Selon Mme Parly, les récentes frappes françaises contre des rebelles ont évité une déstabilisation du Tchad

En 2013, quand il apparut que la coalition rebelle de la Séléka allait fondre sur Bangui et renverser le pouvoir en place incarné par le président François Bozizé, la France resta l’arme au pied, contrairement aux fois précédentes, comme ce fut le cas, par exemple, en 2007, où une opération aéroportée dans la région de Birao, appuyée par des Mirage F1, avait suffi pour calmer les ardeurs de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement [UFDR].

Seulement, cette décision de ne pas intervenir pour arrêter la colonne rebelle eut plusieurs conséquences, dont l’effondrement de l’État centrafricain et des tensions interethniques et inter-confessionnelles ayant donné lieu à des massacres. Ce qui motiva le lancement de l’opération militaire Sangaris, en décembre 2013, afin d’éviter un bain de sang à Bangui. Depuis, les Nations unies y ont déployé plus de 10.000 Casques Bleus, la situation peine à se stabiliser, avec des flambées ponctuelles de violences, des groupes armés prédateurs exploitent à leur profit les ressources naturelles du pays et la Russie y accroît son influence en usant d’une réthorique anti-française…

Certes, le 6 février dernier, le gouvernement centrafricain et les groupes armés ont signé un huitième accord de paix [depuis 2013] sous l’égide de l’Union africaine. Aussi, la ministre des Armées, Florence Parly, éprouve-t-elle un « optimisme modéré » pour l’avenir de la Centrafrique. Du moins, c’est ce qu’elle a affirmé lors d’une audition devant la commission sénatoriale des Affaires étrangères et des Forces armées.

« Optimisme car l’accord de paix n’était pas acquis d’avance ; modéré parce que, malgré l’initiative de l’Union africaine visant à préserver la formation des troupes de toute ingérence russe, ces derniers restent très présents », a expliqué Mme Parly. « L’Union européenne et la France assurent l’essentiel de la formation des forces centrafricaines et de la fourniture d’armes. Or, la propagande russe fait croire à la population que la formation, l’armement et l’aide au développement économique sont assurés par la Russie! », a-t-elle continué, estimant que, par conséquent, « nous sommes […] engagés dans un combat d’influence. »

Pourquoi rappeler ces éléments? Tout simplement parce que la France ne veut pas que le Tchad connaisse ce type de scénario. D’où les frappes effectuées par des Mirage 2000 au début de ce mois afin de stopper une colonne rebelle qui se dirigeant vers N’Djamena. Quitte à susciter des critiques, y compris au sein de la classe politique française, certains élus ne comprenant pas que l’on puisse soutenir le président tchadien, Idriss Déby Itno, qu’ils qualifient de « dictateur ».

Quoi qu’il en soit, s’agissant du cadre légal de ces frappes, Mme Parly a expliqué que le président Déby avait préalablement demandé à son homologue français, Emmanuel Macron, une assistance militaire dès le 2 février. Et l’Élysée y a donc donné une suite favorable.

« Une cinquantaine de pick-up transportant plusieurs centaines de combattants ainsi qu’un armement lourd faisaient peser un risque de déstabilisation du pays. Or le passé a montré à plusieurs reprises qu’il ne faut jamais négliger le risque d’effondrement brutal que ces groupes armés font peser, à dessein, sur des États que l’on peut qualifier de fragiles », a fait valoir la ministre.

Pour rappel, ces rebelles, par ailleurs membres de l’ethnie du présient Déby, appartenaient à l’Union des forces de résistance [UFR], une organisation mise sous pression en Libye, où elle avait trouvé refuge. « J’ignore les canaux qui leur permettent de se fournir en armes, mais ils résultent certainement de la conjugaison de trafics de drogues, d’armes et d’êtres humains, nombreux dans la région. Le groupe que nous avons visé était extrêmement déterminé et armé », a indiqué la ministre.

Or, le Tchad est une pièce maîtresse dans la lutte contre les groupes armés terroristes sévissant dans la bande sahélo-saharienne. Il est « au carrefour de crises majeures qui, quasiment toutes, nous concernent très directement », a rappelé Mme Parly. Aussi, a-t-elle continué, si ce pays « entrait en guerre civile, les tensions nationales agiraient comme un catalyseur des conflits environnants, et nous prendrions le risque que, par un effet domino, tous prennent une ampleur sans précédent. »

« Conforme au droit international, cette intervention est en outre légitime, parce que, en répondant à une urgence ponctuelle, nous avons préservé un allié absolument majeur dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, un allié engagé au sein de la Minusma et de la force conjointe du G5 Sahel, mais aussi dans la lutte contre Boko Haram », a encore plaidé la ministre. « Nous avons ainsi évité que l’un des seuls pays de la zone qui contribuent véritablement à la sécurité régionale ne soit déstabilisé. Alors que cette région souffre de la fragilité de nombreux États, en voir la liste s’allonger est la dernière chose dont nous ayons besoin », a-t-elle insisté.

Enfin, Mme Parly soutient également que cette intervention était « juste » car « notre soutien va de pair avec notre souhait de voir les autorités locales mener les réformes politiques et économiques nécessaires au renforcement des institutions du pays, à l’ouverture de l’espace politique et au retour sur le chemin de la croissance et du développement. »

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