L’US Air Force a confié une étude à Hermeus pour un concept d’avion hypersonique

Visiblement en retard par rapport à la Russie et à la Chine dans la mise au point d’armes hypersoniques bien que partis en avance, les États-Unis ont lancé plusieurs projets dans ce domaine. En mars dernier, le Pentagone a annoncé l’essai réussi du Common Hypersonic Glide Body [C-HGB], un planeur qui, pouvant voler à une vitesse supérieure à Mach 5, sera commun aux trois branches principales des forces américaines.

Mais les recherches concernant le vol hypersonique ne concernent pas seulement les armes. Le 6 août, Hermeus, une « start-up » spécialiste des technologies aérospatiales, a indiqué qu’elle venait d’obtenir, via AFWERX, l’incubateur technologique de l’US Air Force, un contrat de 1,5 millions de dollars pour mener une étude de concept portant sur la mise au point d’un avion hypersonique.

Devant transporter entre 9 et 19 passagers, un tel appareil serait mis en oeuvre par la Direction du transport aérien présidentiel et gouvernemental de l’US Air Force. En clair, il s’agirait de remplacer les Gulfstream de la flotte présidentielle par un avion pouvant assurer une liaison entre les États-Unis et l’Europe en 90 minutes.

Cela étant, si une telle prouesse est effectivement dans les cordes de Hermeus, on peut aisément imaginer que le Pentagone trouvera d’autres applications à cette technologie… comme un successeur du SR-71 Blackbird, l’avion espion qui, capable de voler à la vitesse de Mach 3, a été retiré du service en 1998.

D’ailleurs, en janvier 2018, à l’occasion du forum « American Institute of Aeronautics and Astronautics SciTech », organisé à Orlando [Floride], Boeing avait présenté un tel concept, appelé « Son-Of-Blackbird ». L’idée était alors d’utiliser un turboréacteur pour atteindre la vitesse de Mach 3, puis ensuite un [super]statoréacteur pour voler en régime hypersonique. Pour cela, l’industriel pouvait alors se reposer sur les travaux réalisés lors de la conception du X-51A Waverider, un prototype d’aéronef sans pilote qui, lors de ses essais, a pu approcher la vitesse de Mach 6… mais pendant seulement quelques minutes.

Créée en 2018 à Atlanta [Géorgie], avec le « soutien du capital risque » et d’ingénieurs ayant travaillé chez Generation Orbit, SpaceX et Blue Origin, Hermeus reprend peu ou prou le concept avancé par Boeing. Dans une vidéo publiée en mars 2019, Skyler Shuford, le directeur d’exploitation de l’entreprise, a expliqué qu’il s’agirait de s’appuyer sur des technologies et des matériaux existants déjà. « Nous n’entreprenons rien de miraculeux, nous voulons faire de l’ingénierie, pas de la science », a-t-il dit.

Apparemment, une telle démarche semble efficace car, dans son communiqué annonçant le contrat avec l’US Air Force, Hermeus assure qu’il a déjà testé avec succès un moteur à cycle combiné permettant le vol hypersonique.

« En utilisant notre technologie de pré-refroidissement, nous avons pris un moteur à turbine à gaz standard et l’avons fait fonctionner à des conditions de vitesse de vol plus rapides que le célèbre SR-71 », a déclaré Glenn Case, directeur de la technologie chez Hermeus. Ensuite, « nous avons poussé le mode statoréacteur aux conditions de Mach 4-5, démontrant une capacité de propulsion hypersonique aérobie », a-t-il ajouté.

Initialement, l’ambition de la start-up était d’ouvrir la voie à des vols commerciaux hypersoniques. Ce qui, au moment où elle fit cette annonce, devait exiger au moins une dizaine d’années de travail. Qu’en sera-t-il pour le projet de l’US Air Force?

D’autres entreprises ont des projets similaires. Des grands noms du secteur, comme Boeing et Lockheed-Martin, mais aussi d’autres « start-ups », comme Boom, une « jeune pousse » implantée dans le Colorado, soutenue par Virgin Galactic et l’astronaute Mark Kelly. Mais les résultats les plus prometteurs sont ceux obtenus par le britannique Reaction Engines, dont le moteur SABRE [Synergetic Air-Breathing Rocket Engine], susceptible de révolutionner à la fois à la fois l’accès à l’espace et le vol à grande vitesse.

Par ailleurs, en France, l’Office national d’études et de recherches aérospatiales [ONERA] a fait part de son intention de mener des travaux visant à mettre au point un « aéronef de combat hypersonique » devant « s’entendre au sens large d’aéronef militaire » et pouvant « s’étendre à toute mission d’intérêt militaire. »

Photos : Hermeus

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