Les députés ont adopté le budget des armées pour 2019 par 61 voix contre 3

« La défense! C’est la première raison d’être de l’État. Il n’y peut manquer sans se détruire lui-même », avait lancé le général de Gaulle, lors d’un discours prononcé à Bayeux en 1952. Pour autant, le 2 novembre, à l’Assemblée nationale, beaucoup de députés devaient avoir mieux à faire que d’assister aux débats portant sur les crédits que prévoit d’allouer le projet de loi de finances 2019 au ministère des Armées… puisque seulement 75 d’entre-eux [sur 577] ont pris part au vote ayant conclu la discussion. (Cela étant, le travail parlementaire étant ainsi organisé, il n’y a là rien de bien surprenant : le budget de la Justice, par exemple, ayant réuni encore moins de députés dans l’Hémicycle)

Sans surprise, le budget du ministère des Armées pour 2019, d’un montant de 35,9 milliards d’euros [en hausse de 5% par rapport celui de 2018, soit +1,7 milliard], a largement été adopté, avec 61 voix contre 3 [sur 64 suffrages exprimés].

« Cette adoption très large est un signal fort pour nos Armées, celui de la remontée en puissance », a salué Florence Parly, la ministre des Armées. Dans l’Hémicycle, elle avait évoqué un « budget de reconquête, qui nous place parfaitement sur la trajectoire prévue de consacrer 2% de notre PIB à la défense d’ici 2025 » contre 1,82% l’an prochain.

Fort de son expérience, le député François Cornut-Gentille [LR], rapporteur spécial de la commission des Finances, a appelé à la « vigilance ». « Nul ne peut nier que l’effort est significatif, mais le passé nous apprend que toutes les premières annuités budgétaires de LPM respectaient les lois de programmation, les difficultés n’intervenant que plus tard », a-t-il souligné.

Par ailleurs, lors des débats, plusieurs amendements ont été discutés. Le n°631, défendu par le député Jean-Jacques Ferrara [LR], portait sur le remplacement de l’un des deux hélicoptères Caracal perdus en opération au cours de ces dernières années. Normalement, un nouvel appareil aurait dû être commandé l’an passé. La coupe budgétaire de juillet 2017 ayant contrarié ce projet, la commande avait été reprogrammée pour 2018. Seulement, elle n’a toujours pas été notifiée.

D’où cet amendement. « Je vous sais convaincue de l’utilité de cet hélicoptère employé par nos forces spéciales au Sahel, en particulier, où elles sont de plus en plus engagées. […] Je sais que vous menez d’âpres discussions avec Bercy mais, s’il vous plaît, n’attendons pas un dégel budgétaire pour être à la hauteur des engagements de nos forces en opérations extérieures. Prenons une décision, renouvelons cet hélicoptère », a plaidé M. Ferrara en s’adressant à la ministre.

« J’avais pris en effet l’engagement, que je réitère, d’étudier le moyen, dans le cadre de la gestion et non en modifiant les crédits proposés en loi de finances initiale, de remplacer l’hélicoptère détruit en 2014 », a répondu cette dernière. Pour autant, le remplacement de ce Caracal ne semble pas prioritaire à ses yeux.

« N’oubliez pas tous les efforts consentis […] pour renforcer l’ensemble des moyens des forces spéciales. Par ailleurs, le programme de rétrofit des hélicoptères Caracal prendra fin au second semestre 2019, ce qui améliorera la disponibilité de cette flotte.
Enfin, le programme d’adaptation des 10 NH- 90 au profit des forces spéciales, prévu par la loi de programmation militaire, contribuera à améliorer la situation », a expliqué Mme Parly, avant de demander un « tout petit peu de patience ».

Cex explications n’ont pas convaincu M. Ferrara, ni, apparemment son collègue Jean-Charles Larsonneur [LaREM]. « L’adaptation des NH90 ne concerne que les hélicoptères de l’armée de Terre. De plus, certaines spécificités du Caracal ne seront pas disponibles sur ces NH90 adaptés. Ainsi du ravitaillement, qui permet de franchir la limite des 200 kilomètres – le Caracal peut intervenir au Maghreb depuis la métropole – ou pilote automatique en cas de ‘poser poussière’, une possibilité que le NH90 n’offrira jamais », a-t-il souligné.

Cela étant, comme l’a rappelé Jean-Jacques Bridey [LaREM], le président de la commission de la Défense, personne (ou presque) ne conteste la nécessité de remplacer ce Caracal. Seulement, l’amendement de M. Ferrara n’étant pas gagé financièrement [il faudrait 40 millions d’euros], il s’y est opposé.

« Vous gagez votre amendement, qui représente 40 millions d’euros, sur le budget de la défense. Et là, je ne suis plus d’accord! Ce n’est donc pas contre Bercy que vous vous battez. Vous demandez aux députés d’opérer un choix alors que les chefs d’état-major ont proposé des équilibres, et que Mme la ministre a pris les décisions. Cela, nous ne pouvons pas l’accepter », a fait valoir M. Bridey.

« Sur un budget de 15 milliards d’euros, il serait sans doute possible de trouver 40 millions pour assurer le remplacement des Caracal. Mais d’autres arbitrages ont eu lieu. J’entends Mme la ministre nous assurer qu’elle est consciente de l’urgence. J’entends aussi que la disponibilité des différents hélicoptères sera améliorée. Allons dans ce sens : c’est l’esprit de la Loi de programmation militaire, comme de celui du projet de loi de finances pour 2019 », a conclu le président de la commission de la Défense.

Et, finalement, le remplacement de ce Caracal, destiné à l’Escadron d’hélicoptère 1/67 Pyrénées de l’armée de l’Air, attendra… À moins que les sénateurs fassent rebondir le débat quand ils examineront les crédits de la mission Défense pour 2019.

Par ailleurs, il avait annoncé et il l’a fait. Le député Thomas Gassilloud [LaREM] a déposé l’amendement n°662 visant à remplacer la tenue de sport de l’armée de Terre. Un sujet qui tient particulièrement à coeur le chef d’état-major de cette dernière, le général Jean-Pierre Bosser.

« Je souligne un impératif : nous devons gagner la bataille de la fidélisation, sous peine de rendre inutiles les investissements consentis pour la formation et l’entraînement des jeunes recrues de la force opérationnelle. […] La durée moyenne du contrat d’un engagé volontaire est aujourd’hui de quatre ans et demi ; nous souhaiterions qu’elle atteigne huit ans. Or la formation coûte cher – au moins, d’après nos calculs, cent fois plus qu’une tenue. […] La LPM fait beaucoup pour gagner cette bataille de la fidélisation » mais « le projet de renouvellement des tenues de sport apporte un complément – clef en main –, modeste mais symbolique, à ces actions », a souligné M. Gassilloud.

Finalement, le député du Rhône a retiré son amendement après la réponse de Mme Parly. « Nul ici ne conteste l’intérêt de votre amendement […] ni la réalité du besoin qu’il vise à satisfaire : l’habillement du personnel est important pour la qualité du travail, mais aussi pour la sécurité en opération. C’est pour cette raison que nous avons prévu d’allouer 234 millions d’euros à l’habillement dans les armées », a-t-elle rétorqué.

« Nous avons choisi de donner la priorité à la sécurité des combattants et à leur protection. […] Tous ces équipements sont très attendus de nos militaires, car ils peuvent sauver des vies. Je ne suis pas insensible pour autant à la question des tenues de sport. Nous allons chercher des solutions. Mais vous comprendrez […] que nous ne pouvons pas résoudre tous les problèmes en même temps. Nous devons donner la priorité à certains », a ajouté la ministre, qui toutefois pris l’engagement d’apporter une « réponse à cette question dès que possible. »

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