Le mandat de la mission des Nations unies en Centrafrique prolongé d’un mois seulement

Normalement, le 15 novembre, le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation de la République centrafricaine [MINUSCA] aurait dû être prolongé d’un an supplémentaire par le Conseil de sécurité de l’ONU. Mais c’était sans compter sur les différends entre Paris et Moscou au sujet de ce dossier.

Depuis qu’elle a été autorisée à livrer à Bangui, l’an passé, la Russie a cherché à renforcer significativement son influence à Bangui, avec la présence de 170 instructeurs militaires « civils », lesquels ne se contentent pas de seulement faire de la formation puisque, selon un rapport du groupe d’experts des Nations unies, ils escorteraient des convois et fourniraient un « appui opérationnel » aux Forces armées centrafricaines [FACa] face aux groupes armés qui sévissent encore dans le pays.

Ces derniers mois, Moscou et Bangui ont par ailleurs convenu de renforcer leurs relations militaires et la partie russe a obtenu de la part de son homologue centrafricaine des contrats de prospection ainsi que des concessions minières pour ses entreprises, dont Lobaye Invest, une filiale d’un groupe fondé par un proche de M. Poutine, à savoir Evguéni Prigojine, également actionnaire de la société militaire privée [SMP] Wagner, dont la présence à Sibut a été évoquée durant l’été dernier après l’assassinat de trois journalistes russes qui enquêtaient sur ses activités en Centrafrique.

Dans le même temps, la Russie a lancé sa propre médiation entre les autorités centrafricaines et les groupes armés, pour la plupart issus de l’ex-rébellion rebelle de la Séléka, à Khartoum [Soudan]. Une démarche critiquée par la France.

« Je ne connais qu’une seule initiative : celle des Africains eux-mêmes. Je ne connais qu’un seul interlocuteur, c’est l’Union africaine. […] Alors, si la Russie a pensé utile de faire autre chose, il faut qu’elle le dise publiquement et qu’elle le dise à l’Union africaine et aux Nations unies. Elle ne l’a pas fait à ma connaissance. Donc, ça n’existe pas », avait ainsi affirmé Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, lors d’un voyage à Bangui, où il annonça la livraison de 1.400 fusils d’assaut aux FACa ainsi qu’une aide de 24 millions d’euros pour payer les fonctionnaires centrafricains et financer des projets de développement.

« La Centrafrique n’est pas un terrain de jeu. Ce n’est pas un terrain de compétition. Le seul sujet qui doit préoccuper ceux qui veulent s’occuper de Centrafrique, c’est […] la sécurité de ce pays et son développement, et non pas utiliser potentiellement les difficultés de ce peuple et de ce pays pour s’implanter dans un continent où il y aurait des ambitions voilées », avait également dénoncé le chef de la diplomatie française.

À l’occasion du renouvellement du mandat de la MINUSCA, la France souhaitait faire adopter une résolution visant à renforcer l’appui des Casques bleus aux forces centrafricaines et à préciser que l’initiative de l’Union africaine [UA] devait être le « seul cadre » possible pour trouver un accord de paix en Centrafrique.

Évidemment, la Russie s’y est opposée. « C’est une espèce de jalousie que nous sommes en train de voir. […] Les efforts déployés à Khartoum ne contredisent pas l’initiative africaine », avait valoir auprès de l’AFP, Dmitry Polyanskiy, l’ambassadeur adjoint de la Russie à l’ONU. « Nous n’aimons pas le projet actuel », avait-il insisté.

D’où l’adoption d’une courte résolution, le 15 novembre, afin de prolonger le mandant de la MINUSCA pour un mois de plus seulement. Selon la partie française, cette « prolongation technique » répond à la demande de l’un des membres du Conseil de sécurité, lequel doit « effectuer les démarches requises par sa législation interne pour pouvoir voter le projet de résolution discuté au cours des dernières semaines. »

Cette demande a été faite par les États-Unis puisque ces derniers ont remercié la France de leur avoir accordé « ce délai supplémentaire », tout en « se réjouissant d’œuvrer à l’élaboration de ce nouveau mandat. »

La France souhaitait inclure dans son projet de résolution initial « un certain nombre d’éléments importants pour le soutien que la MINUSCA pourrait apporter aux autorités centrafricaines dans leurs efforts en faveur de la paix et de la réconciliation dans le pays ».

Mais la diplomatie américaine y aurait été réticente étant donné que sa priorité est de chercher à rationaliser et à rendre plus efficaces les opérations de maintien de la paix [OMP] de l’ONU.
Aussi, pour Washington, selon des explications données par des diplomates à l’AFP, « tout soutien logistique fourni par la MINUSCA ne devrait pas entraîner de dépenses supplémentaires. »

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