Minsk s’attire les foudres de l’UE et de l’Otan après avoir intercepté un vol civil afin d’arrêter un opposant

La liaison Athènes-Vilnius que devait assurer un Boeing B-737 de la compagnie aérienne Ryanair, le 23 mai, aurait dû être sans histoire… Sauf que l’avion de ligne a été forcé à atterrir à Minsk par un MiG-29 « Fulcrum » de la force aérienne biélorusse.

Officiellement, ce « détournement » aurait été décidé à cause de la présence présumée d’une bombe à bord de l’avion. Mais la fouille de ce dernier, sur le tarmac de l’aéroport de Minsk, n’aura rien donné… Le B-737 a pu ensuite redécoller pour rejoindre Vilnius… mais avec un passager en moins.

En effet, ancien rédacteur du média d’opposition Nexta, Roman Protassevitch, 26 ans, a été interpellé par les services de sécurité [KGB] dès que l’avion de Ryanair s’est posé à Minsk. Ayant le statut de réfugié politique en Lituanie, ce journaliste avait en effet été inscrit sur la liste des « individus impliqués dans des activités terroristes » après la contestation de la réélection, dans des conditions controversées, d’Alexandre Loukachenko, président de la Biélorussie depuis 1994. D’après son service de presse, c’est lui qui a personnellement donné l’ordre d’intercepter le B-737 de Ryanair.

Ce détournement d’un vol commercial dans l’espace aérien biélorusse afin d’interpeller un opposant au régime a été immédiatement condamné par plusieurs pays membres de l’Union européenne [UE] et/ou de l’Otan.

Ainsi, le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a dénoncé un « acte de terrorisme d’État » et demandé au président du Conseil européen, Charles Michel, que des « sanctions immédiates » contre Minsk soient au menu du sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’UE qui doit s’ouvrir ce 24 mai. Ce qui sera effectivement le cas.

C’est un « acte abject », a fustigé Gitanas Nauseda, le président de la Lituanie. « J’exige la libération d’urgence de Roman Protassevitch! », a-t-il continué, avanr d’en appeler l’Otan et l’UE à « immédiatement réagir à la menace qu’a fait courir le régime biélorusse à l’aviation civile internationale. »

« Nous avons besoin d’une explication immédiate de la part du gouvernement du Bélarus sur le déroutage, à l’intérieur de l’Union européenne, d’un vol Ryanair vers Minsk et l’arrestation supposée d’un journaliste », a réagi un Miguel Berger, un haut responsable du ministère allemand des Affaires étrangères.

« Le détournement par les autorités biélorusses d’un vol de Ryanair est inacceptable. Une réponse ferme et unie des Européens est indispensable », a commenté Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères.

Les États-Unis « condamnent fermement le détournement forcé d’un vol entre deux États membres de l’UE, et l’exfiltration puis l’arrestation qui ont suivi du journaliste Roman Protassevitch à Minsk. Nous exigeons sa libération immédiate », a déclaré Antony Blinken, le chef de la diplomatie américaine.

De son côté, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a parlé d’un « incident sérieux et dangereux, qui nécessite une enquête internationale. » Le Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, est sur la même longueur d’onde, ce dernier ayant également demandé à ce une enquête pour « vérifier toute violation des règles de l’aviation internationale ».

Cela étant, ce n’est pas la première fois qu’un avion civil est ainsi détourné… En octobre 1956, l’armée de l’Air française avait intercepté et détourné un DC-3 d’Air Atlas – Air Maroc, à bord duquel étaient censés voyager – sous une fausse identité – cinq cadres de haut rang du FLN, le mouvement indépendantiste algérien. Si cette opération donna lieu à des complications diplomatiques, elle était cependant légale : si l’avion appartenait à une compagnie marocaine, il était immatriculé… en France. Or, c’est l’immatriculation qui détermine la nationalité d’un aéronef.

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