Spécialistes de l’armement terrestre, le français Nexter et l’allemand Krauss-Maffei Wegmann scellent leur rapprochement
Annoncée l’an passé à pareille époque, le rapprochement entre le français Nexter et l’allemand Krauss-Maffei Wegmann (KMW) ont fait un pas de plus vers leur fusion avec la signature, ce 29 juillet, de l’accord scellant leur rapprochement. Et cela alors que la loi Macron, qui prévoit la privatisation du constructeur du char Leclerc et du VBCI, doit encore être examinée par le Conseil constitutionnel avant sa publication au Journal Officiel.
Ce rapprochement passe donc par la création, d’ici le 1er janvier 2016, d’une société holding qui, détenue à parité par l’État français, via GIAT Industries, et la famille Bode-Wegmann, propriétaire de KMW, aura son siège aux Pays-Bas. Le nouvel ensemble pèsera ainsi près de 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel et 9 milliards de prises de commande, ce qui en fera l’un des chefs de file de l’armement terrestre , derrière le britannique BAE Systems et l’américain General Dynamics.
Pour le moment, les sites de production des deux groupes seront conservés. Le rapprochement vise d’abord à mutualiser et à rationaliser la recherche et le développement, à regrouper les achats et à mettre en commun les réseaux d’exportation. En outre, Nexter et KMW conserveront leurs marques et resteront indépendants sur le plan juridique.
Quant à une éventuelle fusion, elle n’en sera pas question avant 5 ans et à condition que tout se passe bien. Il a fallu batailler ferme pour que ce rapprochement puisse devenir réalité. En Allemagne, le ministre de l’Économie, Sigmar Gabriel, était en effet plutôt favorable à une fusion entre KMW et Rheinmetall, l’autre champion allemand de l’armement terrestre.
En outre, la valorisation de Nexter est plus importante que celle de son désormais ex-concurrent d’outre-Rhin, ce qui a posé des problèmes pour arriver à la parité 50-50 au sein de la holding, qui, au passage, n’a pas encore de nom (elle pourrait conserver celui de KANT – KMW and Nexter Together, qui lui avait été donné au moment de l’annonce de cette opération).
« Les discussions entre Nexter et KMW ont actuellement lieu. Elles sont un peu compliquées, du fait d’une compétition sur certains carnets de commandes. La doctrine est claire : on doit être à 50-50 à l’arrivée. Il faudra faire en sorte que ce soit le cas. On y parviendra; pour ce faire, on réalisera les ajustements de trésorerie nécessaires dans les deux camps », avait expliqué, en octobre dernier, Laurent Collet-Billon, le délégué général à l’armement.
Enfin, un autre écueil concerne la politique allemande – très restrictive, du moins quand ça l’arrange – en matière d’exportation d’armements. « On n’ira pas plus loin dans cette aventure si on n’a pas purgé ce sujet » avec le gouvernement allemand, avait d’ailleurs lancé, en décembre, Emmanuel Macron, le ministre de l’Économie.
Ce rapprochement entre les deux industriels de l’armement terrestre suscite aussi des inquiétudes chez les syndicats, lesquels ne se sont pas privés de les exprimer lors du dernier comité central d’entreprise de Nexter. Pour la CFDT, les détails du projet ne permettent pas de « mesurer les conséquences du rapprochement en terme de pérennité des sites et des emplois chez Nexter ». Et de déplorer que les « aspects sociaux ne sont pas la priorité de ce projet ».
Quant à la CGT, qui s’oppose à cette opération, elle a fait valoir que ce projet répond à « des considérations politiques plus qu’à une réalité industrielle » et qu’il n’apporte « aucune garantie pour l’emploi ». Le syndicat estime également que ce rapprochement est un « pas de plus vers l’inconnue » et qu’il « poursuit le désengagement de l’État dans son outil de défense ».