Des plans de l’Otan pour protéger les pays baltes

Dans les pays baltes, l’on ne garde pas un très bon souvenir de la période soviétique et l’on se méfie des intentions du voisin russe. En janvier 1991, alors que les média internationaux avaient les yeux rivés sur l’opération Tempête du Désert dans le golfe Persique, l’armée Rouge avait envahi l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, qui avait proclamé leur indépendantce un an plus tôt.

La crainte de voir ce scénario se répéter explique la volonté de ces pays à intégrer l’Otan et l’Union européenne et aussi, plus récemment, leur réticence à voir la France vendre à la Russie des bâtiments de projection et de commandement (BPC) de type Mistral.

Les tentatives d’ingérence de Moscou en Ukraine, l’attaque informatique menée par des hackers russes contre l’Estonie après le retrait d’une statue glorifiant l’armée Rouge en avril 2007 et surtout le conflit russo-georgien d’août 2008 n’ont pas contribué à rassurer les pays baltes.

D’où, selon les notes diplomatiques américaines révélées par WikiLeaks, l’extension aux pays baltes, à leur demande, d’un plan de défense de l’Otan, appelé « Aigle Gardien », élaboré initialement pour protéger la Pologne d’une éventuelle agression russe.

Les Etats baltes bénéficient déjà d’une protection de la part de l’Otan, notamment au niveau de la défense aérienne. Au début de cette année, l’armée de l’Air française y a déployé 4 Mirage 2000 C/RDI venus de la base aérienne de Cambrai, dans le cadre de la Air Baltic 2010.

Mais les discussions concernant le renforcement de ce plan de défense ont suscités quelques réserves, notamment de la part de l’Allemagne, favorable à un rapprochement avec la Russie, mais aussi de la Pologne, soucieuse de voir amoindries les mesures défensives prise par l’Otan en sa faveur.

Finalement, les pays baltes ont obtenu gain de cause, grâce à la Russie, qui a mené d’importantes manoeuvres, appelées Ouest 2009, en septembre de la même année. Ces exercices, qui se sont déroulés à la frontière polonaise, ont été très mal perçus par les anciens membres du Pacte de Varsovie, aujourd’hui membre de l’Otan. Il faut dire que le scénario retenu avait de quoi rendre méfiant puisqu’il s’agissait de répondre fictivement à des ingérences de la Pologne en Biélorussie.

Seulement voilà, depuis novembre dernier, l’Otan et la Russie ont opéré une rapprochement et il est question d’une éventuelle collaboration dans le domaine de la défense antimissile. Et la révélation de l’existence de ce plan secret par la diffusion des télégrammes du département d’Etat américain a suscité des interrogations à Moscou.

« De telles publications suscitent un grand nombre de questions et la perplexité » a estimé un responsable du ministère russe des Affaires étrangères, dont les propos ont été relayés le 7 décembre par l’agence Interfax. Chez les militaires, l’on ne se montre guère surpris. « Un plan d’actions stratégiques visant à détruire le groupement de troupes à Kaliningrad (ndlr, enclave russe située entre la Lituanie et la Pologne) a été élaboré il y a six ans » a fait remarquer une source citée par le même médium.

Mais l’ambassadeur russe auprès de l’Otan, Dmitri Rogozine, compte bien aborder le sujet avec ses homologues et les mettre devant ce qui lui apparaît une contradiction entre les mots et les gestes. « Nous sommes au contraire pour des accords multiples permettant de réduire la présence militaire de part et d’autre de la ligne de contact entre nous et l’Otan, de manière à ce que ni l’Otan ni la Russie n’aient de potentiel offensif » a-t-il par ailleurs expliqué à l’AFP.

Du côté de l’Alliance atlantique, les rames sont de sorties pour justifier l’existence du plan de défense des Etats baltes. « Comme le secrétaire général (ndlr, Anders Fogh Rasmussen) l’a dit au sommet de Lisbonne, l’Otan et la Russie ne représentent pas une menace l’une pour l’autre » a rappelé Oana Lungescu, la porte-parole de l’organisation.

Rappelant que la confidentialité des documents cités par WikiLeaks et repris par les quotidiens partenaires de ce qui apparaît comme étant le Pearl Harbor de la diplomatie américaine, Oana Lungescu a expliqué que « l’Otan a toujours eu et continuera d’avoir les plans adaptés à la protection de tous les alliés » tout en gardant la volonté d’établir « un vrai partenariat stratégique entre l’Otan et la Russie », conformément à nouveau concept stratégique.

Justement, ce document indique que « l’Otan ne constitue pas une menace pour la Russie ». Mais comme l’a fait remarquer Dmitri Rogozine, il n’est pas dit si l’Alliance « considère la Russie comme une menace ».

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