La Russie va accélérer la livraison du système de défense aérienne S-400 Triumph à la Turquie

Si ses intentions dans le domaine des systèmes de défense aérienne sont plutôt floues, la Turquie a toujours la ferme intention de se doter de quatre batteries S-400 Triumph auprès de la Russie. Ainsi, en décembre, les modalités du contrat, d’un montant de 2,1 milliards d’euros, furent dévoilées.

Dans le détail, il était prévu de livrer les deux premiers systèmes S-400 aux forces turques au cours d’un premier trimestre 2020. Ils « seront utilisés de manière indépendante par des personnels turcs, et non par des conseillers russes », avait expliqué le sous-secrétariat turc pour les industries de défense. Quant au financement, et selon le président Erdogan, la Turquie devait verser 45% de la somme en à-valoir à la Russie, les 55% restants étant couverts par un prêt accordé par Moscou. « Nous n’emprunterons pas en dollars, nous emprunterons en roubles », avait-il précisé.

Lors d’une visite à Ankara, le 3 avril, pour lancer la construction de la première centrale nucléaire turque par Rosatom, le président russe, Vladimir Poutine, a annoncé une accélération du calendrier initialement prévu dans le cadre de ce contrat.

« Nous avons discuté la réalisation du contrat pour la livraison des S-400. Et nous avons pris la décision d’accélérer la livraison de ces systèmes de défense », a en effet affirmé M. Poutine, lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue turc.

Plus tard, le sous-secrétaire turc aux Industries de Défense, Ismail Demir, a donné plus de détails.  » La date du début des livraisons des systèmes de missiles antiaériens S-400 dans le cadre de l’accord signé avec la Russie a été avancée et est désormais prévue pour juillet 2019″, a-t-il annoncé.

Seulement, le S-400 Triumph n’est pas compatible avec les systèmes utilisés par l’Otan, dont la Turquie est membre depuis 1952, comme le fut le Hongqi-9/FD 2000 chinois qu’avait initialement choisi Ankara dans le cadre d’un appel d’offres. D’ailleurs, la communication russe autour de ce système de défense aérienne ne souffre d’aucune ambiguïté.

Ainsi, via Sputnik, une infographie résumant les capacités du S-400 Triumph (ou SA-21 Growler pour l’Otan) précise qu’il est en mesure d’abattre tous les avions américains, du bombardier furtif B-2 Spirit à l’avion radar E-3 Sentry, en passant par le U-2. Même les appareils retirés du service depuis longtemps, comme le F-111 Aardvak, le EF-111 Raven ou encore le EA-6 Prowler sont cités.

Quoi qu’il en soit, a récemment commenté Rose Gotemoeller, la secrétaire générale adjointe de l’Alliance atlantique, qui a toutefois qualifié la décision turque de « souveraine », « nous pensons vraiment qu’il est bon pour l’efficacité de la défense de chaque pays si les systèmes sont interopérables, s’ils peuvent fonctionner avec ceux de l’Otan. » Et d’insister : « Le S-400 n’est pas interopérable avec les systèmes de l’Otan. »

Pour autant, si la discussion sur l’achat du S-400 est « terminée », comme l’a dit le président Erdogan, la Turquie n’a pas abandonné, du moins apparemment, l’idée de se doter d’un système compatible « Otan ».

« Les S-400 étant incompatibles avec le système de défense de l’Otan, nous poursuivons notre objectif visant à développer un système compatible » a affirmé, le 23 mars, Hami Aksoy, le porte-parole du ministère turc des Affaires étrangères. Les discussions se poursuivent avec les États-Unis au sujet du système de défense sol-air, Patriot », a-t-il même ajouté.

Et, une semaine plus tard, la diplomatie turque a indiqué que les participants à la 5ème session du Dialogue commercial Turquie-États-Unis sur l’industrie de la défense ont « discuté des développements actuels dans l’industrie de défense et des possibilités de coopération entre les deux pays. »

Seulement, le système Patriot n’est pas le seul en course. Début janvier, lors de la visite du président Erdogan à Paris, le consortium Eurosam (Thales et MBDA) s’était vu confier un contrat d’étude de définition d’un futur système de défense aérienne dans le cadre du programme LORAMID (Long-Range Air and Missile Defense System). Ce dernier « doit garantir à la Turquie une autonomie totale en matière d’emploi et permettre un choix souverain du niveau d’intégration au sein de l’Otan », avait précisé l’industriel.

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