Une offensive des jihadistes de l’EI provoque un exode massif des kurdes syriens vers la Turquie

Cet été, l’offensive lancée par les jihadiste de l' »État islamique » (EI, ou Daesh) vers Erbil, la capitale du Kurdistan irakien, a été arrêté en grande partie grâce à l’appui aérienne fourni par l’aviation américaine au combattants kurdes (Peshmergas), ainsi qu’à la livraison d’armes par plusieurs pays occidentaux, dont la France et le Royaume-Uni.

En revanche, les Kurdes syriens ne peuvent pas compter sur une appui similaire. Et pourtant, ils en aurait besoin plus que jamais. Depuis la fin de la semaine dernière, l’EI a lancé une offensive en direction de leurs territoires, afin de s’emparer de la ville d’Aïn al-Arab (« Kobané », en kurde), laquelle revêt une importance stratégique à ses yeux dans la mesure où son contrôle lui permettrait s’assurer une continuité territoriale avec les secteurs qu’il a conquis et de contrôler le côté syrien de la frontière avec la Turquie.

En outre, si Aïn al-Arab tombe aux mains des jihadistes, ces derniers pourront avancer vers d’autres régions kurdes et élargir ainsi le califat qu’ils ont proclamé.

L’offensive de l’EI sur la ville kurde se fait sur deux axes (à l’est et au sud d’Aïn al-Arab). Au cours de ces derniers jours, ils ont pris le contrôle d’une soixantaine de villages kurdes situés dans les environs. Les jihadistes utilisent des chars T-72 de fabrication russe, pris à l’armée syrienne, ainsi que des mortiers et autres systèmes d’artillerie.

Cette progression de l’EI a provoqué l’exode, sans cesse plus important, de civils kurdes vers la Turquie toute proche. Ils étaient 60.000 le 19 septembre à avoir trouvé refuge de l’autre côté de la frontière. Ils seraient  entre 100.000 et 130.000 actuellement. Pour rappel, l’armée turque envisageait, la semaine dernière, d’établir une zone tampon à la frontière avec la Syrie afin d’éviter un afflux massif de réfugiés.

Face à cette offensive de l’EI, le Parti des travailleurs du kurdistan (PKK), classé parmi les organisations terroristes, tant par Ankara que les Occidentaux, a appelé les Kurdes de Turquie à aller défendre Aïn al-Arab. « Le jour de gloire et d’honneur est arrivé. Il n’existe plus aucune limite dans la résistance », a-t-il fait valoir dans un communiqué. « Nous appelons notre peuple tout entier ainsi que nos amis à augmenter leur résistance au Kurdistan et à Kobané », a-t-il ajouté.

Seulement, les autorités turques ont interdit aux jeunes Kurdes de passer la frontière en sens inverse, pour des « raisons de sécurité ». Beaucoup d’entre eux ont en effet accompagné leurs familles pour les mettre à l’abri pour ensuite aller combattre les jihadistes. D’autres, habitant en Turquie, veulent prêter main forte à leurs cousins syriens. Des centaines de jeunes militants kurdes ont ainsi été empêchés de partir en Syrie par la police et la gendarmerie turques, ce qui a provoqué, le 21 septembre, des échauffourées.

« Les autorités turques sont en partie responsables de cette situation. Elles protègent Daesh qui est une organisation terroriste. (…) Aujourd’hui, elles empêchent les jeunes Kurdes de revenir vers la Syrie pour défendre leur territoire », a accusé Ibrahim Binici, un député du Parti démocratique populaire (HDP).

Que le gouvernement turc soit accusé de collusion avec l’EI n’est pas nouveau. Et la libération d’une quarantaine de ressortissants turcs, jusqu’alors retenus en otage par les jihadistes après leur conquête de Mossoul, en Irak, renforce certains dans cette idée. Ainsi, le président Recep Tayyip Erdogan a assuré qu’aucune rançon n’avait été versée et qu’elle a été obtenue par des « négociations diplomatiques et politiques »… Ce qui laisse supposer qu’un accord a été passé avec l’organisation terroriste. De quelle nature? En tout cas, cela laisse libre court à toutes les suppositions.

Quoi qu’il en soit, les combats font rage autours d’Aïn al-Arab. « La progression sur le front à l’est et au sud (d’Aïn al-Arab) a été ralentie car les combattants kurdes ont intensifié leurs attaques contre les véhicules de l’EI depuis l’exode des civils et de violents combats se déroulent », a indiqué l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). « Ils ont empêché les jihadistes d’avancer et ont contenu leur offensive », a-t-il ajouté. En outre, des rebelles syriens chassés de Raqqa par les jihadistes ont rejoint les combattants kurdes.

« Des combats sont toujours en cours mais la progression de l’EI vers l’est de Kobané est stoppée depuis la nuit dernière », a confirmé Redur Xelil, porte-parole du groupe de défense kurde YPG,

Alors que les populations kurdes de Syrie sont menacées par l’avancée des jihadistes, que font les forces gouvernementales? Eh bien elles ont effectué des frappes dans la province d’Idlib, qui, située dans le nord-ouest du pays, est contrôlée en grande partie par des rebelles anti-Assad, notamment ceux du Front islamique. Ces bombardements ont fait au moins 43 tués.

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