Il y a 800 ans, le roi de France remportait la bataille de Bouvines

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Fils d’Aliénor d’Aquitaine et frère de Richard Ier, dit Richard Coeur de lion, Jean d’Angleterre se voit déposséder, à partir de 1206, d’une partie de ses terres par le roi Philippe Auguste, dont le duché de Normandie, les comtés d’Anjou, du Maine et du Poitou. D’où son surnom de « Jean sans terre »…

Aussi, pour reprendre l’avantage sur le roi de France, Jean d’Angleterre va constituer une vaste coalition en s’appuyant notamment sur l’empereur romain germanique Otton IV, qui vient d’être excommunié par le pape Innocent III. Ce souverain a quelques comptes à régler avec Philippe Auguste puisque ce dernier soutint son rival, Philippe de Souabe.

D’autres « barons » ayant quelques sérieux griefs avec le roi de France rejoignent également cette coalition, dont le comte de Boulogne, Renaud de Dammartin, pourtant vassal et ami d’enfance de Philippe Auguste, et le comte Ferrand de Flandre (ou Ferdinand de Portugal).

Pour le roi de France, la Flandre est stratégique pour ses ports. Prospère, cette région doit en effet lui servir de point de départ pour envahir l’Angleterre. Seulement, le comte Ferrand refuse… Le comté est alors envahi par Philippe Auguste, lequel perdra une partie de sa flotte, incendiée par un petit corps expéditionnaire anglais en mai 1213.

Quant aux raisons qui ont poussé Renaud de Dammartin a soutenir Jean sans Terre, elles sont plus obscures. Un différend l’aurait opposé à l’évêque de Beauvais Philippe de Dreux, auquel Philippe Auguste a donné raison.

Quoi qu’il en soit, le plan de Jean sans Terre est simple. Lui et ses troupes débarqueront à La Rochelle pour se lancer ensuite à la conquête du Maine et de l’Anjou, tandis que l’empereur Otton IV, associé à Renaud de Dammartin et au comte de Flandre, attaquera dans le nord de la France avec l’objectif de prendre Paris. Pour Philippe Auguste, la menace est donc sérieuse : il lui faudra combattre sur deux fronts, si l’on peut dire.

Mais même les plans les plus simples ne se passent jamais comme prévus. Et celui de Jean sans Terre ne fera pas exception. En effet, le roi d’Angleterre est battu par le prince Louis (futur Louis VIII de France dit « le « Lion ») à La Roche-aux-Moines le 2 juillet 1214. La troupe française s’empare alors des engins de siège que les Anglais avaient diposés pour prendre cette place forte.

Au nord, les opérations d’Otton IV n’ont alord pas commencé. Pendant que Jean sans Terre prend la fuite devant le prince Louis, il concentre ses troupes à Aix-la-Chapelle avant de fondre sur le comté de Flandre. Ces dernière sont constituées par celles des ducs de Brabant et de Lorraine, la chevalerie du comte Ferrand, des soldats anglais du comte de Salisbury et quelques fidèles de Dammartin. Mais l’empereur, entouré d’un grand nombre de seigneurs allemand, dispose aussi d’un contingent de mercenaires redoutables, appelés les « Brabançons ». Contrairement à celui de Philippe Auguste, cet ensemble manque ainsi de cohérence, ce qui lui sera préjudiciable par la suite…

Il est difficile d’avoir une idée précise des effectifs engagés par l’un et l’autre camp. À la louche, il est estimé que les deux comptaient quelques milliers de cavaliers (chevaliers et sergents à cheval) et autant de fantassins. Cela étant, Philippe Auguste aurait été en infériorité numérique…

Le 23 juillet 1214, l’armée royale pénétre dans le comté de Flandre afin de faire, en quelque sorte, une démonstration de force. Puis, trois jours plus tard, Philippe Auguste décide de se replier vers Tournai. Seulement, Otton IV est bien décidé à livrer bataille après avoir rattrapé l’arrière-garde française. Et malgré que l’on soit un dimanche (l’Église catholique interdit alors de se battre le jour du Seigneur), le roi de France est obligé de relever le gant.

Enfin, les chroniques de l’époque n’étant pas toutes dignes de confiance pour avoir le récit exact de la bataille qui va suivre, l’on ne sait pas exactement si Philippe Auguste n’a pas tendu un piège à ses adversaires pour les attirer sur un terrain qui lui était favorable…

Quoi qu’il en soit, l’on sait qu’Otton décida de scinder ses troupes en 3 : le flanc gauche revient au comte de Flandre et à ses chevaliers, celui de droite à Renaud de Dammartin, à la tête des Brabançons et des soldats anglais de Salisbury. Quant au centre, il est commandé par l’empereur. Face à ces 3 colonnes, les Français se déploient en ligne.

Le choc a donc lieu à Bouvines, près de Lille. Dans un premier temps, l’aile gauche des armées impériales est défaite par les chevaliers champenois et bourguignons commandée par le duc Eudes de Bourgogne et ses lieutenants tandis que les hommes emmenés par  Robert de Dreux et le comte Guillaume de Ponthieu font céder la colonne des mercenaires brabançons.

Au centre, les combats sont d’abord dominés par l’infanterie d’Otton IV qui n’a qu’un objectif : tuer Philippe Auguste, qui est en première ligne. Mais l’attaque française sur le flanc droit crée une brèche, ce qui permet aux troupes du roi de France de prendre leurs adversaires à revers. C’est le début de la débandade qui annonce la victoire de l’armée royale. Si l’empereur parvient prendre la fuite, les comtes de Boulogne et de Flandre sont faits prisonniers. Le premier mourra en prison en 1217 et le second sera libéré 10 ans plus tard.

Étant « l’une des batailles décisives et symboliques de l’histoire de France », selon Jean Favier, Bouvines aura plusieurs conséquences. D’abord, elle marque le début de l’unité nationale française tandis qu’au contraire, elle retardera pour des siècles l’unification de l’Allemagne, Otton IV ayant été déposé par les « barons » locaux dont les descendants se diviseront en principautés et autres comtés. Pour Jean sans Terre, cette défaite aura été celle de trop : lui aussi doit faire face au mécontentement des nobles anglais, qui le contraindront à accepter la Magna Carta (la Grande Charte des libertés, devant limiter l’arbitraire du pouvoir royal), qui est le fondement aujourd’hui du droit britannique.

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