Un rapport s’inquiète pour la sécurité des bombes nucléaires américaines stockées en Turquie

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La dissuasion nucléaire de l’Otan repose essentiellement sur environ 180 bombes tactiques américaines de type B-61, réparties dans cinq pays membres, à savoir l’Allemagne, la Belgique, l’Italie, les Pays-Bas et la Turquie.

Ces armes sont stockées selon le principe dit de la « double clé ». En clair, si les chasseurs-bombardiers des pays hôtes ont la capacité d’emporter ces bombes B-61, le contrôle de ces dernières (donc leur code d’armement) relève exclusivement des États-Unis. Sauf pour la Turquie… pour la simple raison que ses forces aériennes ne disposent pas d’appareil capable d’assurer une mission nucléaire.

Quoi qu’il en soit, la Turquie abrite donc une cinquantaine de B-61, précisément sur la base d’Incirlik, située à une centaine de kilomètres seulement de la frontière syrienne.

Or, après le coup d’État manqué du 15 juillet et les purges au sein de l’armée lancées par le gouvernement turc, la question de la présence de cet arsenal en Turquie a été posée par plusieurs journaux américains, dont le New Yorker, pour qui cette affaire a des implications au niveau de la « sécurité nationale ».

« Bien qu’Incirlik possède probablement plus d’armes nucléaires que la plupart des autres bases de l’Otan, elle n’a pas d’avions adéquats permettant de les délivrer. Les bombes sont donc entreposées dans la base en sous-sol, attendant d’être utilisées ou détournées », s’est ainsi inquiété l’hebdomadaire.

Ancien directeur de la défense et du contrôle des armes au Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, Steve Andreasen a écrit, dans les colonnes du Los Angeles Times, que « nous avons de nombreuses preuves que la sécurité des armes américaines stockées en Turquie peut changer littéralement du jour au lendemain. »

Pour le groupe de réflexion apolitique Stimson Center, qui, dans un rapport, plaide en faveur du retrait de toutes les B-61 d’Europe, il est « impossible de savoir si les États-Unis auraient pu maintenir le contrôle sur les armes en cas de guerre civile prolongée en Turquie. »

« D’un point de vue sécuritaire, stocker approximativement cinquante armes nucléaires américaines sur la base aérienne d’Incirlik revient à jouer à la roulette russe », a fait valoir Laicie Heeley, co-auteure du rapport en question. « Il y a des garde-fous importants (…) mais ce ne sont que des dispositifs de protection, cela n’élimine pas le risque. Dans le cas d’un coup d’État, on ne peut pas dire avec certitude que nous aurions été capable de garder le contrôle », a-t-elle expliqué à l’AFP.

Cependant, pour le Pentagone, il n’y a pas de crainte particulière à avoir. « Nous n’évoquons pas la localisation d’avoirs stratégiques », a-t-il indiqué, en réponse à une question portant sur le rapport du Stimson Center. Mais, s’est-il borné à préciser, « les mesures appropriées » ont été prises pour assurer la sécurité des militaires américains et des « installations ».

Plus largement, le maintien en Europe de ces bombes B-61 – qui seront modernisées – fait débat. Cela étant, il s’agit là d’une question politique : l’Otan a fait savoir qu’elle resterait une alliance nucléaire tant qu’il y aura des armes nucléaires dans le monde et le raidissement de la Russie plaide pour le statu-quo.

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