Syrie : Des obus turcs sont tombés près d’une base des forces spéciales américaines à Kobané

Théâtre d’une bataille qui opposa les milices kurdes syriennes [YPG] à l’État islamique [EI ou Daesh] pendant plus de 4 mois, en 2014, la ville de Kobané n’est théoriquement pas concernée par l’offensive lancée par la Turquie dans le nord de la Syrie. D’ailleurs, les forces spéciales américaines qui ont abandonné leurs positions alors situées dans la zone des opérations turques après la décision du président Trump de laisser le champ libre à son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, y ont maintenu une base.

Or, dans la soirée du 11 octobre, cette dernière a néanmoins été visée par des tirs d’artillerie turcs. L’information a été donnée par Newsweek, qui a cité un haut responsable du Pentagone. « Les tirs des forces turques étaient si intense que les militaires américains ont envisagé de riposter en légitime défense », a-t-il confié.

Plus tard, un porte-parole du Pentagone, le capitaine de vaisseau Brook DeWalt, a confirmé des tirs près de la position américaine mais pas leur intensité. Ainsi, a-t-il dit, une « explosion » s’est produite « quelques centaines de mètres […] d’une zone connue par les Turcs comme abritant des forces américaines. »

« Les États-Unis s’opposent particulièrement aux opérations turques en dehors de la zone du mécanisme de sécurité et dans les zones où les Turcs savent que les forces américaines sont présentes », a continué l’officier. « Les États-Unis exigent que la Turquie évite les actions qui pourraient conduire à une action défensive immédiate », a-t-il prévenu.

Le ministère turc de la Défense a expliqué que ses troupes avaient riposté à des tirs de mortier ayant visé des postes frontaliers situés au sud de Suruç, depuis une position tenue a priori par les YPG à 1 kilomètres du poste américain. « Toutes les précautions ont été prises avant d’ouvrir le feu afin d’éviter tout dommage à la base américaine », a-t-il assuré.

Quoi qu’il en soit, le général Mark Milley, le nouveau chef d’état-major interarmées américain, a lancé un avertissement aux forces turques. « Ils [les Turcs] disposent des coordonnées détaillées, ils savent exactement où sont nos positions », a-t-il souligné lors d’une conférence de presse. Et d’ajouter : « Nous conservons le droit de légitime défense. C’est clair et sans ambiguïté ».

Par ailleurs, le chef du Pentagone, Mark Esper, a affirmé les États-Unis sont « très déçus » par l’opération turquie, à laquelle ils sont également « opposés », car elle met « nos partenaires des FDS [Forces démocratiques syriennes, dont les YPG font partie] dans une situation difficile ». Et d’insister : « Nous n’abandonnons pas » notre partenariat avec les FDS, malgré « l’action impulsive » de la Turquie.

Reste que si le président Trump n’avait pas ordonné le retrait des forces spéciales américaines des localités de Tal Abyad et de Ras al-Aïn, l’opération turque, appelée « Source de paix », n’aurait probablement pas été lancée…

Cela étant, au Conseil de sécurité des Nations unies, cinq pays européens [France, Allemagne, Royaume-Uni, Pologne et Belgique], ont échoué, le 10 octobre, à faire adopter une déclaration appelant la Turquie à cesser son offensive. Et cela parce que les États-Unis, et la Chine [la Russie est restée « muette »] ont refusé de condamner l’opération lancée par M. Erdogan.

Plus tard, les États-Unis ont ensuite été à la manoeuvre pour faire adopter une autre déclaration demandant seulement à Ankara de privilégier les canaux diplomatiques plutôt que d’user de moyens militaires.

Mais plusieurs États membres, rapporte l’AFP, ont durci ce texte pour souligner la « profonde préoccupation » [du Conseil de sécurité] face à l’offensive turque et à ses « ses implications, notamment dans leurs dimensions humanitaire et sécuritaire. »

Ce projet de déclaration exigeait également la protection des civils et un accès humanitaire « durable », tout en mettant en garde contre une résurgence de l’État islamique dans le nord de la Syrie. Enfin, il soulignait que l’objectif de la Turquie d’instler des réfugiés syriens dans la zone de sécurité qu’elle entend instaurer ne pouvait se faire que sur une base volontaire.

Seulement, ce projet de texte a connu le même sort que la premier, en raison de l’opposition de la Russie et de la Chine. A priori, la délégation russe auprès des Nations unies aurait demandé plus de temps pour consulter Moscou avant de se prononcer. Ce qui ne lui aurait pas été accordé.

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