Une force multinationale africaine est envisagée pour combattre le groupe jihadiste nigérian Boko Haram

Les forces armées nigérianes n’arrivent pas à contrer efficacement les jihadistes du groupe Boko Haram, lesquels contrôlent désormais  une grande partie de l’État de Borno, situé dans le nord du pays, sur les rives du Lac Tchad et à la frontière avec le Cameroun et le Niger.

Désormais, la menace que représente Boko Haram n’est plus locale mais régionale étant donné que les jihadistes nigérians multiplient les incursions dans l’extrême-nord du Cameroun et que leurs exactions contre les populations civiles provoquent un afflux de réfugiés au Niger et au Tchad.

Clairement, les autorités nigérianes sont dépassées. Certains vont même jusqu’à dire qu’elles se désintéressent de la question. Pourtant, au printemps 2014, les pays de la Commission du Lac Tchad, dont le Nigéria, avaient pris des engagements fermes pour combattre Boko Haram, en prônant davantage de coopération entre-eux et en décidant le déploiement d’une force militaire conjointe. Mais ces mesures peinent à se concrétiser.

Et, pendant ce temps, les jihadistes nigérians continuent leurs exactions, comme récemment à Baga (plus de 2.000 tués selon les estimations et 16 villages rayés de la carte) et leur progression, leur objectif étant d’instaurer un califat, à l’image de ce qu’a fait l’État islamique (EI ou Daesh) en Irak et en Syrie.

Devant la gravité de la situation, le Tchad a pris l’initiative d’intervenir militairement au Cameroun, à la demande de Yaoundé, afin d’y contrer les incursions de Boko Haram.

« Nous ne pouvons pas dire que nous sommes indifférents à ce qui se passe, parce que nous sommes concernés directement et parce que nous estimons que le Cameroun ne doit pas faire face seul à cette nébuleuse. J’ai lancé aussi un appel aux pays de la CEEAC [Communauté économique des États de l’Afrique centrale] et à tous les pays du continent africain afin qu’ils viennent avec nous pour former une large coalition pour faire face à cette nébuleuse Boko Haram et montrer ainsi à la face du monde que l’Afrique est capable de résoudre ses problèmes », a expliqué Idriss Déby-Itno, le président tchadien.

Mais Boko Haram inquiète aussi les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Ces derniers ont l’intention de demander, cette semaine, lors du sommet de l’Union africaine, l’autorisation de créer une force multinationale pour combattre les jihadistes nigérians. C’est, du moins, ce qu’a affirmé John Mahama, le président ghanéen, lors d’un entretien accordé à Reuters.

« Le Nigeria mène des opérations militaires et le Cameroun combat Boko Haram mais je pense que nous en arrivons à un point où il faut probablement envisager la création d’une force régionale ou multinationale », a expliqué  John Mahama. « C’est ce dont nous voulons discuter avec l’Union africaine parce que si cela se produit il faudra un mandat pour autoriser cette force à opérer », a-t-il ajouté.

En outre, pour le président ghanéen, « le terrorisme est comme un cancer. Si nous ne le traitons pas, il va continuer à se développer. Il menace tout le monde dans la région. Quand il s’agit de terrorisme, personne n’est trop loin ni trop près », a-t-il dit.

Reste que le déploiement d’une telle force multinationale prendra du temps car il faut régler plusieurs questions, à commancer par son commandement et son financement. « Une fois l’entité opérationnelle, l’UA devrait demander un mandat auprès du Conseil de sécurité des Nations Unies pour la prendre en charge, comme cela s’est fait dans la région du Darfour, au Soudan », a ajouté John Mahama, qui assure la présidence tournante de la Cédéao.

Seulement, est-ce que les pays de la Cédéao ont les capacités militaires nécessaires? La question s’est posée lors de l’affaire malienne, où il s’agissait de chasser les jihadistes d’al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) et d’Ansar Dine. Et la réponse sera la même, les difficultés qu’ils rencontrèrent pour former la Mission internationale de soutien au Mali (MISMA), n’ayant pas été réglées depuis.

En avril 2013, un conseiller du secrétaire américain à la Défense, Michael Sheehan, avait affirmé que les troupes de la Cédéao engagées au Mali constituaient une « force totalement incapable » qui n’avait « pas été à la hauteur ». Seules les forces tchadienne [le Tchad ne fait pas partie de la Cédéao, ndlr] apportèrent un appui décisif à l’opération française Serval.

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