveillance abattu par la défense aérienne iranienne, une tentative de saisie d’un pétrolier britannique, un renforcement de posture militaire américaine… Ces dernière semaines ont ainsi été marquées par une montée des tensions dans la région du Golfe arabo-persique, avec, en toile de fond, des contentieux diplomatiques entre Washington et Téhéran qui s’enveniment.

« La situation est très inquiétante et nous voyons que les risques de confrontation directe ont tellement augmenté ces derniers temps qu’il est de plus en plus difficile de prévoir le développement futur des événements », a commenté Sergueï Riabkov, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, ce 11 juillet. Et d’accuser Washington d’en être responsable.

Interrogé, le même jour, à l’antenne de CNEWS, le chef d’état-major des armées [CEMA], le général François Lecointre, n’a pas exactement la même appréciation de la situation.

« Le jeu, pour l’instant, qui est un jeu malgré tout de confrontation de volontés entre les Etats-Unis et l’Iran, est un jeu dont on voit bien qu’il s’alimente de provocations, de postures, de réactions, de signaux qui sont envoyés et qui peuvent d’un jour à l’autre déraper », a d’abord observé le CEMA. Cependant, a-t-il ajouté, « je pense que c’est maîtrisé aujourd’hui. […] Je ne crois pas qu’il puisse y avoir de dérapage non contrôlé mais il peut y avoir une aggravation, une montée aux extrêmes dans cette dialectique des volontés. »

Dans la région, « la France a une présence qui permet au président de la République d’avoir une appréciation autonome et souveraine de la situation », fait valoir le général Lecointre. En clair, l’exécutif français ne dépend pas des informations données par les États-Unis.

« Le président de la République, par ses propres moyens, sait ce qu’il se passe dans le Golfe persique et dans la région. Et ça lui permet d’être d’autant plus crédible quand il essaie de jouer le rôle de médiateur pour faire baisser cette tension », a ensuite expliqué le CEMA.

Pour rappel, le président Macron a envoyé à Téhéran son conseiller diplomatique, Emmanuel Bonne, pour tenter de freiner l’escalade entre les États-Unis et l’Iran, qui, par ailleurs, a décidé de ne plus appliquer certaines dispositions figurant dans l’accord de Vienne relatif à son programme nucléaire et signé avec le groupe 5+1 [les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et l’Allemagne, ndlr]. Accord qu’a par ailleurs dénoncé Washington en mai 2018, avec, à la clé, des sanctions visant l’économie iranienne.

Interrogé sur l’attitude que pourrait avoir la France dans une éventuel conflit dans cette partie du monde, le général Lecointre a indiqué qu’un soutien aux États-Unis n’irait pas forcément de soi.

« De toute façon, la France n’est jamais obligée de suivre un allié dans un conflit. Et elle en a déjà fait la preuve par le passé. […] Et je pense que le président de la République, même s’il rappelle la solidarité importante qui nous lie aux Américains, qui sont nos principaux alliés, garde sa liberté de mouvement et sa liberté de décision », a affirmé le CEMA. À noter que ce dernier n’a pas été invité à se prononcer sur une éventuelle participation à une coalition qui, proposée par Washington, viserait à défendre la liberté de navigation dans les détroits d’Ormuz et de Bab el-Mandeb [un blocus de ce dernier aurait des conséquences non seulement pour la France mais aussi pour l’Europe].

Cela étant, au regard de la conflictualité et de l’arsenalisation du monde, le risque de conflits régionaux [mais « peut-être pas de confrontation généralisée, a dit le général Lecointre] ne cesse de s’accroître. C’est notamment le cas dans la région du Golfe, mais aussi dans celle de l’Asie-Pacifique, plus particulièrement en mer de Chine du Sud. Et là, selon le CEMA, la France pourrait s’y trouver engagée « pour défendre ses intérêts » et/ou « participer à une coalition ».

Photo : Le général Lecointre en visite du central opération de la FDA Chevalier Paul (c) EMA

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