Décès du colonel Amédée Passemard, plus jeune pilote de chasse d’avant-guerre

Grand officier de la Légion d’Honneur, le colonel Amédée Passemard s’est éteint le 19 août, à l’âge de 93 ans. L’annonce de son décès a été faite par sa famille dans le carnet du quotidien Le Figaro.

Né à Vézézoux (Haute-Loire) dans une famille paysane, le destin d’Amédée Passemard sera bouleversé par la découverte de l’aviation, grâce à un ami de ses parents qui fréquente alors l’aéro-club de Brioude. A l’âge de 16 ans à peine, et malgré le manque d’enthousiasme de son père, il s’inscrit à l’Aviation Populaire, une initiative lancée par le ministre de l’Air, Pierre Cot, afin de démocratiser l’accès au monde aéronautique.

Un an plus tard, Amédée Passemard obtient son brevet civil premier degré et obtient une « bourse de pilotage », ce qui lui ouvre la perspective de devenir pilote de réserve de l’armée de l’Air. Mais, finalement, il décide de rejoindre les rangs de cette dernière et c’est ainsi qu’il se retrouve à l’école Caudron d’Ambérieu, où il décroche son brevet militaire n°26362.

Nommé sergent, il est affecté à l’école des sous-officiers d’Istres en octobre 1938 et devient, à l’issue, le plus jeune pilote de chasse de l’armée de l’Air, si ce n’est, comme il se plaisait à le dire, du monde. Il rejoint ensuite la 3e escadrille (SPA 73 « Cigogne ») du groupe II/7, alors basée à Luxeuil et dotée de Morane-Saulnier 406.

Il effectue sa première mission de guerre le 20 septembre 1939 et 59 autres suivront jusqu’à l’armistice. Au cours de ces dernières, il remporte 7 victoires en participation (1 Henschel 126, un Ju-88, deux Do-217 et 3 He-111), dont 4 sont homologuées. Il aurait pu obtenir le statut d’as s’il n’y avait pas une erreur d’homologation sur la 5e…

Au début de l’offensive allemande de mai 1940, le GC II/7 accumule les coups durs et perd 18 avions en deux jours de bombardement. Ce qui n’a donc pas empêché cette unité de se battre, malgré l’infériorité du MS-406 par rapport aux appareils de la Luftwaffe – notamment le redoutable Messerchmitt 109 – et l’inexpérience de certains de ses pilotes.

« Il fallait se battre. Ça ne nous effrayait pas. Mais nous n’étions pas entraînés au combat aérien. On n’avait même pas fait de tir. Ce n’est qu’en arrivant en escadrille qu’on a fait ça », racontera plus tard Amédée Passemard.

Cela étant, à la fin mai 1940, le GC II/7 perçoit ses premiers Dewoitine 520, un appareil en mesure de rivaliser avec ses rivaux allemands. Mais il est trop tard pour renverser le cours des choses, le 22 juin 1940, l’armistice est signé et une partie de la France est occupée. Quant aux aviateurs de l’armée de l’Air, il est demandé à une partie d’entre eux de rejoindre l’autre rive de la Méditerranée avec leurs appareils.

« Au moment de l’armistice, on en avait gros sur le cœur de voir qu’on en était arrivé là. Certains d’entre nous ont pris la décision de passer en Grande-Bretagne. Mais je pense, avec du retard, bien sûr, que ce ne sont pas des individus qui auraient dû passer, mais ce sont les groupes de chasse entiers. Au lieu de cela, on a glandé en Afrique du nord », confiera Amédée Passemard.

L’inaction prend fin avec le débarquement allié en Afrique du Nord, en novembre 1942. Là, évoluant désormais sur Spitfire, Amédée Passemard prend part à la libération de Tunis. Puis il enchaîne avec des missions de « Coastal Command » avant de rejoindre, en tant que moniteur, l’école de chasse de Meknès, au Maroc.

Il n’y reste pas longtemps puisque, à sa demande, le désormais jeune sous-lieutenant part pour le groupe « Île de France » et ses Spitfire XVI. Il effectue alors des missions d’appui au sol. « Il était très impressionnant de plonger au milieu des gerbes traçants grimpant à notre rencontre », racontera-t-il.

Après la guerre, il se retrouve muté à l’état-major de la défense aérienne du territoire en Afrique du Nord, où il exerce 3 fonctions : adjoint au chef du 3e bureau, chef des transmissions et commandant de l’escadrille d’entraînement équipée de Bell Airacobra, de Nord 1101 et de P-47 Thunderbolt.

Fin 1949, il devient le commandant de la 1ere escadrille du groupe  » Roussillon », équipée de P-63 Kingcobra puis de Grumman Bearcat, et part pour l’Indochine. Trois ans plus tard, il est affecté à la 11e escadre de Luxeuil, alors en cours de transformation sur F-84G Thunderjet avant de prendre la direction d’une base radar à Friedschaffen.

Puis, lors de la guerre d’Algérie, Amédée Passemard est nommé commandant de l’aviation légère d’Oranie, équipée d’avions légers d’attaque de type T-6. En 1963, il est affecté à Bangui (Centrafrique), où il assure notamment la fonction de conseiller militaire auprès de l’ambassadeur de France. Deux ans plus, il est muté au commandement de la base aérienne d’Istres, puis rejoint l’état-major de la FATAC (force aérienne tactique). Promu colonel, il quitte l’armée de l’Air en 1969.

Après un passage au Syndicat national des organismes de fabricants d’engrenages et de transmissions, il est recruté pour diriger l’annexe du Centre d’essais en vol de Melun-Villaroche, organisme qu’il quittera en 1982.

Au cours de sa longue carrière, celui qui aura été le plus jeune pilote de chasse français, et peut-être du monde, a compté 5.000 heures de vol et 650 missions de guerre.

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