Comme pour la Libye, BHL réclame des bombardements ciblés en Syrie

« Bernard-Henri Lévy a-t-il été le Malraux de la Libye, et plus encore peut-être ? Est-il le descendant de Lawrence d’Arabie? Arthur Rimbaud? Est-il un héros de digne de Joseph Conrad? Ou de Henri de Monfreid? Ou de T.C. Boyle? Est-il ce personnage, le même finalement, que l’on croise dans « La condition humaine », « Les Sept piliers de la sagesse », « Nostromo », « Les Secrets de la mer rouge » et « Water Music »? Sans doute, oui » écrit, le plus sérieusement du monde, Bruno Roger-Petit, chroniqueur politique au Nouvel Observateur.

N’en jetez plus, la cour est pleine serait-on tenté de répondre. Et Bruno Roger-Petit devrait revoir ses classiques, si tant est qu’il les ait déjà lus : les Rimbaud, Monfreid et Lawrence d’Arabie ont le point commun d’avoir été désargentés et en opposition avec les autorités de leur époque, quand ces dernières ne manquèrent pas à leur parole. D’où leur méfiance à leur égard, voire leur défiance.

Ce qui est loin d’être le cas de Bernard-Henri Lévy, qui sait jouer de son entregent pour des causes que l’on peut trouver louables et justes (et que d’autres critiqueront), quitte à monter un film de ses aventures par la suite, comme il l’a fait avec Bosna! en 1994 ou plus récemment « Le serment de Tobrouk », qui, présenté lors du dernier festival de Cannes, relate la chute du régime du colonel Kadhafi en Libye.

Toujours est-il que, à l’instar de son implication dans l’affaire libyenne, Bernard-Henri Lévy vient d’appeler le président Hollande à prendre l’initiative sur le dossier syrien et à défendre, devant le Conseil de sécurité des Nations unies, une politique visant à autoriser des frappes ciblées en Syrie, contre le régime de Bachar el-Assad. Ces bombardements sont d’ailleurs une demande constante de l’opposition armée syrienne.

« La France fera-t-elle, pour Houla et Homs, ce qu’elle a fait pour Benghazi et Misrata? » demande le philosophe, dans une lettre ouverte qui sera publiée le 30 mai par la presse américaine et européenne.

« Userez-vous de votre crédit personnel considérable, et de celui de notre pays, pour revenir vers nos alliés d’hier et, avec eux, avec la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, la Ligue arabe, la Turquie, décider d’une stratégie allant au-delà du ‘soutien sans faille à la mission Annan' », poursuit encore BHL, qui demande au président Hollande s’il était plus urgent de « préparer le retrait anticipé » des troupes (combattantes) françaises d’Afghanistan ou de « prendre l’initiative en Syrie »?

« Qu’est-ce qui est le plus important -annoncer la réduction du salaire de vos ministres et le gel du prix des carburants ou introduire au Conseil de sécurité une résolution autorisant le bombardement des tanks positionnés à l’extérieur des villes, en position de tir? », écrit-il encore.

Lors de la campagne de la dernière élection présidentielle, le 20 avril, à l’antenne d’Europe1, le candidat François Hollande avait affirmé, en cas de victoire, que la France « participerait » à une intervention militaire en Syrie à la condition qu’elle se fasse « dans le cadre de l’ONU » pour « protéger les civils ».

Cette lettre ouverte de BHL va paraître alors qu’au moins 108 personnes ont été tuées à Houla, en Syrie, le 25 mai. « Ce qui est très clair, c’est que ce fut un événement absolument abominable qui a eu lieu à Houla, et au moins une partie substantielle (…) étaient des exécutions sommaires de civils, y compris de femmes et d’enfants », a dénoncé Rupert Colville à Genève, le porte-parole du Haut commissariat de l’ONU aux droits de l’homme. « À ce stade, il semble que des familles entières ont été tuées dans leurs maisons », a-t-il ajouté.

Le régime de Bachar el-Assad fait l’objet d’une vive constestation depuis maintenant plus de 14 mois. Malgré l’adoption du plan Annan, qui prévoit un cessez-le-feu et le déploiement d’observateurs des Nations unies, les violences n’ont pas cessé. Pire même, le conflit déborde des frontières syriennes, avec plusieurs incidents au Liban.

Ainsi, le 12 mai dernier, l’arrestation d’un islamiste proche de la rébellion syrienne a provoqué des accrochages à Tripoli entre sunnites anti-Assad et aloaouites pro-syriens. Pour Damas, qui compte sur le Hezbollah à Beyrouth, il n’est pas question que le nord du Liban devienne une base de soutien et de repli pour les opposants au régime de Bachar el-Assad. D’où des tensions qui risquent de devenir de plus en plus fortes.

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